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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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à l'avantage de leur industrie, et en mettant notre agriculture à la porte. Bon. Alors, ça suffit comme ça ! Si maintenant, au lieu d'être gentils et complaisants, autrement dit de pratiquer le traité franco-allemand, ils vont courir à Washington et se font les boys des Américains, à partir de ce moment-là, je ne les regarde plus, les Allemands.
    (Cherche-t-il à m'intoxiquer ? Me provoque-t-il pour que je réagisse ?)

    « Seulement la Chine et nous »
    AP. — Les Allemands, ni les Américains, ne s'imaginent que nous aurions le culot de faire une politique d'entente avec les Russes.
    GdG. — Tout dépend de ce qu'on appelle une politique d'entente avec les Russes. Il y a une chose certaine, c'est que, pour leur réunification, les Allemands ne pourront plus compter sur nous.
    « Notre position est incomparable. Il n'y a personne d'autre qui soit capable d'avoir une politique indépendante, excepté la Chine. Seulement la Chine et nous. Si je veux, je supprime l'OTAN et le commandement américain en Europe, je renvoie Lemnitzer 1 , et tous les Américains qui sont ici. Et alors, qu'est-ce qu'ils feront ? Ils iront se mettre en Allemagne. (Gros rire.) Ça va arriver, d'ailleurs, un de ces jours.
    AP. — S'ils font la Force multilatérale ?
    GdG. — Dans ce cas-là, tout de suite. Mais ça se fera de toute façon... Seulement, nous attendrons qu'ils soient en faute, comprenez-vous.
    AP. — Alors, ils vous rendent service avec la Force multilatérale.
    GdG. — Mais oui. Bien sûr. C'est le premier acte de la fin de l'OTAN... La vérité, c'est que les Américains n'auraient pas lancé l'idée de la Force multilatérale, si nous ne faisions pas de bombes. Ils voulaient nous rattraper au tournant, mais ils n'ont pas pu. »

    Salon doré, 25 novembre 1964.
    AP : « Deux journalistes américains, Walter Lippmann et Cyrus Sulzberger, m'ont évoqué l'idée d'une Force multilatérale qui serait proprement européenne.
    GdG. — Mais non ! (Gros rire.) Je ne vais pas donner nos bombes à l'Allemagne ! Vous pensez bien que je ne renoncerai pas à cet avantage colossal que nous prenons sur les cinq autres du Marché commun, par le fait que nous sommes les seuls à disposer d'un armement nucléaire et par conséquent les seuls qui soyons sûrs de nous en matière de défense ! Nous n'avons aucune espèce de raison de dilapider ce capital ! D'ailleurs, c'est bien ce qui les embête, spécialement les Allemands.
    AP. — Est-ce que vous admettriez, à mesure des progrès dans la construction européenne, que notre force, tout en restant nationale, puisse protéger nos partenaires dans certains cas ?
    GdG. — Mais elle les protégera automatiquement ! Beaucoupmieux que la force américaine ! Pour la simple raison que nous sommes Européens, et que les Américains ne le sont pas. L'intérêt des Américains à ne pas laisser détruire l'Europe est infime par rapport au nôtre. Nous, si l'Europe est envahie, nous sommes foutus. Tandis que les Américains ne seront pas foutus parce que les Russes arriveraient sur le Rhin. Les Allemands sont bien arrivés à Paris, l'Amérique ne se sentait pas foutue.

    « Tape sur mon client... mais ne tape pas sur moi »
    AP. — Les Américains répliquent qu'alors, il n'y avait pas d'alliance. Alors que maintenant, ils sont obligés par l'Alliance.
    GdG. — Une alliance ? Les traités ne valent que dans la mesure où ils couvrent les intérêts nationaux. Le jour où ce n'est plus le cas, il n'y a plus de traité. D'ailleurs, il n'y a aucun traité qui oblige les Américains à lancer leurs bombes atomiques si l'Europe est attaquée. Ils n'ont jamais voulu s'y engager, et il est tout naturel qu'ils ne le fassent pas.
    AP. — Ils sont quand même obligés d'engager leurs forces conventionnelles, alors qu'en 14 et 39 ils n'y étaient pas obligés.
    GdG. — Oui, ils engageraient leurs divisions d'Allemagne. Peut-être même engageraient-ils leurs petites bombes tactiques en Europe, parce que ça n'amènerait pas les Russes à lancer de grosses bombes stratégiques sur l'Amérique. Ce qu'ils détruiraient avec leurs armes tactiques, ce serait simplement l'Europe, mais non la Russie. La Prusse serait détruite par les bombes américaines, l'Allemagne de l'Ouest et la France par les bombes russes. Qu'est-ce que ça peut bien leur foutre, en définitive, aux Américains ? Vous comprenez ?
    AP. — Les Américains n'engageraient pas d'action nucléaire stratégique sur la Russie et

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