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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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longtemps ; les Allemands, qui y croyaient dur comme fer, commencent maintenant à s'interroger.
    « Il est donc normal que nous reprenions nos billes, non pas pour les sortir de l'Alliance atlantique, mais pour les employer dans l'Alliance atlantique en fonction de ce que nous croyons utile.
    « Réussir l'Europe, notamment pour sa politique et sa défense, est plus nécessaire que jamais. La France l'a proposé. Des distraits, ou des mal informés, ont empêché jusqu'à maintenant que ça se réalise 1 . En tout cas, la solidarité particulière que la géographie impose à la France et à l'Allemagne est évidente.
    « Les Allemands s'y sont mal prêtés jusqu'à maintenant, parce qu'ils poursuivaient une chimère, celle de la protection américaine. Mais il est possible qu'ils resserrent avec nous leurs liens militaires pratiques. Pour notre part, nous y sommes très disposés. »

    « Les Américains ne vont pas risquer leur survie »
    À l'issue du Conseil du 9 mai 1962, le Général me donne deux traductions de ce qu'il vient de dire à ses ministres dans un langage très mesuré — si mesuré qu'il avait sûrement, à l'avance, rédigé sa déclaration.
    Traduction en mineur :
    « Dites à vos journalistes que le ministre des Affaires étrangères et le ministre des Armées ont fait part au Conseil des ministres des impressions qu'ils ont retirées du Conseil de l'OTAN auquel ils ont participé à Athènes. Le général de Gaulle a tiré les conclusions de ce compte rendu, en observant que la situation du monde avait évolué et que, par conséquent, la stratégie de l'Alliance atlantique devait évoluer aussi. Voilà. Ça suffit largement. N'en dites pas plus pour le moment.»
    Traduction en majeur :
    « Voyez-vous, en réalité — mais ça, naturellement, ça n'est pas pour les journalistes —, les Américains s'obstinent à maintenir leur système d'intégration dans l'Alliance atlantique ; c'est-à-dire le système qui, sous une apparence de participation collective, laissait aux seuls Américains la responsabilité de la défense de l'Europe. Il se justifiait en 1949, quand ils jouissaient du monopole de la bombe. Il ne se justifie plus du tout. Depuis que la Russie comme l'Amérique sont capables de s'anéantir, les deux forces de dissuasion s'équilibrent et s'annulent.
    « Vous pensez bien que les Américains ne vont pas risquer leur survie pour défendre l'Europe. Ils ne l'ont jamais fait, ils ne le feront jamais. Ils n'en ont pas la moindre envie. C'est clair comme la lumière du jour. Dans toute leur histoire, ils n'ont jamais mis en jeu leur existence nationale pour un engagement à l'extérieur. Ils se sont battus à mort pour leur indépendance, puis pour la guerre civile. À l'extérieur, ils n'ont jamais envoyé que des corps expéditionnaires, qui ne représentaient qu'une petite partie de leurs moyens, même s'ils ont lutté courageusement.
    « Pourquoi voudriez-vous qu'ils acceptent d'être rayés de la carte, sous prétexte qu'un pays européen menacé par la Russie les appellerait au secours ? Jamais ils n'emploieront leurs bombes dans un cas pareil ! Ce n'est pas la peine qu'ils nous racontent des histoires. Ce n'est pas la peine que nous nous en racontions à nous-mêmes !
    « Que la France et l'Allemagne, auxquelles la géographie impose la solidarité, déploient toutes leurs forces si l'une des deux est attaquée, c'est conforme à la nature des choses. C'est pourquoi il nous faut pousser davantage l'alliance avec les Allemands. Mais les États-Unis se défileront toujours.

    « La force de dissuasion doit être tous azimuts »
    « Donc, il nous faut notre propre force de dissuasion nationale. Si nous ne pouvions compter que sur la force de frappe américaine, nous n'aurions plus de vraie garantie.
    AP. — Croyez-vous que notre petite force nucléaire suffira pour dissuader les Soviétiques, s'ils sont sûrs que l'Amérique ne bougera pas au cas où ils nous attaqueraient ?
    GdG. — Si nous pouvons tuer le quart ou la moitié des Russes, nous sommes sûrs qu'ils ne nous attaqueront pas. Et puis, ne dites pas : l'adversaire, c'est Moscou. C'est une erreur de désigner un adversaire exclusif. L'adversaire, ça peut être un agresseur — et, pour le moment, en effet, on ne voit guère que celui-là. Mais ça peut être aussi un autre agresseur, inimaginable aujourd'hui, ou un autre pays qu'un agresseur.
    AP. — Je ne comprends pas. Pourquoi dissuader un pays qui ne penserait pas

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