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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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les experts ont retiré 996 grammes d’ossements humains. Parmi lesquels : 103 débris de crânes ; 4 apophyses ; 6 rochers ; 3 condyles mandibulaires ; 5 métatarsiens ; 48 phalanges ; des débris de rotules et de pieds.
    Les experts ont remarqué qu’il ne s’agissait que de fragments de crânes, de bras ou de jambes. Dans ces résidus funèbres, aucun ossement n’avait appartenu à d’autres parties d’un squelette humain. Les morceaux d’os provenaient de trois cadavres au moins. Ceux de sujets adultes, sans doute du sexe féminin, l’un plus jeune que les autres. Tous les os avaient subi plusieurs calcinations et avaient été brisés par la suite. Dernière constatation des experts : certains de ces fragments avaient été sectionnés, « soit à l’aide d’un instrument tranchant de forte masse (hache ou couperet), soit à l’aide d’une scie ».
    Des têtes, des pieds, des mains : ce sont les parties du corps qui permettent d’établir une identité. En les brûlant, les concassant, Landru a cru pouvoir empêcher à jamais l’identification de ses victimes. Mais pourquoi a-t-il gardé cette comptabilité insensée, ces incroyables archives ?
    Aux Assises de Versailles, le commissaire Dautel devait avouer :
    — Sans le petit carnet de l’inculpé, je ne sais si nous n’aurions pas été forcés de renoncer. C’est Landru qui nous a fourni toutes les preuves que nous avons aujourd’hui contre lui.
    Inexplicable Landru.
     
    En a-t-on parlé de cette cuisinière ! Les journalistes qui avaient visité la maison de Gambais juraient qu’il s’agissait d’« un petit meuble capable de cuire la soupe, mais rien de plus. Elle était nette et sans tache de graisse quand nous la vîmes au premier jour. La pièce ne sentait pas le roussi. Il semble impossible d’admettre que plusieurs cadavres y furent réduits en cendres  (26) …» Mais le docteur Paul, médecin légiste, déclarera au procès :
    — J’ai fait moi-même l’expérience de brûler quelques têtes… Il faut trente-huit minutes pour brûler une tête vidée… Cent minutes pour une tête entière avec cerveau, yeux, cheveux, langue… Pour brûler des pieds, il faut quarante-cinq à cinquante minutes  (27) .
    De fait, Charles Tabareau, du Journal , survenant un jour dans la maison de Gambais, a découvert le docteur Paul et les experts, occupés à procéder à la crémation d’un gigot dans la cuisinière de Landru : « Tous ces messieurs, asphyxiés par une fumée insupportable, les yeux larmoyants et la gorge pleine de suie grasse, soufflaient, éternuaient et mouchaient dans le jardin. »
    Ces expériences se sont révélées positives. On a prouvé que, dans la cuisinière de Landru, des fragments de cadavres d’un poids de cinquante kilos pouvaient être consumés en vingt-quatre heures. Il n’avait fallu que 2 kilos de charbon pour calciner une tête de mouton d’un poids de 1,250 kg, ceci en trois quarts d’heure. Le résidu ressemblait étonnamment aux débris osseux humains recueillis chez Landru. Quant au fameux gigot de mouton – poids 2,500 kg – il avait été entièrement calciné en une heure dix minutes. Il n’avait même pas été nécessaire d’ajouter du charbon, « la chair ayant fonctionné comme combustible ».
     
    Ce dont il faut se souvenir, c’est que, pour faire disparaître les corps, Landru n’a jamais été pressé. Il lui est arrivé de repartir aussitôt après un meurtre, mais de revenir quarante-huit heures plus tard passer quelques jours à Gambais. Seul. Tranquille. Ce qu’il faut savoir aussi, c’est que des habitants de Vernouillet avaient constaté autour de la villa The Lodge des faits bien étranges. Une voisine avait prévenu le garde champêtre que d’épaisses fumées se dégagaient de la villa occupée par Landru. Une domestique avait aperçu le locataire de la villa, dans son jardin, ayant allumé un feu « dans lequel il avait jeté une sorte de malle qui brûlait en pétillant ». Le feu avait duré de 4 à 11 heures. La fumée qui s’en dégageait « sentait très mauvais et avait une odeur indéfinissable, comme celle de la graisse brûlée…»
    On comprend que Landru ait préféré, à Gambais, une maison isolée.
    Il n’est pas exclu, d’ailleurs, que des parties importantes des corps aient été immergées dans les étangs voisins de Gambais. Un pêcheur a témoigné qu’il avait vu, dans l’un de ces étangs, flotter un gros

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