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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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agrégé de philosophie ", etc., son ton, son style, son sourire, ses dents blanches ont frappé.
    GdG. — Vous ne voulez tout de même pas que je proclame devant les caméras : "Je m'appelle Charles de Gaulle" ?
    AP. — Il me semble indispensable que vos ministres réfutent les arguments de l'opposition.

    « Je ne vais pas m'user en petite monnaie »
    GdG. — On parle trop. J'ai annoncé que je parlerai à la fin de la campagne. Je le ferai. Je ne vais pas m'user en petite monnaie. Moins on parle, plus ce qu'on dit est attendu et a des chances de porter. Il vaut mieux ne pas mêler Pompidou ni les autres à ma campagne. En tout cas, à ma campagne radiotélévisée.
    AP. — Vous admettez quand même que nous participions à des réunions publiques, à des meetings ?
    GdG. — Si vous y tenez, je ne peux pas vous en empêcher.
    (Il a donc évolué sur ce point.)
    AP. — Ne craignez-vous pas que les Français prennent votre attitude pour du mépris ?
    GdG. — Pourquoi ? Je reste sur les hauteurs, les Français le comprendront. Plus les autres roulent dans la boue, plus le peuple appréciera que je reste digne.

    « Ce serait une lapalissade d'annoncer mon départ »
    AP. — À quel pourcentage s'élève l'adhésion " franche et massive" à laquelle vous avez fait allusion ?
    GdG. — Je ne vais pas avancer de chiffres, mais je verrai bien si le courant passe ou ne passe pas.
    AP. — Et si jamais vous sentiez que le courant ne passe pas ? Laisseriez-vous percer la possibilité d'un départ ?
    GdG. — Non ! Mon départ, je l'annonce quand je soumets au peuple un référendum en liant mon sort au résultat, ce qui ne serait pas obligatoire. Pour l'élection, ce serait une lapalissade de l'annoncer.

    AP. — Mais si votre majorité était, selon votre expression, "faible et aléatoire" ?
    GdG. — Ne tirons pas de plan sur la comète. On verra bien. »
    Je repars à la charge pour le convaincre de parler, ne fût-ce qu'une fois pendant la campagne.
    AP : « Si vous faites une première intervention au début de la semaine, vous montrerez que vous acceptez de vous insérer dans la campagne comme candidat. Si vous vous contentez de parler après tous les autres, pour tirer les leçons de la campagne quand elle est terminée, vous risquez de donner l'impression de ne pas jouer le jeu. »
    Il m'écoute patiemment, et laisse tomber, maussade : « Je verrai. »
    Samedi 4 décembre 1965.
    Les journaux reprennent en gros titres les sondages qui font prévoir le ballottage du Général.
    J'ai convoqué pour l'après-midi le directeur général de l'ORTF, Jacques-Bernard Dupont, et les deux directeurs généraux adjoints, Claude Contamine, le diplomate, et André Astoux, le militant gaulliste. «Le Général va très probablement se trouver demain en ballottage. Quelles dispositions prenez-vous pour la campagne télévisée du second tour ? »
    Astoux se lève, pâle d'émotion, et m'apostrophe : « Monsieur le ministre, imaginer que le Général peut se trouver en ballottage, c'est pire que du défaitisme ! C'est un crime de lèse-majesté ! On dirait que vous voulez tout faire pour que l'invraisemblable devienne possible ! »
    Comme lui, des millions de Français n'arrivent pas à imaginer l'inimaginable. Pour les gaullistes, ce ne sera pas seulement la surprise, ce sera la foudre.
    1 René Bousquet, l'ancien secrétaire général de la police de Vichy, disposait de la très influente Dépêche du Midi.
    2 À la veille du second tour de l'élection présidentielle de 1981, le général de Boissieu, grand chancelier de la Légion d'honneur, annonça qu'en cas de victoire de François Mitterrand, il démissionnerait et refuserait de passer le collier de grand-maître autour du cou du nouveau Président. Ce refus souleva une vive réprobation.
    3 Roger Frey a approuvé le 30 septembre 1994 le compte rendu que je lui avais soumis de cette conversation à trois.

Chapitre 15
    « JE NE SUIS PAS LÀ POUR VAINCRE LA GAUCHE ET LA DROITE, MAIS POUR LES RASSEMBLER »
    Dimanche 5 décembre 1965. Matignon, bureau du Premier ministre, 21 heures 30. Ses collaborateurs, Ortoli et Jobert, apportent sans arrêt des informations de plus en plus consternantes : le Général va être en ballottage avec 44 % des voix. « Ça ne peut plus bouger significativement », disent les experts.
    Pompidou, très serein, mais quand même grave, veille à garder le contrôle des événements — et l'événement, il peut se passer à Colombey : « Ça

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