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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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    GdG. — Que me dirait Johnson et qu'est-ce que je lui dirais ? Une rencontre avec Johnson n'est pas comme une rencontre avec Kennedy. Il n'est pas à la hauteur et il le sait. Il est complètement dépendant de ses services. Il ne connaît aucun dossier. Il ignore tout de l'Europe. Il croyait que Napoléon était italien. (Gros rire.) Alors, que voulez-vous faire avec des types comme ça ?
    AP. — Vous ne craignez pas qu'il fonce sur nous, maintenant ?
    GdG. — Il foncera sur quoi et pourquoi ? Qu'est-ce que vous voulez que ça me fasse ? Par des discours ? Au besoin, j'en ferai aussi. Ce n'est pas lui qui a barre sur moi, c'est moi qui ai barre sur lui. Que voulez-vous qu'il fasse contre nous, Johnson ?
    AP. — Il cherchera à nous isoler, sans doute ?
    GdG. — Si je claque la porte à tout le saint-frusquin de l'OTAN, qu'est-ce qu'il peut faire contre moi ? Rien.

    « Johnson va mobiliser ses domestiques ? Ça le conduira à quoi ? »
    AP. — Il va chercher sans doute à conjuguer contre nous nos opposants de l'extérieur et de l'intérieur.
    GdG. — L'opposition intérieure, ça n'est pas sérieux. Et notre opposition extérieure, ce sont ses domestiques. Il va mobiliser ses domestiques ? Ça le conduira à quoi ? Ce sont des histoires pour les journaux. On avait prise sur nous, autrefois, quand nous avions une monnaie fondante, quand nous étions obligés de quémander pour boucler nos fins de mois. Maintenant, nous n'avons besoin de personne. Nous avons une balance des paiements qui est indéfiniment positive. On n'a plus prise sur nous.
    AP. — Dans les premiers temps, nous disions : "Votre Force multilatérale, faites-la si vous voulez, ça ne nous intéresse pas." Maintenant, nous dirions plutôt: "Cette Force multilatérale est dangereuse et nous n'en voulons pas." Nous avons donc évolué.
    GdG (agacé d'être mis en contradiction avec lui-même). —Non ! Vous n'avez pas compris ! J'ai toujours dit que la Force multilatérale n'était bonne à rien, que c'étaient des bombes américaines, que c'esttoujours Johnson qui en disposerait, qu'elles soient maniées par des boys américains ou par des boys allemands. Seulement, je conviens qu'étant donné l'importance que les Allemands y attachent et les arrière-pensées qu'ils y mettent, alors je n'y suis pas favorable, certainement. Je ne veux pas que les Allemands disposent de bombes atomiques. Depuis qu'Adenauer est parti, ils sont engagés dans la voie de la pagaille. Nous savons où mène la pagaille en Allemagne, et ailleurs aussi. Adenauer était le premier à me dire que les Allemands risquent de redevenir dangereux. En tout cas, ils le sont pour l'Est. Et du même coup, ils introduisent un élément de tension internationale, qui est absolument fâcheux. Quant à la réunification, vous pensez bien qu'elle ne vaut pas la peine d'une guerre nucléaire.
    «D'autre part, du côté américain, ça devient une prétention à acculer la France, à nous dire : "Vous êtes des empêcheurs de danser en rond, vous êtes des séparatistes", comme le dit Wilson. À partir de ce moment-là, la Force multilatérale prend une certaine importance à cause de l'esprit dans lequel on la fait. Alors, ça, nous ne l'admettons pas.

    « Si les Allemands se font les boys des Américains... »
    AP. — Si nous nous y opposons, nous finirons par nous rapprocher des Soviétiques, qui seront les seuls à s'y opposer aussi.
    GdG. — Automatiquement, nous nous rapprocherons des Russes dans la mesure où les Allemands s'éloigneront de nous. Pourquoi nous sommes-nous éloignés des Russes, après la guerre, alors que nous leur avions proposé de nous arranger sur le sort des Allemands ? Je l'avais offert à Staline, et il n'a pas voulu. Il s'est précipité à Yalta, il s'est arrangé avec Roosevelt, il a cru qu'il allait pouvoir disposer de tout, et même de l'Allemagne, en dehors de qui que ce soit en Europe, et en particulier en dehors de la France. À partir du moment où il a fait cette politique — qui du même coup était menaçante pour nous —, alors nous avons fait une politique qui a consisté à attirer les Allemands à l'Ouest, et par conséquent à leur faire d'énormes concessions, donc à les renforcer. On leur a rendu leur charbon et leur acier, on a liquidé la Sarre, on a permis qu'ils aient une armée, et ainsi de suite. Et un peu plus, si je n'avais pas été là, on faisait la Communauté économique européenne exclusivement à leur avantage,

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