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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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plus bas que les cimes des arbres, c’était un biplan, fragile et compliqué, où le pilote était assis à l’avant, entre les mâts et les haubans. » Quelque temps plus tard – ses parents vivaient alors séparés – sa mère l’emmena à Fort Mayer, en Virginie, pour assister à un meeting aérien. Toute sa vie, il reverrait ces biplans, primitifs et poétiques, avec leurs pilotes à la casquette retournée vissée sur la tête. Ce jour-là, il décida qu’il serait aviateur  (47) .
    N’ayant pas achevé le deuxième semestre de sa seconde année universitaire, Charles fit savoir à son père et à sa mère qu’il allait quitter l’école dans un seul but : apprendre à voler.
    Réaction du père :
    — C’est trop dangereux et tu es mon seul fils.
    Réaction de la mère :
    — Très bien. Si tu désires vraiment voler, c’est ce que tu vas faire.
    C’était à la fin de mars 1922. Lindbergh enfourcha sa moto – son seul bien. Il en était d’autant plus fier qu’elle tombait sans cesse en panne et qu’il l’avait démontée et remontée cent fois. Il gagna Lincoln, dans le Nebraska, où il s’enrôla comme élève à la Nebraska Aircraft Corporation. Il venait juste d’avoir vingt ans.
     
    On n’en était plus à l’aube de l’aviation mais celle-ci n’avait pas quitté son petit matin. La guerre, dans ce domaine comme dans d’autres, avait permis de considérables progrès techniques, mais l’aviation n’était pas entrée dans les mœurs. La première ligne régulière avec passagers – Amsterdam-Londres – n’avait été fondée qu’en 1919. En 1920, on avait vu naître les lignes françaises Paris-Bruxelles et Paris-Londres. Elles utilisaient ce que l’édition de l’époque du Larousse Universel appelait « de puissants appareils aménagés en vue du tourisme ». Un dessin de la même édition montrait, pour l’édification de ses lecteurs, l ’Intérieur d’un aéroplane géant. La cabine des voyageurs . On apercevait, de part et d’autre d’un étroit couloir central, six sièges en osier ressemblant à des fauteuils de jardin. La même planche offrait à notre admiration l’aérobus Blériot (1920), un biplan quadrimoteur. Orgueilleuse évolution : l’aérobus était muni d’un lavabo dont on nous proposait aussi l’image.
    Aux États-Unis, il n’existait que douze cents avions civils, d’ailleurs presque tous d’anciens appareils militaires. En fait de lignes régulières, les seules que l’on comptait se révélaient de caractère purement local.
    Le 9 avril 1922, Lindbergh allait recevoir le baptême de l’air à bord d’un Lincoln Standard Turnabout, biplan pouvant porter, outre le pilote placé à l’arrière, deux passagers à l’avant. Il se souviendra : « J’ai encore dans les narines l’odeur de vernis qu’on sentait alors dans les ateliers comme l’odeur d’éther dans les couloirs d’un hôpital. Je revois clairement les fuselages aux couleurs brillantes, alignés sur le sol, et ressens la même admiration pour le si faible volume du moteur Hispano-Suiza. » Il n’oubliera pas davantage le moment où l’appareil s’était élevé dans les airs : « Je perds conscience de ma liaison avec le passé. Je ne vis plus que pour l’instant présent dans cet espace étrange, éternel, merveilleusement beau, parsemé de dangers. »
    Entraînement : en cinq semaines, huit heures de vol seulement, décollage et atterrissage en double commande. Il allait en coûter 650 dollars à l’aspirant pilote. Quand il voulut voler seul, l’entraîneur lui demanda 500 dollars, expliquant qu’il lui fallait se couvrir « contre une destruction éventuelle de l’appareil ». Lindbergh ne possédait pas les 500 dollars. Il préféra s’engager comme aide bénévole d’un pilote du nom d’Erold Bahl qui entreprenait dans le pays une tournée d’exhibitions et de baptêmes de l’air. Le jeune Lindbergh devait s’occuper de l’appareil, mettre le moteur au point et, à l’étape, se muer en bateleur pour recruter des candidats aux vols d’initiation. Qui plus est, pendant les démonstrations, il marchait sur les ailes — ceci sans protection ni parachute. Au retour, Lindbergh n’avait toujours pas volé seul !
    Nouvelle tournée d’exhibitions et d’acrobaties – en compagnie d’un certain Lynch. Désormais Lindbergh ajoutait à ses marches en plein vol des sauts en parachute. Lynch non plus – prudent autant que

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