Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
Vom Netzwerk:
plus forte qu'on trouve dans le traité de Paris de 1952 sur la Communauté charbon-acier ? Il me semble qu'il n'est pas nécessaire de dénoncer ces traités, ce qui ferait un énorme esclandre. Il suffit d'imposer, tant que nous ne sommes pas encore dans la supranationalité, une interprétation jurisprudentielle qui exclue la supranationalité pour plus tard.
    GdG. — Comment voulez-vous vous y prendre ?
    AP. — Pour Euratom, ce n'est pas difficile. Comme noussommes le seul des six pays à posséder un puissant organisme consacré aux recherches atomiques, il suffit de ne nous prêter à la construction d'aucun autre équipement, ni à aucune mise à disposition de nos chercheurs et ingénieurs. Il n'y a qu'à invoquer les besoins du service. Il n'existera pas d'installations atomiques communautaires, si ce n'est pas nous qui les réalisons.
    GdG. — Naturellement ! C'est un machin où nous donnons tout et ne recevons rien. C'est incroyable que des gouvernants français aient pu signer ça, que des majorités parlementaires aient pu l'approuver.
    AP. — Pourquoi tuer spectaculairement Euratom, alors qu'il suffit de le laisser dépérir en ne le nourrissant pas ?
    GdG (sceptique). — Vous croyez ? Si on le dénonçait une bonne fois, on n'en entendrait plus parler.
    AP. — On en entendra parler beaucoup moins encore, mon général, si on l'assèche tout doucement. Quant au Marché commun, il fonctionne, jusqu'au bout de la deuxième des trois étapes de quatre ans chacune, c'est-à-dire en principe jusqu'au 1 er janvier 1967, selon la règle de l'unanimité. D'ici à la fin de la deuxième étape, nous pouvons opposer notre veto à toute décision. Mais, surtout, nous pouvons, au dernier moment, opposer notre veto à la décision de passer à la troisième étape, à partir de laquelle les décisions seraient prises à la majorité. On resterait définitivement dans la deuxième étape. Ou, de préférence, nous pouvons poser comme condition, avant d'accepter de sauter le pas, que soit préservé notre veto pour les questions que nous considérerions comme essentielles.

    « La France ne se confond pas ! »
    GdG. — Il faut nous garder du risque d'être débordés. Harmoniser les intérêts pratiques des Six, organiser leur solidarité économique vis-à-vis des tiers, c'est bien. Mais il n'est pas question de passer, selon la même méthode, du domaine économique à je ne sais quelle "intégration" de la politique, de la diplomatie, de la défense. Ce sont des billevesées. Nous n'allons pas nous laisser déposséder de nos pouvoirs. Nous n'allons pas nous laisser inféoder ! La France ne se confond pas !
    « Les Monnet et autres Pleven considèrent que la France n'est qu'un petit pays ; qu'elle ne fait pas le poids pour jouer un rôle mondial ; qu'elle n'a donc qu'à se soumettre aux autres. Fabre-Luce vient même d'écrire 4 que, les Français ayant fait depuisdeux siècles la preuve qu'ils n'étaient pas capables de se gouverner, l'intégration supranationale allait permettre aux Allemands de nous apprendre l'organisation et la discipline. Tout ça est monstrueux ! Monstrueux !
    « Je n'exclus pas, pour plus tard, une confédération, qui serait le couronnement d'un patient effort pour dégager une politique commune, une diplomatie commune, une sécurité commune, au bout d'une longue période où les six États auraient pris l'habitude de vivre ensemble. Je vais faire des propositions dans ce sens à Adenauer. Mais ça ne pourra se faire que par la concertation des gouvernements légitimes. Et non par des technocrates apatrides. »
    Au moment de me raccompagner à la porte, le Général me demande négligemment : « Vous pouvez me faire une note sur les moyens pratiques d'étouffer la supranationalité ? Et, tant que vous tiendrez la plume, vous pourriez faire des articles pour vulgariser un peu ces idées de concertation des États, de construction confédérale, de référendum européen. Les bulletins mensuels de votre Comité paneuropéen sont bien, mais on n'en voit que de courts extraits dans les journaux. Il faudrait alimenter la grande presse. »
    Et on dit que le Général méprise la presse...

    Pompidou : « Vous écrivez trop »
    Paris , 15 octobre 1960 .
    La simultanéité des deux commandes du Général a provoqué un affreux pataquès. J'ai passé les semaines suivantes à rédiger une note confidentielle, vigoureuse et sans fard, pour le seul Général, et une série d'articles,

Weitere Kostenlose Bücher