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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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dramatiser, d'une difficulté sérieuse. Il n'est pas exclu que, si nous demandons aux Allemands de se solidariser totalement avec nous pour la rupture avec la Grande-Bretagne, le Bundestag refuse de ratifier le traité de coopération franco-allemand 1 . »
    Couve pense qu'il y a deux façons d'en sortir : ou bien on va à la crise brutale ; ou bien on va à un arrêt plus diffus de la négociation en chargeant la commission Hallstein de faire un rapport, ce qui permettrait de gagner du temps. Il est évidemment favorable à cette seconde solution, alors que le Général est favorable à la première.
    Pompidou intervient : « Nous sommes tenus à quelques ménagements vis-à-vis d'Adenauer. D'abord, pour montrer que nous tenons au succès de la politique de coopération. Et ensuite, pour renforcer Adenauer dans son propre pays et devant son Parlement.
    « Nous allons, bien sûr, vers une rupture inévitable. Le problème est de savoir si elle se fera d'une manière suffisammentouatée pour que les Allemands puissent l'accepter et que le Marché commun continue. »
    Le Général se contente de conclure : « Les Anglo-Saxons et tous leurs copains de la presse et de la politique prétendues françaises font un orchestre incroyable, inimaginable ! »

    « Churchill, épuisé, s'est effacé derrière les Américains »
    Après le Conseil, je fais remarquer au Général que les Anglais n'ont pas toujours été « les pauvres Anglais ». S'ils le sont maintenant, n' est-ce parce qu'ils n'ont pas un Churchill ?
    Le Général reprend posément une leçon qu'il m'a déjà faite : « Oh ! ne vous y trompez pas ! Churchill a été magnifique jusqu'en 42. Ensuite, comme s'il était épuisé par un trop gros effort, il a passé le flambeau aux Américains et s'est effacé derrière eux. »
    Là-dessus, le Général me raconte un souvenir que ma réplique a dû faire renaître en son esprit.
    « Je me disputais avec Churchill pour la reconnaissance de l'autorité du Gouvernement provisoire sur les territoires de France qui seraient libérés après le débarquement.
    « Les Américains voulaient donner l'autorité à Eisenhower et à l' AMGOT 2 . Ils avaient établi des proclamations, de faux billets de banque, etc., que les troupes américaines s'apprêtaient à distribuer. Naturellement, les Anglais emboîtaient le pas aux Américains.
    « À la veille du débarquement, Churchill m'invite à déjeuner dans un train, sur la côte anglaise, près de Portsmouth. Un train ! Comme s'il y avait déjà un tunnel sous la Manche et qu'il s'apprêtait à entrer en France dans son train 3 ! J'étais là avec Palewski (là, le Général se trompe : d'après ses propres Mémoires, c'était Viénot). Il me reçoit à déjeuner dans son wagon. Et en plein milieu du déjeuner, en présence de quelques ministres anglais, il me fait une scène épouvantable et me crie de toute la force de ses poumons : "Dites-vous bien, de Gaulle, que, chaque fois que j'aurai à choisir entre l'Europe et le grand large, je choisirai toujours le grand large ! Quand j'aurai à choisir entre vous, de Gaulle, et Roosevelt, je choisirai toujours Roosevelt ! Si nous libérons maintenant l'Europe, c'est parce que les Américains sont avec nous pour le faire ! Nous ne pouvons pas prendreune position différente de celle des États-Unis ! Et si nous n'avions pour nous aider que les FFL, nous devrions vite rembarquer. Comme à Dunkerque il y a quatre ans! "
    « Voilà quelle était la conviction de Churchill. Eden hochait la tête. Bevin est venu à moi après le déjeuner et m'a dit à haute et intelligible voix : "Le Premier ministre a parlé en son propre nom, nullement au nom du Cabinet britannique." Pourtant, ça a été, en gros, la politique des Anglais depuis 1942, que le gouvernement soit travailliste ou tory.
    « Sauf une parenthèse bien vite refermée : Eden, après le coup de Nasser sur Suez. Mais il a mis les pouces 4 ; le dollar a fait pression sur la livre, et la City sur Eden, qui n'avait pas les nerfs assez solides. »
    Pour le Général, la qualité des nerfs passe avant tout. Un homme aux nerfs d'acier tient le coup. Un homme aux nerfs moins aguerris ne lance des défis au-dessus de ses forces que dans une colère sans suite. Un homme qui n'a pas de nerfs du tout s'effondre.

    « Il faut d'abord bâtir les fondations à chaux et à sable »
    Finalement, les négociations ont bien été ajournées, comme la France le souhaitait.
    Après le Conseil du 30

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