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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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avait fait des réponses évasives : « Une fois, se souvient Charette, il m’a dit : “Pardon, c’est Giscard qui ne m’aime pas, et depuis très longtemps ! Comprenez que je ne puisse pas faire autrement que de me passer de lui.” »
    La réponse de Giscard à cette fin de non-recevoir, que bien entendu Charette lui avait aussitôt rapportée, a consisté à charger Charette de remettre la main sur le Parti républicain qui s’était rangé, lui, du côté de Balladur. Dans l’attente, Giscard ne bougerait pas. « Il n’y a guère que Millon, me dit Charette d’un ton ironique, qui à toutes forces a voulu y aller “pour occuper la place”, disait-il. Le dimanche, avant l’émission de Christine Ockrent à laquelle Millon était invité, Giscard ne voulait pas en entendre parler, il trouvait cela ridicule. Il l’a empêché de se déclarer, et puis, deux jours plus tard, comme il n’y avait rien d’autre à faire, Giscard a fini par lui dire : “Allez-y !” »
    Et François Léotard, quel jeu a-t-il joué entre Chirac, dont il a paru proche jusqu’à la mi-93, et Balladur ? Réponse vacharde de Charette : « L’idée de François Léotard était avant tout d’éliminer Giscard et de l’empêcher de se présenter. Tant que Chirac paraissait le mieux placé pour être candidat et pour être élu, les dirigeants du PR étaient proches de lui. Quand il est apparu qu’Édouard Balladur était peut-être un meilleur cheval, tout a changé : inutile d’aller chercher ailleurs ! »
    Hervé de Charette ajoute – ce qui n’est pas indifférent dans l’évolution de la campagne présidentielle – qu’il n’avait pas attendu Millon, lui, pour aller rendre visite à Chirac avant sa déclaration decandidature : il est allé le voir au moment où tous les observateurs le décrivaient comme absolument isolé et il lui a dit : « Primo, les clubs Perspectives et Réalités seront jusqu’au bout aux côtés de Valéry Giscard d’Estaing. S’il est candidat, nous le soutiendrons, évidemment. Secundo : s’il n’est pas candidat, je te soutiendrai. »
    Chirac a été tout aussi direct : « Il faut qu’il y ait un candidat UDF, lui a-t-il dit. N’importe qui : un cheval fera l’affaire ! »
     
    Dîner, le soir, avec Étienne Garnier qui a vu Marc Blondel, la veille, à l’occasion d’un pot de départ à la retraite de – je crois – un secrétaire syndical de Saint-Nazaire. Blondel l’a pris à part avant le dîner : « Chez nous, lui aurait-il dit, on vote Chirac. La gauche au pouvoir, pour nous, cela a surtout marqué la suspension des négociations collectives en 1982. Alors on ne veut pas de Jospin, on votera Chirac. Ce n’est pas comme Nicole Notat qui, depuis le début, joue Balladur. Que dis-je : elle préfère ! Elle a fait Balladur ! »
    7 avril
    Jean-Louis Debré, qui a lui aussi pris des notes sur toute cette période, se rappelle devant moi qu’en octobre-novembre 1993, après un déjeuner avec Balladur dans un restaurant parisien, Le Divellec, Chirac s’est certes finalement convaincu que Balladur allait jouer sa partie, poussé par son entourage et surtout par Nicolas Sarkozy. Il était cependant convaincu qu’il n’irait pas jusqu’au bout.
    Pourquoi Giscard a-t-il renoncé à la bataille ? Selon lui, pour trois raisons qui se sont imposées à lui. La première est sa marginalisation dans les sondages. La deuxième est que Balladur allait lui « piquer son parti ». La troisième est que Chirac a mieux résisté que prévu. « Alors, il a bien essayé de reconquérir son électorat et son parti. Quand il a vu que c’était impossible, il a souhaité l’échec de Balladur. Il a souhaité que Barre soit candidat et l’a très fortement incité à y aller, car cela faisait apparaître Balladur comme un diviseur. Et puis Barre a dit non. Ne restait qu’à se rallier à Chirac. »
    Pour la première fois, nous parlons du rôle joué dans tout cela par Nicolas Sarkozy.
    « Dès le mois de mai 1993, Nicolas Sarkozy, aidé par d’autres – Brice Hortefeux, surtout –, a essayé de prendre le pouvoir au sein du RPR en marginalisant Chirac. Ils ont procédé très habilement,par exemple en pompant le personnel important de la rue de Lille, en leur proposant des places dans les cabinets ministériels. Ou encore en cherchant à établir des contacts directs avec les secrétaires fédéraux. Ou en cajolant toutes celles et tous

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