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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Saint-Gobain : la demande a représenté 14 fois l’offre, un million six cent mille Français sont aujourd’hui devenus des actionnaires, les salariés de l’entreprise en France et à l’étranger ont bien acheté les 10 % du capital qui leur étaient réservés.
    Cette réussite tombe à point nommé pour tenter – sans doute sans grand succès – de faire oublier les deux semaines qui viennent de s’écouler.

    25 décembre
    C’est Noël. Pas pour tout le monde. Car, après la capitulation de Matignon sur le texte Devaquet, les salariés du secteur public ont jugé opportun, depuis le début de la semaine, de déclencher grèves et mouvements de revendication multiples. Pour le coup, Chirac résiste : réunis à Matignon en un mini-cabinet de crise, les ministres, cette fois, ont été solidaires. « Si nous dérapons aujourd’hui, toute notre politique déraperait », leur a dit Chirac.
    Il le dit d’autant plus que les électeurs et certains militants du RPR n’ont pas apprécié la reculade du gouvernement sur la loi Devaquet. Jacques Friedmann me le confirme : reculer une nouvelle fois, cette fois devant les grèves du secteur nationalisé, est impossible. Chirac préférerait désormais aller jusqu’à la crise politique.
    Mais si ça continue, si la situation empire, si la semi-paralysie perdure jusqu’en janvier ? Eh bien, Chirac fera le pays juge des conflits sociaux. Il est prêt, donc, à provoquer des élections.
    Les choses se sont très vite dégradées pour Jacques Chirac : en huit mois, il a affronté, bien ou mal, tant de crises graves qu’il ne pouvait qu’y perdre des plumes. La cohabitation tournera-t-elle à partir de maintenant en faveur de Mitterrand ? Lorsque je vois les visages au PS s’illuminer, lorsque même Lionel Jospin esquisse un sourire, je me dis que c’est ce que pensent en tout cas les partisans du Président.
    Quant au Premier ministre, s’il fait aujourd’hui ses comptes, comme je le pense, il ne trouvera pas de raisons de se féliciter de la tournure des événements. Oh, il n’est pas homme à demeurer longtemps face à lui-même ni à sombrer dans l’amertume. C’est néanmoins un politique, capable de juger ses erreurs et surtout de mesurer les solidarités qui lui ont fait défaut. Il avait misé sur les jeunes libéraux de l’UDF, Léotard et Madelin. Ce sont eux qui, estime-t-il, ont quitté le navire à la première bourrasque étudiante. Rien n’est pire, avait dit Léotard, qu’une rupture avec la jeunesse. Il n’avait pas tort, mais devait-il, au moment où Chirac hésitait encore sur le sort de la loi Devaquet, faire savoir publiquement que lui, Léotard, était favorable à un retrait immédiat ? Devait-il faire connaître urbi et orbi ses doutes sur la volonté de Jacques Chirac ? Sans doute pas, sauf s’il voulait déjà tirer son épingle du jeu. C’est bien ce qu’on lui reproche à Matignon.
    1 - Figurent dans le projet économique de l’opposition ces engagements : « Au cours de la législature, seront dénationalisés les banques et compagnies financières, les assurances, le secteur de l’audiovisuel, les grands groupes industriels, Péchiney, Thomson, Rhône-Poulenc, Saint-Gobain, CGE et Bull. À terme, tout le secteur concurrentiel aura vocation à être dénationalisé. » Les textes soumis au président de la République en juillet concernent notamment, parmi les 65 projets de privatisations envisagés, trois banques nationalisées en 1945-1946 : la Société générale, la BNP et le Crédit Lyonnais.
    2 - Secrétaire général du RPR.
    3 - Président du groupe UDF à l’Assemblée nationale.
    4 - Jacques Chirac a dit : « Le Président s’oppose à la volonté clairement affirmée des Français lors des dernières élections... Devant cette situation sans précédent, mon gouvernement, soucieux avant tout de l’intérêt national, ne prendra pas, lui, la responsabilité de compromettre les premiers résultats positifs que nous enregistrons en engageant ce qui aurait pu être une crise politique que les Français n’auraient pas comprise. Le gouvernement a donc décidé de transformer le projet d’ordonnance en projet de loi... »
    5 - Devenu député de Vendée.
    6 - « Il n’aura pas fallu longtemps, dit-il, pour que ce que nous avions prévu arrive. J’attends avec curiosité la réaction du gouvernement qui faisait dire ces temps derniers que la cohabitation fonctionnait

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