Ce jour-là
pu m’assoupir sans.
Pendant les deux jours suivants, j’ai évité les appels de ma famille et de mes amis. Mon téléphone n’arrêtait pas de sonner. Ma famille voulait savoir si j’avais fait partie de l’opération. Mes parents savaient que j’étais parti, mais pas où.
Avant de prendre l’avion pour l’Afghanistan, je les avais appelés pour leur dire que je partais m’entraîner et ne pourrais pas être joint par téléphone. J’avais essayé de rester vague. J’avais envoyé à mes sœurs un texto qui ne disait pas grand-chose, sinon que je les aimais toutes les deux. Cela ne les avait pas alertées sur le coup, mais une fois l’information sortie, elles avaient commencé à se dire que j’avais été impliqué.
Le lendemain de mon retour, alors que je sortais la poubelle sur le trottoir, ma voisine d’en face a traversé la rue pour me serrer vigoureusement dans ses bras. Elle savait que j’étais un SEAL et avait bien vu que j’avais disparu pendant quelques jours.
« On ne connaît jamais vraiment nos voisins, pas vrai ? » dit-elle avec un sourire avant de retourner chez elle.
Il en fut de même avec mes camarades du commando. On ne nous laissait pas respirer. L’un d’eux avait à peine franchi le seuil de sa maison qu’il a dû changer les couches de son bébé.
« Figure-toi que je n’étais pas là depuis dix minutes qu’elle me colle mon gosse dans les bras, me dit-il quand nous nous sommes revus un peu plus tard. On venait de descendre OBL. Tu crois qu’elle m’a laissé le temps de m’asseoir et de boire une bière ? Même pas. »
Un autre avait passé la matinée, le lendemain de son retour, à tondre son gazon trop haut. On nous traitait peut-être comme des héros dans les médias, mais, à la maison, nous n’étions que des maris qui s’étaient absentés.
Quand nous sommes retournés travailler officiellement, deux jours plus tard, Jay nous rassembla dans la même salle de conférence où nous avions entendu parler de la mission pour la première fois. Le commandement était inquiet à cause des nombreuses fuites.
« Il est impératif de vous tenir en retrait des médias, nous dit Jay. Il faut que tous, nous gardions profil bas. »
J’étais un peu étonné. Nous étions restés bouche cousue pendant des semaines et maintenant que Washington révélait tout, c’était nous qui avions droit à une réprimande. On avait l’impression que ce n’était qu’une question de temps avant que nos noms ne sortent dans un bulletin d’info. Nous venions de tuer le plus grand terroriste du monde. La dernière chose que nous voulions, c’était que notre nom soit rattaché à l’opération. Nous n’avions qu’un souhait : retourner dans l’ombre et nous remettre au travail.
« Cette question réglée, nous dit Jay, voici votre programme. Vous allez prendre une semaine de congé.
— Mais pas une vraie semaine de congé, si ? » lança Walt.
Il y eut quelques rires dans le groupe.
J’ai posé une question : « Quand est-ce que le cirque va commencer ?
— La CIA va rappliquer dans quelques jours, répondit Jay. Et le secrétaire à la Défense a prévu de venir bientôt lui aussi. Nous vous donnerons davantage de précisions dès que nous en aurons. Profitez bien de votre temps libre. »
Ce fut à mon tour de rire, cette fois.
« Ils veulent tous en être, toucher la magie du doigt », dit Tom, tandis que nous quittions la salle de conférence.
L’opération n’avait pourtant pas été particulièrement compliquée ni difficile.
Quelques mois plus tard, de nouveaux détails sur l’opération furent divulgués, centrés sur l’unité qui l’avait menée à bien. On s’inquiétait beaucoup pour notre sécurité. La plupart d’entre nous avaient d’ailleurs investi dans des systèmes de sécurité à leur domicile.
Certains manifestèrent leur inquiétude devant Jay et Mike, au cours de réunions hebdomadaires.
« Et si jamais nos noms apparaissent dans les médias ? » dis-je.
La chaîne ABC avait diffusé un sujet grotesque sur l’art de reconnaître un SEAL. D’après le journaliste Chris Cuomo, le SEAL qui avait abattu Ben Laden était un homme blanc, en grande forme physique, d’une trentaine d’années, portant barbe et cheveux longs. Puis Cuomo a fait comme les autres journalistes : il a trouvé un SEAL, n’importe lequel, pour qu’il lui parle de nous, et c’était tombé sur Richard Marcinko, le
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