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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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une voix d'Arabe allait compter autant qu'une voix de Français. Ça voulait dire que la libre disposition d'eux-mêmes était accordée à tous les Algériens. Ça lançait un mouvement que tout le monde approuvait par acclamations et que personne ne pourrait plus arrêter. J' ai simplement pris au mot les pieds-noirs. Je ne les ai pas roulés ! Ils se sont aveuglés eux-mêmes, en ne voyant pas à quoi ils s'étaient engagés !
    AP. — Je pensais aussi au discours de Mostaganem : "Vive l'Algérie française! "
    GdG. — Eh bien, cet été-là, c'était ce que je pouvais souhaiter de mieux à l'Algérie, sinon à la France ! Je ne pouvais pas écarter cette option sans l'avoir essayée de bon cœur ! Et encore aujourd'hui, je souhaite sincèrement à l'Algérie de rester française comme la Gaule est restée romaine, je lui souhaite d'être irriguée et fécondée par notre culture et notre langue. En revanche, je n'ai jamais accepté de parler d'intégration, bien que tout le monde fît pression sur moi pour que je prononce ce mot magique. Je ne l'ai jamais accepté, parce que c'est une connerie. On intègre de petites unités, on n'intègre pas une vaste population. Vous savez, il ne faut pas mentir. Tout se sait un jour ou l'autre. Il faut rester sincère avec soi-même. »

    « J'ai bien dit ce que je voulais dire »
    Tout penaud, j'essaie d'expliquer ma malencontreuse initiative :
    « J' ai pensé qu'il n'était pas prudent de donner une grande diffusion publique, à chaud, à des propos que vous avez tenus en privé. Si je m'étais trop précipité, je n' aurais pas pu rattraper une imprudence. Au contraire, rien n'empêche de reprendre le texte aujourd'hui ! »
    Il a un sourire de connivence : « Je vois ce que vous voulez dire. Mais non, j'ai bien dit ce que je voulais dire. Vous devez le publier. »
    Je vais lâcher, avec quelques jours de retard, la déclaration que j'ai étouffée. Séparée de son contexte, elle n'apparaîtra pas comme ce qu'elle aurait dû être : la déclaration la plus importante de son voyage dans les Caraïbes ; la réponse décisive à la question que tous se posaient à son arrivée aux Antilles. Je lui ai cassé son coup 11 .
    Veut-il atténuer mes regrets ? Il me rattrape :
    « Si vous ne voulez pas publier la totalité du texte que je vousavais donné à la Guadeloupe, dites simplement que le général de Gaulle a indiqué quelles dispositions devaient être prises pour hâter le développement économique et social de ces départements. La départementalisation est la solution qui apparaît comme correspondant à notre époque.
    « Et expliquez bien que de petites îles ne peuvent pas être assimilées abusivement à un grand continent. »
    Ce n'est pas mal, et je vais le dire. Mais le texte que lui avait inspiré une nuit à Pointe-à-Pitre, dans le parfum des hibiscus, était tellement plus beau. Je ne me pardonne pas de l'avoir gardé sous le boisseau.

    « Le problème reste à la mesure de nos moyens »
    Au Conseil du 28 octobre 1964, Pisani rend compte d'un voyage à la Réunion. Il dit son inquiétude : « 13 000 habitants de plus par an. Comment la courbe de l'évolution ne conduira-t-elle pas à une explosion ? Nous avons inventé par la loi des avantages sociaux et donné un soutien financier aux familles. Mais du coup, nous n'avons plus les moyens de créer une économie.
    GdG. — Vous voulez dire qu'on a fait trop pour l'individu, pas assez pour la collectivité ?
    Pisani. — On fait trop pour l'assistance, pas assez pour le développement ; trop pour le social, pas assez pour le dynamisme de l'économie.
    GdG. — Et quid de l'agriculture?»
    Le Général ramène sèchement Pisani à ses moutons. Mais il est difficile de prendre celui-ci de court : « L'Europe intervient pour le sucre à la Réunion. C'est là que se jouera une grande partie du destin, sombre en tout état de cause, de cette île. »

    Après le Conseil, le Général me dit :
    « Vous voyez la difficulté. Ou bien nous donnons aux Réunionnais les mêmes droits qu'aux métropolitains, les mêmes allocations familiales ; mais alors, on verra de plus en plus des familles de dix ou quinze enfants, contre deux, si ce n'est un, en métropole. Ils seront chez eux en France ; la France deviendra créole. Ou bien nous leur refusons les droits des Français, mais ils ne le toléreront pas, puisque nous leur avons inculqué l'égalité des droits ; ils voudront pour le moins leur indépendance, tout en

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