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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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été limogé par Paul Reynaud 3 . Et d'autres du même tonneau, avec qui Roosevelt prenait le thé. Ils le montaient contre moi, en remâchant leurs échecs. Seulement, ça continue. Alors, Bohlen ne voit que nos adversaires, les Mitterrand et les Maurice Faure. Je suis sûr de gagner, n'est-ce pas ? On peut se fier aux démocraties. (Rire — "les démocraties ", c'est ainsi que se présentaient pendant la Seconde Guerre les États-Unis et l'Angleterre ; mais le Général prend ce vocabulaire avec des pincettes : dans ces démocraties auto-proclamées, il voit surtout, le danger passé, l'impuissance du parlementarisme.)
    AP. — En attendant, la presse américaine est exécrable à votre égard. Mais les lettres de Roosevelt se retournent contre lui.
    GdG. — Et contre Churchill aussi.
    « Churchill, lui non plus, n'admettait pas qu'on ne plie pas. Au lieu de trouver des gens de caractère qui lui auraient tenu tête, il s'entourait de gens qui étaient couchés par terre.
    « Je me rappelle un soir, quand j'ai rencontré Roosevelt pour la première fois, au Maroc. Roosevelt voulait m'obliger à me soumettre à Giraud. J'ai envoyé Roosevelt faire foutre, poliment mais fermement. Alors, Churchill m'a fait une scène invraisemblable. Je l'ai mal pris, et je lui ai dit : "Qu'est-ce que ça veut dire : On ne vous comprend pas ? Vous n'êtes pas digne de votre charge ! " Je l'ai très mal traité. Alors, le dernier jour, on s'est réuni autour de Roosevelt pour se dire adieu. Churchill, devant tout le monde, a commencé à me refaire une scène en me disant : " Vous n'avez pas suivi le Président." Il piquait une lèche éhontée à Roosevelt, et c'est Roosevelt qui, à la fin, a trouvé que ça suffisait et lui a imposé silence. Il a dit : " Maintenant, il faut que ces deux généraux se serrent la main devant les photographes."
    «La politique de Roosevelt, c'était exactement celle qu'ont aujourd'hui les Américains dans le Sud-Est asiatique. Ils ne peuvent pas en imaginer d'autre. Des marionnettes, c'est ça qu'ils veulent en face d'eux. »

    « Eux qui n'ont à la bouche que l'Europe, l'Europe, l'Europe »
    Au Conseil du mardi 7 juillet 1964, Couve présente un accord pour une organisation « Telstar 4 » : 61 % pour les États-Unis ; l'Angleterre aura autant, avec le Canada et l'Australie, que le reste de l'Europe réuni.
    Le Général, après le Conseil, ne me cache pas qu'il ressent une véritable souffrance en constatant que les Européens, même ensemble, ne sont pas capables de rivaliser avec les États-Unis : « Vous voyez ça ? La prépondérance américaine est écrasante, et la prédominance anglo-saxonne encore plus. Tout accord avec les Etats-Unis est léonin. (Un temps.) Mais enfin, il faut bien le signer. Il ne faut pas compromettre l'avenir. L'Europe semble en train de se rendre compte de son intérêt solidaire, face aux États-Unis. Il faut éviter qu'il y ait un monopole américain. Il faut que la situation entre les États-Unis et l'Europe soit le moins inégale possible. Il faut sauvegarder les chances futures de la France. Il paraît que nous avons une avance en lanceurs et en électronique spatiale. Ce qu'on peut espérer, c'est que les Européens se mettent d'accord entre eux pour faire quelque chose tout seuls, sans les Américains, le plus vite possible. Mais nos partenaires sont-ils vraiment européens, eux qui n'ont à la bouche que l'Europe, l'Europe, l'Europe 5 ? Il m'arrivede me demander si je ne suis pas le seul véritable Européen (j'ai déjà entendu ça 6 . »
    Il garde le silence. Il reprend :
    « Il faut que les Américains s'en aillent.
    AP (sursautant). — Comment, s'en aillent ? D'où ?
    GdG. — Qu'ils quittent le sol français ! Puisqu'ils font la sourde oreille à toutes nos demandes de directoire ou de concertation à trois, puisqu'ils ne veulent pas comprendre que la France est un grand pays, puisqu'ils refusent d'avoir avec nous des relations spéciales comme avec les Anglais, il faut qu'ils quittent notre territoire. Pas un seul uniforme américain ne doit rester.
    AP. — Quand comptez-vous faire ça ? En 65 ?
    GdG. — Non.
    AP. — Mais, après 65, il n'y a que vous qui puissiez le faire. »
    Il se rend compte qu'il s'est coupé. Il est clair qu'en ce moment, il ne doute pas qu'il sera encore là dans deux ans. Il reprend, agacé :
    « On verra... Il faudra bien qu'après 66, on puisse le faire. »
    Cette confidence involontaire semble signifier qu'il est sûr

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