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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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l’urgent besoin de communiquer avec leur famille. Dans une seule journée, une centaine de messages – et davantage – encombrent les ondes. De plus, les journalistes accourus à la baie du Roi se servent de l’émetteur du bord pour transmettre leurs articles. Ils n’ont rien à dire ? Tous les rédacteurs en chef du monde savent que c’est lorsqu’un journaliste ne sait rien qu’il rédige ses plus longs articles.
    Les deux officiers radio de la Città transmettent ainsi nuit et jour. Toutes les deux heures, ils expédient leur message de routine : « Comptez sur nous. Nous organisons les secours. » Ils ne prennent pas la peine de se porter eux-mêmes à l’écoute !
    Sur le pack, autour de la tente rouge, les jours passent. Et l’espoir s’amenuise. Et il meurt.
    Malgré les objurgations de Nobile – « Je vous en supplie, restons groupés ! » –, trois des survivants de l’ Italia vont décider de se mettre en marche vers le sud : le Suédois Malmgren, les officiers de marine Zappi et Mariano.
    Ils savent qu’ils n’ont que très peu de chances de gagner une terre quelconque. Tant pis. Tout vaut mieux que cette mortelle attente.
    Chargés de tous les vivres qu’ils peuvent emporter, ils partent.
     
    « S.O.S. Italia … S.O.S. Italia …»
    Les messages de Biagi s’envolent toujours sur les ondes.
    Il a décidé d’émettre tant que ses batteries donneraient signe de vie.
    Il sait que le jour approche où elles se tairont. Alors personne au monde ne pourra plus les repérer.
    « S.O.S. Italia … S.O.S. Italia …»
    Rien.
     
    Biagi a commencé à émettre le 25 mai. Depuis, combien de temps ? Un jour, rayonnant, il a couru vers la tente :
    — Victoire !
    Tous ont bondi :
    — On nous a entendus ?
    — Non. L’Italie a battu l’Espagne par 7 à 1.
    Nul n’a songé à sourire. Les têtes se sont baissées.
    Le 6 juin, Biagi, comme chaque jour, s’est mis à l’écoute du poste italien à ondes courtes de Saint-Paul. Une exclamation :
    — Cette fois, on nous a entendus !
    Fiévreusement, il résume l’information inespérée que vient de diffuser Saint-Paul. Le 4 juin, le gouvernement soviétique a communiqué à l’ambassadeur d’Italie à Moscou le texte capté la veille par un certain Schmidt qui, perdu près d’Arkhangelsk, se distrait comme il peut en écoutant les ondes courtes sur un poste de sa fabrication.
    L’ambassadeur italien a aussitôt transmis le texte capté à Rome où, d’emblée, on l’a d’abord rangé au nombre des messages – ils pullulaient – prétendument captés par des mauvais plaisants. Puis on l’a étudié de plus près. Cela ressemblait à un cryptogramme :
    «  Italia. Nobile. Franz Joseph. S.O.S. S.O.S.
    Terra tengo. E h H . »
    Qu’est-ce que cela veut dire ? Jamais Biagi n’a transmis cela. Soudain il comprend. Il a donné sa position : circa (près de) Foyn . L’amateur russe a compris Francesco . On va donc fatalement les chercher près de la Terre François-Joseph, bien loin du point où ils se trouvent. Pour Nobile, c’est une catastrophe. Il faut que Biagi émette plus que jamais. Il faut qu’il rectifie.
    Mais va-t-on l’entendre ? Oui ! Le message russe a eu le mérite de retenir l’attention de la Città di Milano . Tout à coup ; Romagna éprouve des doutes. Et s’il s’était trompé ? Et si ceux de l’ Italia étaient vivants ? Ouvrons donc nos oreilles.
    Pour la première fois, le 8 juin, la Città di Milano, enfin vigilante, capte le message de la tente rouge. Et répond. Immense, le soulagement de Nobile et de ses compagnons. Ils se réjouissent trop vite. Romagna est plein de suspicion : et si c’était encore un mauvais plaisant ? Il exige que Biagi fasse connaître son numéro matricule. Ce à quoi le radio de la banquise consent volontiers. Romagna fait soigneusement vérifier. Le numéro est le bon. Romagna daigne communiquer avec les survivants de Yltalia.
    Cette incroyable cécité a déjà comporté une conséquence qui aurait pu se révéler dramatique. Dès l’annonce du message capté par le sans-filiste – ainsi s’exprimait-on à l’époque – l’aviateur Lutzon Holm est arrivé au Spitzberg. Devant les doutes si obstinément exprimés par Romagna, Holm s’est fâché : préfère-t-on attendre que, là-bas sur la banquise, ils meurent tous, l’un après l’autre ? L’aviateur s’est envolé vers la terre du Nord-Est. Pendant plusieurs jours, on

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