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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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urnes : il a recueilli les voix socialistes, bien sûr, mais sans doute aussi quelques voix du Front national ; et, surtout, une poignée de bulletins blancs ont fait la différence, dont celui du RPR Jean Foyer, retenu, a-t-il immédiatement fait savoir, au Conseil supérieur de je ne sais quoi, et n’ayant donc pas pris part au vote !
    Bref, la majorité n’a pas fait bloc autour de son candidat. Peut-être la personnalité complexe de Bernard Stasi y est-elle pour quelque chose : homme du centre dont le cœur penche à gauche, partisan de l’abolition de la peine de mort, inclassable, donc, et fier de l’être, le député de la Marne a toujours suscité, dans son groupe, interrogations et réticences. Son dernier ouvrage lui a au surplus aliéné le Front national : il y écrivait que, loin d’être un poids pour la France, l’immigration était une chance pour elle.
    Pas une chance pour lui, en tout cas. Roland Dumas en a profité. Réflexion de Raymond Barre, l’air de ne pas y toucher : « Cela ressemble un peu à ce qui s’est passé en 1981... » Façon de souligner que l’extrême droite, qui ne s’appelait pas encore Front national, avait à l’époque préféré Mitterrand à Giscard. Pas toute l’extrême droite, mais une petite marge, tout de même.
    Roland Dumas a beau mettre au défi quiconque de prouver que certains parlementaires FN ont voté pour lui, on ne voit pas comment il aurait pu être élu à la présidence de la commission autrement. Cela dit, tout est bon à prendre en cette période de cohabitation où la gauche n’a plus d’autre pouvoir que la présence de Mitterrand à l’Élysée.

    14 octobre
    Mitterrand candidat en 1988 ? Il a choisi hier une visite aux parachutistes, à Caylus, dans le département du Tarn-et-Garonne, pour dire qu’il n’avait sans doute pas l’intention de se présenter en 1988, mais qu’il n’était cependant pas exclu que des éléments l’y poussent 23 .
    Voilà qui renvoie à ce qu’il a dit cet été, que je n’avais pas relevé à l’époque et que je retrouve aujourd’hui : « S’il y avait une élection aujourd’hui, bien sûr que je serais élu. Pour d’autres socialistes, ce serait plus difficile 24 . »
    Du coup, Michel Rocard, questionné sur la déclaration sibylline de Mitterrand, s’est cru obligé, devant la presse anglo-saxonne, de rappeler sa propre détermination à faire acte de candidature. Il l’a fait dans son vocabulaire à lui, comme s’il se pastichait lui-même, disant « qu’il préférait réfléchir sur le non-exceptionnel que sur l’exceptionnel ». Sic  ! Traduction : il préfère retenir l’hypothèse selon laquelle Mitterrand ne se représentera pas plutôt que celle de sa candidature.
    Jamais, a dit Rocard, les Français n’ont confié deux mandats de sept ans à un même président. Il a cité le cas du général de Gaulle, président de République en 1959, élu au suffrage universel en 1965, abandonnant son mandat en 1969. Celui de Georges Pompidou, mort en 1974, qui n’a donc pas achevé le sien. Sans oublier Giscard, élu en 1974 et battu lorsqu’il a voulu se représenter en 1981. Ces références historiques, le temps qu’a mis Rocard à s’y arrêter, ne montrent qu’une chose : qu’il semble fort bien s’accommoder d’un éventuel retrait de Mitterrand, et même le souhaiter.
    Il le fait à contretemps, il me semble, une fois de plus, c’est-à-dire au moment où tous les leaders socialistes y vont de leur petit couplet pour supplier Mitterrand de se représenter dans dix-huit mois. Charles Hernu, qui ne lui passe rien, a dit, en un commentaire cursif, que Rocard « avait perdu une bonne occasion de se taire ! ».
    « Bof, m’a soufflé Georges Fillioud, restons calmes, inutile de s’énerver. De deux choses l’une : ou les sondages sont bons pour Mitterrand, quelques semaines avant les élections, et il sera candidat ; ou ils sont mauvais, et il laissera Rocard se présenter. »
    Grand bon sens : inutile de se demander tous les jours ce que fera Mitterrand ; il y a de grandes chances pour qu’à l’heure qu’il est, lui-même ne le sache pas.

    20 octobre
    J’ai sous-estimé cette fois la volonté de Michel Rocard : il vient de donner une interview de quatre pages au Nouvel Obs , dans laquelle il persiste et signe ce qu’il a confié aux journalistes de la presse anglo-saxonne il y a moins d’une semaine. Ce n’est pas une plate-forme ni

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