C'était De Gaulle - Tome I
15 mai, la première à laquelle j'étais admis à assister, n'allait nullement consacrer la pertinence de cette nouvelle méthode...
1 Premier parmi ses pairs.
2 Il se contredira légèrement au Conseil des ministres du 7 décembre 1962, en déclarant : « En avril dernier, il y avait eu changement de gouvernement, et il était normal qu'il demande la confiance. Cette fois, le gouvernement est le même, et il n'a pas de confiance à demander. »
Chapitre 6
« LA SEULE VICTOIRE, C'EST DE S'EN ALLER »
Conseil des ministres, 25 avril 1962.
Au deuxième Conseil du cabinet Pompidou, on commence par s'inquiéter de l'application des accords d'Évian. Il est clair que ce thème ne va pas cesser, jusqu'à l'été, de s'amplifier.
Le Général annonce sur un ton serein : « Il arrive trois cents Français d'Algérie par semaine à Marseille. Si tant est qu'ils doivent rester définitivement en France, il faut que ça se passe bien, moralement et matériellement, que l'accueil soit bien organisé ; il faut des antennes en Algérie et que les gens, avant même de partir, sachent où ils vont. »
Joxe, qui revient d'Algérie, commence par justifier cette sérénité : « La situation dans le bled est calme. L'Exécutif provisoire a établi des rapports étroits avec le Haut-Commissariat et le commandement militaire, qui sont installés ainsi que lui au Rocher Noir. L'arrestation de Salan nettoie l'atmosphère. Le découragement s'empare de l'OAS. Elle ne peut plus débaucher des musulmans, organiser des maquis, faire basculer l'armée. Elle mise sur Oran pour y maintenir un régime indépendant et empêcher l'application des accords d'Évian. Mais aucun quartier d'Oran ne sera laissé aux mains de l'OAS. Elle pousse à l'exode vers la campagne les musulmans, qui sont à la limite de leurs nerfs. Les provocations constantes font monter en eux un désir de vengeance.
Pompidou. — Le moment est proche où le seul recours de l'OAS sera le terrorisme désespéré, non plus en Algérie, mais en métropole.
Pisani. — On dit que l'armée française ne peut pas circuler, alors que l'ALN 1 se promène en toute liberté.
Joxe. — En réalité, nos troupes sont consignées dans leurs casernes, tandis que l'ALN, qui n'est ni ravitaillée ni payée, cherche de quoi survivre : la faim fait sortir le loup du bois.
GdG (pousse un soupir). — On a beaucoup de choses à faire à la fois. L'ALN vivait de trois ou quatre cents millions qui lui étaient envoyés de France 2 : ils n'arrivent plus. Alors, elle sepromène. Elle s'est aperçue de ce qu'on peut faire avec une mitraillette. Elle tente de continuer. Il est impossible de la laisser continuer. Elle se balade en armes, elle fait de la parade. Il faut la cantonner. C'est à l'Exécutif provisoire de régler le problème.
« Les fonctionnaires, c'est à nous de régler leur problème : ils seront, suivant leur attitude, reclassés ou révoqués.
« Quant aux colons, tant que l'ALN menaçait, ils payaient sans rien dire. Maintenant qu'ils ont moins peur du fait du cessez-le-feu, ils ameutent Le Figaro. Il faut mettre les gens au travail. Ce sont quelques semaines difficiles, il faut le savoir. Vous en subirez tous des effets. »
Joxe a l'air moins tranquille quand il rend compte du congrès du FLN à Tripoli : « Le programme élaboré par la Fédération FLN de France a été remanié par le comité de Tunis, présidé par Ben Bella. Il a été accentué dans le sens socialisant, marxiste et révolutionnaire. C'est vraiment un projet de révolution radicale : il faut éradiquer tout ce qui reste de la présence française. »
« Vous allez me les réexpédier en Algérie »
Roger Frey raconte drôlement que des incidents ont opposé en métropole le FLN et la police, notamment à propos de collectes de fonds, de rackets et de séquestrations. « Les Algériens entretiennent en France une police, une magistrature, une diplomatie parallèles. Les dirigeants du FLN ont la volonté d'établir un véritable droit d'exterritorialité. Tout contrôle que nous faisons serait, selon eux, contraire aux accords d'Évian. Tout café musulman est à leurs yeux une partie intégrante du territoire algérien. Si nous procédons à l'interpellation d'un suspect, aussitôt deux à trois cents manifestants se réunissent pour demander sa remise en liberté au nom des accords d'Évian. Si un musulman est arrêté pour port d'arme, il explique : "Je suis un diplomate, j'appartiens au Quai
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