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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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main d'un seul parti, qui ferait des pressions formidables sur le gouvernement.
    AP. — Diviser pour régner ?
    Pompidou. — Il y a de ça. Il ne faut pas se laisser écraser par l'appareil d'un parti unique. C'est si facile de faire voter des congrès, d'entraîner des comités, de manipuler des militants et de se faire donner des pouvoirs pour faire voter les absents... Je n'ai jamais adhéré au RPF, mais j'ai vu comment ça se passe. »

    Pompidou : « Fichez-moi la paix avec Giscard »
    Le 1 er janvier 1963, de bon matin, à la sortie de la cérémonie où le gouvernement a présenté ses vœux au Général, les seuls ministres gaullistes — à l'exclusion des Républicains indépendants et des « apolitiques » comme Couve, Messmer ou Joxe — se rendent à pied, en jaquette, de l'Élysée au ministère de l'Intérieur, place Beauvau. Les rares passants se retournent, éberlués, pour regarder passer notre cortège ; ils doivent se demander si le carnaval a été avancé au Nouvel An.
    Roger Frey nous attend avec chocolat et croissants. Giscard d'Estaing et la création toute récente de son parti font à eux seuls les frais de la conversation. Roger Frey commente la publication de la lettre d'Isorni 1 .
    Grandval : « Nous avons là une bonne occasion de nous débarrasser de Giscard. »
    Aussitôt, c'est la curée :
    « La création des Républicains indépendants, dit l'un, c'est une opération pour servir les intérêts de Giscard et sa future candidature à l'Elysée.
    — Ça se retournera contre lui ! reprend l'autre. Il est trop malin ! Il finira par tomber dans les pièges où il veut nous faire tomber !
    — Il avait la chance d'être un des plus brillants parmi les gaullistes. Il préfère ne pas être compté parmi les gaullistes et être seul à la tête de son petit groupe. C'est une façon de miner le gouvernement de l'intérieur.
    — Pourquoi ne se contente-t-il pas d'être chef d'une composante de notre mouvement ?
    — Avec cette lettre d'Isorni, nous pouvons l'enfoncer jusqu'à la racine des cheveux. »
    Pompidou et moi sommes à peu près les seuls à garder le silence. Mes fonctions de porte-parole de l'ensemble du gouvernement me paraissent imposer la neutralité, dans une bagarre qui dresse certains de ses membres contre un autre. Mais Pompidou, pourquoi se réserve-t-il ? Il laisse parler les uns et les autres. Puis, brusquement, il met fin à ce déballage en explosant. Il couvre énergiquement son ministre des Finances :
    « Vous êtes prêts à prendre pour argent comptant ce que raconte Isorni, qui nous hait et dont vous devriez quand même vous méfier ! Et vous accablez votre collègue, sans l'avoir entendu ! Ne vous y trompez pas ! Giscard rassure le capitalisme et le capital. Il est intelligent et capable. Il est d'une technicité insurpassable. Il représente, au sein du gouvernement, la droite, la bourgeoisie. Alors, fichez-moi la paix avec lui ! Nous avons besoin de lui ! Vous feriez mieux de tourner votre agressivité contre des adversaires, plutôt que contre un allié qui a eu l'habileté de se rendre indispensable. C'est moi qui ai poussé Giscard à créer le groupe des Républicains indépendants. Vous savez bien qu'il n'est pas gaulliste, mais seulement allié à de Gaulle. Il n'est pas sain que le Président de la République et le gouvernement ne puissent s'appuyer que sur un groupe. Il vaut mieux que la majorité donne l'impression d'être une coalition. »
    Le chef a parlé. Il a défendu l'absent. Tout le monde se tait.

    Le lendemain, 2 janvier 1963, Pompidou me confirme :
    « Le Général voulait absolument que l'UNR absorbe les giscardiens, comme elle a absorbé les gaullistes de gauche. Les Républicains indépendants auraient été l'aile de droite, symétriquementà l'UDT 2 , l'aile de gauche. Mais il ne faut pas qu'on puisse accuser la majorité d'être monolithique. Cela ne correspondrait pas à ce que souhaitent les Français. Je suis sûr d'avoir raison. Vous savez, j'ai eu du mal à le faire admettre au Général. »

    « C'est Pommepidou qui l'a voulu »
    Salon doré, 5 janvier 1963.
    J'interroge le Général, sans me référer aux propos de son Premier ministre.
    « Vous nous avez exprimé le vœu, le 1 er janvier, de nous voir contribuer à "l'unité de la majorité". L'existence d'un parti giscardien ne risque-t-elle pas d'y porter atteinte ? »
    Il me répond vivement : « Ce n'est pas moi qui ai souhaité que Giscard fasse un parti ! C'est Pomme

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