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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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conflit avec Mitterrand sur ce sujet : en réalité, depuis le début de la cohabitation. C’est Pierre Bérégovoy qui, en 1992, avait annoncé la suspension des essais nucléaires dans le Pacifique 20 . Depuis lors, Balladur et Léotard sont dix fois, cent fois remontés au créneau, mais Mitterrand n’a jamais voulu reprendre les essais qu’il avait interrompus.
    À moins de provoquer une crise majeure de la cohabitation, dont on ne sait à qui elle aurait profité, le Premier ministre ne pouvait, en matière de Défense, et quels que fussent ses efforts, qu’accepter la décision sans appel du Président. En s’attaquant en la circonstance à la faiblesse du Premier ministre face au chef de l’État, Chirac cherchait donc à mettre en difficulté Édouard Balladur davantage que François Mitterrand lui-même. Cela n’a évidemment pas échappé à Balladur, pas plus, qu’à son ministre de la Défense et allié, François Léotard.
    Millon me dit que l’atmosphère était ce qu’on imagine : atroce. Les dirigeants présents avaient le nez sur la pointe de leurs chaussures. Je ne sais qui a dit en sortant que, désormais, il faudrait peut-être des « casques bleus » aux déjeuners du mardi. Charles Millon me rapporte également que Chirac s’en est irrité : « À quoi servent ces déjeuners si on ne peut rien y dire ? Je n’irai plus ! » Puis il a finalement décidé de continuer d’y participer, mais sans y souffler mot. On verra s’il arrive à faire durablement la gueule.
    1 er  mars
    Vu Jacques Calvet 21 pour un entretien du Nouvel Économiste . Entre des considérations économiques sur la bonne marche du groupe PSA, qu’il anime, il me parle d’Édouard Balladur en des termes inattendus :
    « Balladur est un bon juriste, me dit-il : c’est sa formation. Il est un excellent spécialiste des affaires sociales : il a fait un apprentissage remarqué chez Georges Pompidou en 1968, lorsqu’il était au secrétariat général de l’Élysée. Il est un bon diplomate et suit de très près les relations extérieures de la France dans le monde. Il serait sans doute furieux de ce que je vais vous dire, mais tant pis : il ne connaît rien aux affaires monétaires. »
    Il poursuit, ravi de son effet : « Le comité de la Banque de Paris est composé d’intégristes. Deux dangers menacent le monde : l’intégrisme islamique et l’intégrisme monétariste. »
    Eh bien !
    5 mars
    Nouveau cafouillage autour du « Contrat d’insertion professionnelle » (CIP). Petites causes, grands effets. À la base, la préoccupation essentielle du gouvernement, le chômage des jeunes. Au point de départ, un amendement suggéré par la Confédération générale des cadres (CGC) à un décret d’application de la loi quinquennale sur l’emploi. Avec une maladresse de taille : en réservant aux bac +2 la possibilité de trouver un emploi rétribué à 80 % du SMIC, le gouvernement a touché à un tabou, celui du salaire minimal et de la dévalorisation de toute une filière universitaire, celle qui, justement,avait été créée pour permettre aux jeunes d’accéder à l’emploi. Résultat : le 10 mars, réunification à peu près parfaite des syndicats, divisés depuis des années.
    Encore une fois, et d’une façon que je n’arrive pas bien à comprendre, le gouvernement a procédé de la même manière que pour l’école privée : en instaurant par décret, en marge de la loi quinquennale sur l’emploi, un CIP, il a donné l’impression de vouloir prendre tout le monde par surprise, et, par un tel biais, de revenir sur le montant et l’existence même du salaire minimum.
    Je ne pense pas que Balladur ait pensé un seul instant à supprimer le SMIC, je pense qu’il a fait cela au détour de la loi quinquennale, sans consulter personne, et que c’est cela, surtout, qui lui est reproché. Depuis des années, tous les gouvernements ont donné des coups de canif au salaire minimum, des stages Barre aux TUC de Laurent Fabius en passant par les CES. Balladur n’est et ne sera ni le premier ni sans doute le dernier à vouloir lutter contre le chômage des jeunes. Seulement, voilà : on a trop vanté la méthode Balladur, on en attendait trop, et la déception a été à la mesure de l’attente.
    16 mars
    Petit déjeuner de presse avec Raymond Barre. Égal à lui-même, il n’essaie pas de plaire, il n’élude ni n’atténue ses propos. Il en accentue au contraire les

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