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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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consigne donnée aux communistes par André Lajoinie avait été claire : pas question de voter pour un patron ! Résultat : quelques voix les ont séparés. Pas beaucoup, certes, mais assez pour que Tapie essuie sa première défaite.
    Il n’a pas voulu en rester là. Mais trop tard. Suite à demain...

    27 janvier
    Vu Juppé, ce matin. Il est assez content, et ne s’en défend pas, d’avoir haussé le ton sur les « affaires ». Sans lui, sans le RPR, les délits d’initiés, l’enquête de la COB menée à la demande de son homologue américaine, auraient été passés sous silence par la presseà laquelle, me dit-il en y mettant une pointe de reproche, il faut toujours parler un peu fort pour se faire entendre.
    Dire qu’il est sympathique serait trop dire. Je l’irrite en lui posant des questions, en retour, sur les « profiteurs » des « noyaux durs » de Balladur. Avec presque de la commisération, il m’explique que les « noyaux durs » étaient inscrits dans la loi, et qu’il ne s’agissait pas de délit d’initiés. D’ailleurs, m’explique-t-il, un débat sur les privatisations a eu lieu, et personne, dans les milieux de la presse et de la politique, n’a trouvé ni dans la constitution ni dans la gestion de ces « noyaux » balladuriens matière à parler de manipulations frauduleuses.
    Lui, Juppé, n’est pas comme Léotard qui a dit l’autre jour qu’il y avait « des brebis galeuses dans tous les camps ». Il est bien décidé à montrer qu’il n’y en a que dans le camp de la gauche. Il ne souffle pas mot de Mitterrand, mais cite plusieurs fois Bérégovoy tout en prenant acte qu’il a affirmé sa volonté de faire appel à la justice.
    Et le congrès extraordinaire du RPR, quel est son but ? Presque caricatural, tellement il est fermé, presque hautain, il répond qu’il s’agira de montrer la « dimension sociale et humaine » du projet chiraquien.
    Conversation difficile au cours de laquelle il est resté de bout en bout sur ses gardes, voire légèrement agressif à mon endroit. Je ne lui en veux pas : c’est dans sa nature, semble-t-il, d’avoir des problèmes de communication.
     
    Je reprends l’itinéraire de Tapie, parce que je trouve que la montée dans le firmament politique de cet ancien chanteur, ex-racheteur et président de sociétés exsangues, est exemplaire (au sens qu’elle a valeur d’exemple et reflète bien l’état d’une société).
    Donc, après la défaite et l’élection ric-rac de son adversaire, recours devant le Conseil constitutionnel, nouvelles élections et nouveau second tour, dimanche prochain.
    Ce matin, je le trouve beaucoup plus sympathique qu’il y a quelques années. D’ailleurs, signe qui ne trompe pas, il a fait sa rentrée au « Bébête show » : sa gouaille y fait merveille. Il s’exprime à sa manière, sans langue de bois. Il est malin et sait fort bien qu’il a été battu la dernière fois parce que les voix communistes ne se sont pas reportées sur lui. Aujourd’hui, il ne cesse donc de mettre en avant tout ce qui le rapproche d’eux : il est contre l’apartheid, me dit-il, est favorable au revenu minimum d’insertion, et pour l’impôt sur la fortune. Cela n’a pas empêché Georges Marchais, hier, de dire qu’à Marseille il n’y avait que des candidats de droite. Gaudin, Tapie, blanc bonnet, bonnet blanc !
    D’un autre côté, pour ne pas faire peur aux socialistes marseillais, prêts à lui faire la guerre, il affirme haut et fort qu’il ne veut en aucun cas être maire de la cité phocéenne. Il n’est à Marseille que depuis trois ans, mais il a déjà compris que ce qui fait courir les socialistes, de Vigouroux à Pezet, de Sanmarco à Marius Masse, c’est la succession de Gaston Defferre à la mairie, sur le Vieux Port. Tapie éloigne donc de sa bouche avide le calice de la mairie.
    Cet homme a de la présence, je n’ose dire du charisme parce que tout le monde se ficherait de moi ; disons qu’il a du culot et, derrière une certaine vulgarité, une finesse politique qui saute aux yeux.
    Sa « semi-vulgarité » s’est manifestée tout au long de cette campagne de l’élection partielle. Tapie a traité son rival, Guy Teissier, de « marionnette de Gaudin », de « rien du tout » ; c’est quelqu’un, a-t-il dit textuellement, « qui a pris la tronche parce que le fait de me rencontrer lui a donné une importance qui disparaîtra la semaine suivant son

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