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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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de Paris ont fait placarder des affiches appelant à manifester. Soixante et un conseillers sur quatre-vingts ont condamné publiquement la révocation de Chiappe.
    Les Jeunesses patriotes donnent rendez-vous au « peuple de Paris », le 6 à 19 heures, place de l’Hôtel-de-Ville. De là, on marchera sur la Chambre : « Voici l’heure attendue depuis si longtemps ! L’heure de la Révolution nationale ! »
    L’Action française appelle les Français à se rassembler devant la Chambre « à l’heure de la sortie des ateliers et des bureaux, ceci au cri de : À bas les voleurs  ! ».
    La Solidarité française invite à se réunir sur les boulevards, entre Richelieu-Drouot et l’Opéra. « Départ de là, à 19 h 15 précises. » Il faut que « le gouvernement se rende compte que le peuple est réveillé et qu’il avance, décidé à en finir avec les internationaux révolutionnaires et les politiciens pourris ».
    Le Front universitaire demande aux étudiants de « descendre dans la rue pour arracher le pays aux forbans de la politique, aux traîtres et aux escrocs ».
    La Fédération des contribuables de la Seine, tout en rappelant qu’elle est indépendante des partis, invite ses adhérents à se joindre « à tous les mouvements qui auront lieu dans Paris le mardi 6 courant… pour s’opposer à une politique d’immoralité qui jette la déconsidération sur la nation et ne pas tolérer plus longtemps les agissements d’un gouvernement qui n’a plus la confiance du pays ».
    L’Union des combattants corses invite ses adhérents à se rassembler « pour montrer qu’un même cœur bat dans toutes les poitrines de l’île ».
    On découvre même un Comité de Salut public pour proclamer dans un tract la « déchéance du Parlement ». Avec ce commentaire dénué d’ambiguïté : « La nécessité s’impose d’un gouvernement provisoire… L’insurrection est le plus sacré des devoirs. »
    On aura remarqué que, dans tout cela, il n’est pas question des Croix-de-feu ni de La Rocque. En présence de cette symphonie, le colonel a décidé de jouer en solo. C’est la veille qu’il a organisé sa propre démonstration. Le 5, à 19 heures, 2 000 Croix-de-feu se réunissent au rond-point des Champs-Élysées, sous la conduite de Lebel, et 3 000 à la Madeleine, sous le commandement de Lameth. Lebel doit marcher sur l’Élysée, Lameth sur la Chambre. Des barrages empêchent Lameth de passer. Seule la colonne Lebel s’approche de l’Élysée. Les manifestants scandent :
    — Vive Chiappe ! Vive Chiappe ! Vive Chiappe !
    La colonne est repoussée vers l’Étoile par une charge de la garde républicaine. Elle défile alors sous l’Arc de Triomphe, descend les Champs-Élysées, retrouve à l’angle de la rue Marbeuf la colonne Lameth. À 21 h 30, de son PC secret, La Rocque donne l’ordre de dispersion. Celle-ci s’effectue avenue Montaigne et place de la Concorde. Ordre est donné aux Croix-de-feu de prendre, le lendemain, les ordres à leur permanence.
    À son tour, la CGT fait entendre sa voix. Le 5, elle dénonce « ceux qui veulent s’emparer de la rue et s’inspirent des régimes fascistes et hitlériens. Contre les voleurs et les ennemis de l’épargne, nous réclamons toute la justice mais nous ne permettrons pas que des scandales soient exploités contre le régime ».
    La mobilisation est décrétée. Sera-t-elle un prélude à la guerre civile ?
     
    Le nouveau préfet de police a pris ses fonctions. Il s’agit de l’ancien préfet de Seine-et-Oise, Bonnefoy-Sibour. Il est totalement inconnu de la police parisienne. Par malheur, le directeur général de la police municipale, Paul Guichard, vient d’entrer à la Maison de santé des gardiens de la paix – fondation de Marcelle-Jean Chiappe – pour y être opéré de l’appendicite. Il est remplacé par son adjoint, Camille Marchand.
    Le 5 février, à 17 heures, Frot reçoit Bonnefoy-Sibour. Il l’invite à se montrer d’une grande sévérité envers l’extrême droite et l’extrême gauche, à laisser en revanche toute latitude aux anciens combattants, sauf en cas d’une marche de ceux-ci vers le Palais-Bourbon.
     
    L’aube du 6 février se lève. Deux journalistes, Georges Arqué et Yves Dautun, respirent « un air pur, un air frais » qui « caresse le dur visage des travailleurs, nettoie les rues des mauvais miasmes de la nuit et met en joie les pierrots des Tuileries et

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