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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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allemands de « détruire l’ennemi à tout prix, mais d’épargner autant que possible la population civile ». Or c’est le contraire qui s’était produit : « C’est pourquoi le moral de la légion était très bas à mon arrivée en Espagne. Personne ne parlait de bon gré de Guernica. » Galland dira encore : « En réalité, Guernica, qui n’était ni une ville ouverte ni un objectif militaire fut une erreur lamentable, telle qu’il s’en produisit au cours de la Seconde Guerre mondiale. Cette erreur allait devenir le symbole même de l’iniquité et de la barbarie allemandes. »
    L’étape finale sera franchie par le journaliste Vicente Talón dans son livre Arde Guernica (1970). Pour Talón, il ne saurait exister le moindre doute : les avions employés pour le bombardement étaient allemands et pilotés par des Allemands de la légion Condor. Lorsque paraît le livre de Talón, le général Franco est toujours en vie et la censure reste vigilante. On peut légitimement en déduire que, du vivant même du Caudillo, le régime a abandonné sa thèse primitive.
     
    En septembre 1945, deux Américains s’entretiennent avec Goering dans sa prison de Nuremberg. Ils se nomment Maier et Sander. Ils lui parlent de Guernica. Réponse du Reichsmarschall  : la ville a été utilisée comme « banc d’essai ». Il ajoute : « Lamentable événement ! Mais nous ne pouvions pas faire autrement. À l’époque, de telles expériences ne pouvaient pas être menées ailleurs. »
    Le chef d’état-major de la légion Condor, von Richthofen, écrira : « Il fut possible de disloquer les mouvements rouges sur une large échelle, par des attaques combinées, dont celle de Guernica fut la plus réussie. »
    Serait-ce donc que la responsabilité de l’anéantissement de la ville doive être attribuée à la légion Condor exclusivement  ? Non point. Un document, révélé en 1970, apporte la preuve d’une connivence totale entre Allemands et franquistes. Il montre que le raid du 26 avril 1937 a été engagé à la demande du commandement nationaliste  (54) .
    Daté du 7 mai 1937, ce document n’est autre qu’un télégramme que le GQG de Franco adressa à la légion Condor afin que celle-ci informât Berlin de l’« incident ». En voici les termes : « Je prie Sander  (55) d’informer Berlin que Guernica, ville de moins de cinq mille habitants, située à 6 kilomètres de la ligne du front, carrefour de communications très important, dotée d’une fabrique de munitions, de bombes et de revolvers, était le 26 avril un lieu de passage d’unités en fuite et de stationnement de réserves. Les unités de la ligne du front ont demandé directement à l’aviation de bombarder le carrefour ; cela fut exécuté par les forces aériennes allemandes et italiennes et, à cause du manque de visibilité, de la fumée et des nuages de poussière, des bombes jetées par les avions ont atteint la ville. »
    Que pourrait-on ajouter ?

VIII

L’affaire Toukhatchevski
    12 juin 1937
    La nouvelle éclata avec la brutalité qui était désormais de règle sous le règne de Staline. Elle plongea dans la stupeur quelques millions de Soviétiques : on venait d’arrêter le maréchal Toukhatchevski et, avec lui, plusieurs militaires de très haut rang.
    La consternation s’accrut quand on découvrit dans la presse l’explication officielle de ces arrestations. De quoi les accusait-on, ces personnages prestigieux ? D’avoir, en accord avec les agents d’un État étranger, conspiré contre le régime. Après quoi, les choses allèrent incroyablement vite. Le 11 juin, on annonçait que Toukhatchevski et ses complices comparaîtraient le même jour devant un tribunal militaire siégeant à huis clos. Le 12 juin, on apprenait que tous les accusés – Toukhatchevski et sept autres – avaient été exécutés.
    Nous savons, par quantité de témoignages parus après l’ère stalinienne, ce que fut l’accablement des Soviétiques moyens. Toukhatchevski, un espion ? Toukhatchevski, un conspirateur ? Cet homme-là, on s’était habitué à l’admirer, la presse et la radio en chantaient les louanges. Et maintenant…
    L’époque n’était pas aux commentaires. Ceux qui doutèrent publiquement, et même en privé, payèrent ce doute de leur vie ou d’une longue captivité. Pour être édifié à cet égard, il suffit de lire les Mémoires du général Gorbatov qui connut les camps

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