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C'était de Gaulle - Tome II

C'était de Gaulle - Tome II

Titel: C'était de Gaulle - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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d'où la France a été exclue. Ils étaient bien décidés à s'installer enFrance comme en territoire ennemi ! Comme ils venaient de le faire en Italie et comme ils s'apprêtaient à le faire en Allemagne ! Ils avaient préparé leur AMGOT 1 , qui devait gouverner souverainement la France à mesure de l'avance de leurs armées. Ils avaient imprimé leur fausse monnaie, qui aurait eu cours forcé. Ils se seraient conduits en pays conquis.
    « C'est exactement ce qui se serait passé si je n'avais pas imposé, oui imposé, mes commissaires de la République, mes préfets, mes sous-préfets, mes comités de libération ! Et vous voudriez que j'aille commémorer leur débarquement, alors qu'il était le prélude à une seconde occupation du pays ? Non, non, ne comptez pas sur moi ! Je veux bien que les choses se passent gracieusement, mais ma place n'est pas là !

    « Les Français sont déjà trop portés à croire qu'ils peuvent dormir tranquilles »
    « Et puis, ça contribuerait à faire croire que, si nous avons été libérés, nous ne le devons qu'aux Américains. Ça reviendrait à tenir la Résistance pour nulle et non avenue. Notre défaitisme naturel n'a que trop tendance à adopter ces vues. Il ne faut pas y céder !
    « En revanche, ma place sera au mont Faron le 15 août, puisque les troupes françaises ont été prépondérantes dans le débarquement en Provence, que notre 1 re Armée y a été associée dès la première minute, que sa remontée fulgurante par la vallée du Rhône a obligé les Allemands à évacuer tout le Midi et tout le Massif central sous la pression de la Résistance. Et je commémorerai la libération de Paris, puis celle de Strasbourg, puisque ce sont des prouesses françaises, puisque les Français de l'intérieur et de l'extérieur s'y sont unis, autour de leur drapeau, de leur hymne, de leur patrie ! Mais m'associer à la commémoration d'un jour où l'on demandait aux Français de s'abandonner à d'autres qu'à eux-mêmes, non !
    « Les Français sont déjà trop portés à croire qu'ils peuvent dormir tranquilles, qu'ils n'ont qu'à s'en remettre à d'autres du soin de défendre leur indépendance ! Il ne faut pas les encourager dans cette confiance naïve, qu'ils paient ensuite par des ruines et par des massacres ! Il faut les encourager à compter sur eux-mêmes ! Allons, allons, Peyrefitte ! Il faut avoir plus de mémoire que ça ! Il faut commémorer la France, et non les Anglo-Saxons ! Je n'ai aucune raison de célébrer ça avec éclat. Dites-le à vos journalistes. »
    Il reprend : « Ceux qui ont donné leur vie à leur patrie sur notre terre, les Anglais, les Canadiens, les Américains, les Polonais, Sainteny et Triboulet seront là pour les honorer dignement 2 . »
    Je n'ai rien dit aux journalistes. J'ai même dit : « Il n'en a pas été question au Conseil des ministres », ce qui est exact.
    Le Général a sûrement vu que je n'avais pas accompli cette mission. Aucune remarque. Peut-être m'en a-t-il su gré ?

    « Le débarquement en Normandie se passait en dehors de la France »
    Espérant que le Général aura oublié sa vive réplique, ou en tout cas aura oublié que c'est à moi qu'il l'a adressée, je remets la question sur le tapis, dix mois et demi plus tard, le 13 mai 1964.
    AP : « Ne craignez-vous pas, si nous ne donnons pas du moins quelques explications, que votre absence le 6 juin en Normandie soit mal interprétée ?
    GdG. — Mais je vous l'ai déjà dit ! Il n'a jamais été question que j'y aille ! Je n'y suis pas allé pour le cinquième anniversaire ; ni pour le dixième ; ni pour le quinzième. Pourquoi voulez-vous que j'y aille pour le vingtième ? Et j'ai demandé au Premier ministre de ne pas y aller non plus. D'ailleurs, le Premier ministre anglais n'y va pas. Johnson n'ira pas non plus. Pourquoi irions-nous ?
    (Évidemment, Wilson et Johnson n'y vont pas, parce que de Gaulle n'y va pas.)
    AP. — Eisenhower et Montgomery doivent y aller.
    GdG. — Ce sont des acteurs, qui se font payer cher par la télévision 3 . »

    Après le Conseil du 10 juin 1964, le Général laisse percer encore son agacement : « Ces messieurs de la presse qui me reprochent de ne pas aller en Normandie vingt ans après, que faisaient-ils alors ? S'étaient-ils battus pour que la France recouvre sa liberté, pour qu'elle contribue à sa délivrance ? Que faisaient-ils pendant la guerre ? Ils ne se battaient ni en Normandie, ni ailleurs. La Libération s'est

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