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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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pidou qui l'a voulu ! Je n'avais pas besoin, vous pensez bien, pour prendre mes décisions en toute indépendance, qu'il y ait deux partis dans la majorité ! »
    Pour la troisième fois, il a prononcé Pomme pidou, avec une pointe d'irritation ; chaque fois, c'est qu'il reproche à son Premier ministre d'être trop souple — comme lorsqu'il m'a dit à propos de Monnerville : « C'est Pomme pidou qui a eu peur de bousculer le pot de fleurs. » Mais il s'est incliné, cette fois encore.
    Il me semble de plus en plus évident que le Premier ministre, qui a parfaitement réussi ses dix premiers mois à Matignon, a oublié ses réticences d'avril dernier à accepter le poste de Premier ministre, ainsi que sa volonté de ne rester que peu de temps à Matignon. Il m'a dit un jour : « Le pouvoir change les hommes. Avant de l'avoir exercé, ils n'imaginaient pas ce qu'ils deviendraient après. » Songeait-il à lui? Ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui il sent que l'avenir l'appelle.
    Le souci de ne pas laisser des divergences s'installer au sein de la majorité ne quittera jamais l'esprit du Général.

    À l'issue du Conseil du 6 mai 1963, il me déclare : « La seule façon de faire marcher les parlementaires, c'est de leur dire : "Messieurs, il faut parler un seul langage ! Unité ! " Et la seule façon de maintenir leur unité, c'est de les dresser contre l'opposition : "Tous en bloc, messieurs ! Plantez des banderilles sur les autres ! Parlez des programmes des autres pour les déchirer à belles dents ! " C'est à ça que sert l'opposition : à assurer la cohésionde la majorité ! Quand les partis de la majorité se regardent entre eux, ils se disputent. Quand ils regardent vers l'opposition, ils se rassemblent pour la combattre. »

    « Le gouvernement a plus d'un tour dans son sac »
    Salon doré, 12 mars 1963.
    AP : « Vous craignez que les hommes politiques ne retournent au jeu des partis. Mais vous avez mis des armes dans la Constitution pour contrarier cette tentation.
    GdG. — Bien sûr. Nous avons les moyens de maîtriser les folies parlementaires. Il y a des armes lourdes et des armes légères. Les armes lourdes, c'est la dissolution, le référendum, la démission du Président suivie de sa réélection ; et l'article 16, si le malheur voulait que les conditions en fussent réunies. Avec ça, un Président qui est à la hauteur de sa tâche doit pouvoir se tirer d'affaire. Mais il y a aussi les armes légères : le vote bloqué, l'engagement de la responsabilité du gouvernement, le dernier mot à l'Assemblée qui permet de ne rien céder au Sénat, ou la commission mixte paritaire si on voulait lui faire quelques politesses pour abréger la navette. Le gouvernement a plus d'un tour dans son sac. Ces tours, qu'il n'ait pas peur de les jouer ! »

    « Le Conseil des ministres n'existe pas en dehors de moi »
    Salon doré, 14 avril 1963.
    Il faut commencer par définir le sens des mots, comme le préconisait Confucius, pour éviter les guerres. Le Général m'interpelle : « À la suite de chaque Conseil des ministres, vos journalistes écrivent toujours : "Le gouvernement a décidé que..." (J'apprécie qu'il ait la délicatesse de ne pas me dire : "Vous dites à vos journalistes." Mais il sait évidemment que c'est moi le coupable.) Tout se passe comme si les décisions étaient prises par les seuls ministres, au nombre desquels je ne figure pas. Or, l'esprit et la lettre de la Constitution veulent que le Président de la République non seulement soit associé, mais prenne une part prépondérante à ces décisions. L'expression à employer est donc : "Il a été décidé en Conseil des ministres de..."
    AP. — Je prends note. »
    « Le lieu où tout se décide, m'avait-il dit voici un an, le 18 avril 1962, c'est le Conseil des ministres, qui n'existe pas en dehors de moi. »
    Que le Conseil des ministres n'existe pas en dehors de lui, chacun autour de la table du Conseil, et probablement en France, en est maintenant bien persuadé. Michel Debré, Premier ministre,réunissait à Matignon des Conseils de cabinet auxquels étaient présents tous les ministres, pour préparer et soulager le Conseil des ministres à l'Élysée. Le Général a demandé d'emblée à Georges Pompidou, quand il l'a nommé à Matignon, de renoncer à cette pratique. Pourtant, qui aurait songé à accuser Debré, féal entre les féaux, de vouloir, comme le faisait le Général quand il était le dernier Président du Conseil

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