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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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il y a la religion.
    — Y en a beaucoup. Laquelle est la bonne ?
    — Bon. Il n’y a pas de morale ni de religion. Mais il y a la police. La société se défend.
    — Tu connais un policier futé ? Moi pas. Rien n’est plus facile que de passer à travers les mailles de leurs filets.
    Conclusion de Lucien B. : « Par la suite, à longue échéance, la mise en pratique de ces conceptions particulières s’est de plus en plus développée, élargie, aggravée. Elle a pris l’ampleur la plus démesurée  (117) . »
     
    Le 20 mai 1917, Petiot est blessé au pied gauche par une explosion de grenade. Non seulement le choc l’a traumatisé mais il souffre d’une forte bronchite. On le transporte à l’arrière. Il faut quatre mois pour que son pied guérisse. Va-t-il repartir pour le front ? Il n’en éprouve pas la moindre envie.
    C’est alors que les médecins constatent chez Petiot des troubles mentaux caractérisés, un déséquilibre profond, de la neurasthénie, de l’amnésie. Une maladie qui vient à point ? Impossible d’en être sûr. Avec Petiot, on ne sait jamais s’il simule ou non. Le résultat est là : il est interné dans un asile psychiatrique.
    Plus tard, devenu médecin, on lira sur son papier à lettres : «  Interne des hôpitaux et asiles. » Il n’a jamais été interne des hôpitaux. Ce qui manque, c’est l’accent aigu ; il aurait dû écrire : interné . L’usurpation rencontre ici l’habileté. : si on lui avait reproché d’user d’un titre auquel il n’avait pas droit, il aurait pu répondre que l’imprimeur – seul – était responsable de l’erreur.
    En 1919, il est réformé à 40 % puis, en 1920, à 100 %. Dans son dossier, les rapports d’experts – péremptoires – témoignent que Marcel Petiot est incapable de tout travail physique ou intellectuel et que, dans son cas, la nécessité d’une surveillance médicale constante s’impose. Dans le cadre de cette réforme, les examens subis en 1922 et en 1923 confirment que Marcel Petiot est un malade mental.
    Or, pendant toutes ces années, ce dément « inapte à tout travail », cet « amnésique profond » poursuit ses études de médecine. Même, il met les bouchées doubles. En décembre 1921, il passe sa thèse de doctorat avec la mention très bien !
    Face à une situation aussi inouïe, nous sommes réduits à n’envisager qu’une alternative : pour toucher une pension, simule-t-il toujours ? Ou bien est-ce un dément qui a obtenu la mention très bien  ?
    Peut-être découvrirons-nous un élément de réponse à la lumière des « expériences » auxquelles il s’est livré au cours de ses études. Pour empêcher la défécation, n’a-t-il pas cousu l’anus de trois chats ? Leurs cris horribles ont ameuté le quartier. Ses camarades l’ont vu travailler à une pompe aspirante et refoulante à matières fécales contre la constipation, pratiquer le magnétisme et l’hypnose, rechercher le mouvement perpétuel. Ils se souviendront de son rire grinçant qui éclatait à propos de tout ou de n’importe quoi. Pour les uns, c’était « un dingue et un salaud ». Pour d’autres : « Il était capable de toutes les filouteries et de toutes les méchancetés hypocrites. » Certains, plus indulgents, se sont contentés de voir en lui « un cynique à qui tout était bon ».
     
    En 1922, un nouveau médecin s’installe à Villeneuve-sur-Yonne, petite ville de quatre mille habitants, dans une maison de trois pièces avec jardin. Il distribue des prospectus : Le docteur Petiot est jeune et seul un jeune médecin peut être au courant des dernières méthodes nées du progrès qui marche à pas de géant. C’est pourquoi les malades intelligents ont confiance en lui. Le docteur Petiot soigne mais n ’ exploite pas ses malades .
    Il soigne en effet et même il guérit. La clientèle grossit. Il se veut amical avec les anciens, paternel avec les enfants, galant avec les dames. Il se mêle à la vie des associations, il est de toutes les fêtes : autre manière de se faire connaître d’éventuels clients. À ce jeu, il devient populaire.
    René Nézondet, greffier de justice de paix à Villeneuve-sur-Yonne, qui se lie avec lui en 1924, évoquera la vitalité exubérante de Petiot mais aussi ses fureurs et ses désespoirs. Ce qui l’a frappé, c’est son rire : « Il riait comme on fait naufrage. »
    Ainsi s’impose, à Villeneuve-sur-Yonne, l’image du

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