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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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effectivement appelé à Nancy, le samedi soir, mais pour le mettre en garde : « Cette conférence de presse est tout à fait inopportune. Vous allez ranimer des querelles enfouies. Faites-la, si vous croyez que vous ne pouvez plus reculer, mais faites attention à ce que vous dites. Et abritez-vous derrière le fait que ce sont les derniers essais en atmosphère. »
    Version de Michel Poniatowski telle que me la donne André Mousset : « Chirac a mangé la consigne de Giscard. Il devait lui conseiller plus fermement d’être prudent, ou même d’annuler la conférence. »

    Hier 12 juin, vu Xavier Gouyou-Beauchamps, devenu porte-parole de l’Élysée. Il est formel : dès les premières dépêches, dès les premiers bulletins à la radio sur la fameuse conférence de presse de Jean-Jacques Servan-Schreiber, branle-bas de combat ! Il a été convenu que Jacques Chirac, qui était en Corrèze, serait reçu à l’Élysée par le président à 21 h 30. « C’est là, dit Gouyou-Beauchamps, que Claude Pierre-Brossolette 29 et moi avons pensé que Jean-Jacques Servan-Schreiber allait être exclu du gouvernement. »
    Lorsque Chirac est arrivé à l’Élysée, il était 22 heures. « Le président, me dit Gouyou-Beauchamps, estimait que Jean-Jacques était totalement inconscient, mais il n’a pas hésité à le sanctionner. Il pensait que J-J S-S, à qui il offrait une chance un peu personnelle, aurait été capable de la saisir. Il a dit à Chirac et à Brossolette : “Tant pis, allez-y : vous pouvez publier le communiqué.” Claude Pierre-Brossolette : “Il faudrait quand même le prévenir !” Giscard : “Est-ce qu’il m’a prévenu, lui ?” Brossolette : “Justement. Ne faisons pas la même erreur.” »
    Il reste que, Chirac parti, Brossolette et Giscard se sont interrogés : « Giscard n’est pas sûr que Chirac ait agi convenablement. Probablement Chirac a-t-il été trop rapide », a-t-il dit.
    Il reste aussi, et Gouyou-Beauchamps en convient, que J-J S-S est tombé sur le seul domaine où le respect de la compétence du président de la République est essentiel.

    « C’est le cirque Médrano ! » commente Edgar Faure auprès de quelques journalistes.

    Quelques instants après Gouyou-Beauchamps, je rencontre André Mousset, porte-parole de Ponia. Il pense que Jean-Jacques et Valéry ont été tous deux piégés par le coup de téléphone de Chirac. Mais Valéry – il n’appelle les deux hommes que par leur prénom dans la conversation – ne pouvait pas faire autrement. « Ce que le président ne pouvait pas admettre, c’est qu’on le mette en compétition avec le pouvoir militaire. Il s’est séparé de Jean-Jacques la mort dans l’âme, parce qu’il tenait à lui. Pour Giscard, l’entrée de Jean-Jacques au gouvernement avait été symbolique. Ce n’était pas pour le foutre à la porte dix jours plus tard. »
    Cela a été aussi, me dit-il, la réaction de Ponia : « Ponia a été d’accord pour que Jean-Jacques soit démissionné, parce que l’autorité du chef de l’État a été mise en cause. »
    13 juin (suite)
    Je demande à Jacques Friedmann si Jacques Chirac avait intérêt à se débarrasser de Jean-Jacques Servan-Schreiber. Il me répond que non, qu’il n’avait aucune motivation, ni politique ni personnelle, pour prendre un tel risque.
    Alors, est-ce que Jacques Chirac avait intérêt à ménager l’UDR, qui n’avait aucune envie de voir le patron de L’Express au gouvernement ? « Jacques Chirac, chef de l’UDR ? Aujourd’hui ? Il n’y a pas intérêt, affirme Friedmann. Mais l’UDR existe, il ne tient pas à voir les gaullistes laminés par les républicains indépendants. »
    Il ajoute : « Ponia veut des élections rapides, Jacques Chirac les préférerait plus tard, lorsqu’il lui semblera que l’UDR est recollée, que son implantation locale est renforcée et que la politique générale du gouvernement passe bien. Mais il est d’accord sur l’allure générale, sur l’ouverture, la concertation. »
    Conclusion : « Le groupe UDR suivra, car il aura la trouille. Je ne vois pas de divergences de fond sur ces problèmes entre Chirac etPonia. La divergence principale, elle viendra plus tard, et elle portera là-dessus : qui, de Chirac ou de Ponia, aura le pouvoir ? Ponia a une haine viscérale de l’UDR. Il a passé des années à avaler des couleuvres, et il est aujourd’hui pour la première fois en

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