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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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toucher à rien. Et, aujourd’hui, il se complaît dans cette attitude. « Il ne fera plus rien », a conclu Barre dans un ricanement.

    3 juillet
    Dîner avec Michel Debré. Il se retire progressivement de la vie politique. Il sent bien qu’il n’y a pas – ou plus – sa place. Ce qu’il a toujours craint se réalise aujourd’hui : un mouvement gaulliste divisé, un Parti socialiste au pouvoir, et dans quel état ! Par-dessus tout, à gauche et à droite, des hommes chez qui il ne sent pas de volonté politique, qui se laissent porter par les événements plutôt qu’ils ne les font. Et Chirac survolant tout cela, se contentant d’égrenerquelques mots chaleureux aux militants, quelques phrases rigolotes aux journalistes.
    Plus de rôle en politique ? Peut-être, dit-il tristement. Au demeurant, depuis qu’il s’est présenté, sans aucun succès, à l’élection présidentielle de 1981, il n’a pas retrouvé sa place dans la vie publique, il en convient aisément, non sans mélancolie.
    Aurait-il dû alors, se demande-t-il, accepter la présidence du Conseil constitutionnel lorsque Olivier Guichard, mandaté par Georges Pompidou, lui en avait transmis la proposition, il y a bien longtemps ?
    Il m’a conté à cette occasion cet épisode que je ne connaissais pas : Georges Pompidou avait en effet pensé un moment lui confier cette présidence du Conseil constitutionnel après le départ de Gaston Palewski, programmé pour le début mars 1974. Pourquoi ? En partie évidemment parce que le rôle de gardien d’une Constitution que Michel Debré avait voulue et en partie rédigée lui aurait convenu à merveille. Mais aussi, me dit Debré, parce que ses critiques, devenues permanentes, de la politique extérieure et économique de Georges Pompidou faisaient de l’ombre à celui-ci et semaient l’inquiétude parmi les gaullistes.
    Ne voulant pas s’exposer lui-même à un refus, Pompidou lui avait donc envoyé Guichard que Michel Debré avait interrompu dès la première phrase : si Pompidou voulait l’éloigner, très bien, mais pas comme ça, pas en l’isolant dans une cage dorée avec interdiction d’intervenir dans le débat politique.
    Olivier Guichard était reparti désolé.
    L’autre soir – seize ans plus tard –, Debré s’interroge : a-t-il eu tort de refuser la proposition ? Peut-être aurait-il connu un autre destin, moins cruel. Il avait à l’époque épuisé une grande partie de la joie d’occuper des postes ministériels. Il aurait pu se mettre quelques années dans la peau d’un sage. Quitte à en sortir : après tout, Pompidou lui-même l’avait fait 30 ...
    Finalement, Michel Debré n’aime pas la sagesse. On ne se refait pas. C’est Roger Frey qui fut désigné en 1974.

    8 juillet
    Je l’ai échappé belle : je devais me rendre mardi dernier au colloque organisé par Olivier Stirn 31 avec Michel Durafour et d’autres participants, dont Jack Lang et Jean-Pierre Chevènement, sur les valeurs de la gauche aujourd’hui. Chargé plus ou moins d’en assurer le retentissement, mon vieil ami Marc Paillet m’avait demandé de « couvrir » la séance du matin dans l’espoir que TF1 consacrerait un des sujets du 20 heures à cette réunion.
    J’avais promis de le faire, mais, au dernier moment, le comité du mardi 32 se terminant plus tard que d’habitude, j’y ai renoncé.
    Le lendemain, émotion considérable dans la presse : les organisateurs du colloque, de peur qu’il n’y ait pas assez de monde, ont fait la retape de gens qui passaient dans la rue ou d’étudiants en quête de quelques sous. De sorte que le colloque a eu lieu devant des figurants ! Pas de quoi fouetter un chat ? Peut-être bien. Chacun imagine que ce n’est pas Olivier Stirn lui-même qui est allé démarcher les passants ! L’effet produit est néanmoins catastrophique pour lui ! Il paraît qu’il songe à démissionner. En politique, le ridicule tue.

    14 juillet
    Comme d’habitude, nous sommes une ribambelle de dirigeants ou de journalistes d’Antenne 2 et de TF1 à nous retrouver à l’occasion de la traditionnelle interview du président de la République. Cette fois, Christine Ockrent et Patrick Poivre d’Arvor officient. Costume sombre, Mitterrand paraît moins pâle que d’ordinaire. Il fait beau, l’interview a lieu dans le fond du parc, tandis que les invités à la garden-party de la fête nationale font grand bruit. Parquée sur un côté du

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