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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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du chef de l’État a été prise pendant le week-end de Pâques, autour du 30 mars. Des réunions ont eu lieu à l’Élysée tous les dimanches depuis cette date pour mettre au point la stratégie. Les dirigeants du RPR auraient été prévenus depuis trois semaines. Les investitures seront officiellement distribuées aux candidats de la majorité dès mardi matin. Chirac annoncera sa décision demain. Alain Juppé prendra la parole mardi après-midi, donc dans deux jours. Les thèmes de campagne de la majorité s’organiseront autour de ces deux idées : il faut poursuivre le changement et se donner les moyens de gouverner.
     
    La journée finit par le passage de Lionel Jospin à « 7 sur 7 ». Il voit dans l’agitation politique autour de la dissolution – dont il considère qu’elle est d’ores et déjà acquise – « une campagne savamment orchestrée et montée » pour masquer l’échec du gouvernement. Derrière la raison avancée, l’Europe, il analyse les raisons non dites de la décision de l’Élysée : un nouveau tour de vis annoncé, donc la promesse d’une austérité accrue ; la peur de l’échec d’un pouvoir de surcroît « rattrapé par les affaires ».
    Deux annonces importantes si la campagne électorale s’ouvre dans les jours qui viennent. La première touche à l’Europe : « Si, pour respecter les 3 % de Maastricht – que l’Allemagne, note Jospin, ne respectera pas –, le gouvernement veut imposer une nouvelle cure d’austérité au pays, ma réponse est non. Je suis favorable à l’Europe, mais pas à n’importe quelle Europe. » Deuxième annonce : l’ouverture de discussions avec l’ensemble de la gauche, radicaux et Verts inclus, pour l’élaboration d’un pacte de croissance commun.
    Si campagne il y a, on comprend que les socialistes vont se mobiliser autour des quelques idées simples qu’énonce Jospin aujourd’hui : comment dénoncer la crise en gardant la même majorité ? les Français doivent-ils se retrouver, pour cinq ans, avec Alain Juppé ? qui est le mieux placé pour soigner la fameuse « fracture sociale » : Chirac, qui ne l’a pas fait, ou une nouvelle majorité de gauche ?
    Arguments simples, peut-être insuffisants, mais peut-être efficaces.
    21 avril
    Toute la journée j’ai recueilli témoignages et confidences de ceux qui sont hostiles ou favorables à la dissolution. J’ai vu des tas de gens dans l’attente de l’intervention de Chirac. Depuis un mois, me raconte dans la matinée J.-P. Frémont à l’UDF, Alain Juppé a eu pour mission de sonder les visiteurs sur l’éventualité d’une dissolution. Le déjeuner auquel j’ai été conviée l’autre jour s’inscrivait dans cette perspective. Si Juppé consultait, comme Dominique de Villepin auprès d’autres interlocuteurs, c’est évidemment que Jacques Chirac avait au préalable donné son feu vert.
    L’UDF, m’assure Frémont, n’a jamais été associée à cette stratégie. Ce qui montre, me dit-il au passage, que, dans cette affaire comme en beaucoup d’autres, elle est un « partenaire a minima » du RPR. Ce qui a beaucoup compté dans cette prise de décision, c’est la préparation du budget 1998. Le projet de loi de finances, tel qu’il est aujourd’hui, ne peut en aucun cas être le budget d’une année d’élections, car une très forte contrainte extérieure interfère dans les choix nationaux. « Le budget 1998, m’assure mon interlocuteur, est catastrophique de par sa rigueur. Il fallait impérativement, pour l’exécutif, que les élections aient lieu avant le débat budgétaire de l’automne.
    « Prenons garde, conclut-il en bon centriste qu’il est, que le libéralisme échevelé n’abolisse la fracture sociale ! »
     
    Hervé de Charette pense lui aussi que la décision de dissoudre a été prise par Jacques Chirac depuis longtemps. Alain Juppé a bien été autorisé, comme Frémont me l’a dit, et d’autres avec lui, à consulter, à interroger les ministres et quelques autres personnalités. La stratégie a été celle du ballon d’essai : les fuites, les indiscrétions plus ou moins organisées depuis le début du mois, au moins, ont permis aux Français de s’habituer à l’idée. Les gens ont été étonnés, perplexes, mais pas hostiles à l’idée de nouvelles élections, c’est du moins ce qu’ont traduit les enquêtes d’opinion.
    « Ils sont d’accord pour aller voter, nuance Charette,

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