C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

d’électricité. Falsifiant des billets de consigne, il s’empare de bidons d’huile sur le quai de la gare. C’est absurde, il court de grands risques pour de petits profits.
    Quand de nouveau on le révoque de ses fonctions de maire de Villeneuve-sur-Yonne, plus personne cette fois ne le défend. Il est exclu du conseil général, mis au ban de cette ville qui brûle ce qu’elle a adoré.
    Où peut aller un homme devant qui se ferment toutes les portes ? À Paris, bien sûr.
     
    Quelques mois plus tard, les habitants du IX e arrondissement apprennent que le cabinet médical du docteur Valéri, situé au n° 66 de la rue Caumartin a été racheté par le docteur Petiot, un médecin de province qui, flanqué de sa femme et de son fils Gérard, vient de s’installer dans la capitale.
    Le prospectus qu’il va distribuer à Paris mérite, tant il est révélateur, d’être reproduit intégralement. Qu’on en juge :
    Vous êtes prié de noter que le cabinet médical tenu précédemment par le réputé docteur Valéri, lauréat de la Faculté, sis au premier étage du 66, rue Caumartin, sera tenu désormais par :
    le docteur Marcel Petiot
    Diplômé de la Faculté de Paris en 1921
    Conseiller général de l’Yonne
    Ex-interne des hôpitaux et asiles
    Médecin de l’Office médical permanent de la Seine.
    Ce cabinet médical en plein Paris vous offre toutes facilités d’accès (autobus, métro Caumartin et Saint-Lazare). Il comprend un matériel des plus modernes et des plus perfectionnés avec rayons X-UV-UR ; radiothérapie superficielle et profonde – Faradisation subst. radio-actives – Laboratoire Calva et Fora Ionisation – Cryothérapie – Diathermie (toutes fréquences). – Ondes courtes à grande puissance, etc. Bistouri électrique, outillage chirurgical – Ozonothérapie  – A érothérapie, etc.
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    Le docteur Petiot procède aux accouchements sans douleur, il supprime également la douleur dans les cas de cancer, ulcérations, zonas – névrites. Le docteur Petiot promet aussi des résultats probants dans le traitement des affections respiratoires et surtout tuberculeuses, dans les maladies infectieuses du sang : blennorragie, syphilis ; dans les maladies organiques.
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    Le docteur Petiot est le promoteur, en 1921-1923, d’une technique parvenant à la suppression de la douleur sans anesthésie et sans instrument. Il est l’auteur d’ouvrages originaux sur les maladies nerveuses et sur les cures de désintoxication. Il est le directeur de deux services de clinique. Aidé par des collaborateurs choisis dans les différents secteurs de Paris et de banlieue et disposant d’ambulances et d’un outillage portatif approprié, il assume les fonctions de médecin-chef de l’Office médical permanent. Les particuliers peuvent y avoir recours en toute liberté lors de l’absence de leur médecin habituel. Grâce à des moyens rapides de transport, il est possible au docteur Petiot de répondre promptement aux appels lancés à son téléphone (Pigalle 77-11).
    Vous qui par la suite de l’âge ou de fatigue nerveuse avez perdu la force vitale de la jeunesse.
    Vous qui cherchez à supprimer les soucis en absorbant des drogues et qui voulez en perdre l’habitude.
    Vous qui cherchez un remède introuvable.
    Adressez-vous à un praticien qui grâce à ses travaux et à ses expériences pourra vous venir en aide.
     
    Ce chef-d’œuvre est signé : Docteur Petiot, chef de clinique .
    Mises au point nécessaires : l’Office médical permanent de la Seine est un organisme totalement imaginaire. Les « moyens rapides de transport » de Petiot se résument à une bicyclette. C’est d’ailleurs à vélo qu’il portera cet époustouflant prospectus non seulement dans les boîtes aux lettres du quartier, mais, plus loin dans Paris, dans les bars, les boîtes de nuit, « jusque dans les maisons closes », préciseront plus tard des confrères. Si, dans le monde médical, le prospectus va susciter une manière de scandale, certains praticiens préféreront prendre avec humour l’invraisemblable culot du rédacteur. M e  Jean-Marc Varaut affirme que des médecins avaient appris le prospectus par cœur « et le récitaient à la fin des noces et banquets ».
    La clientèle afflue et c’est là ce qui compte pour Petiot. Les malades se déclarent satisfaits de ce médecin habile et efficace. L’argent rentre. Sa femme tient la comptabilité du cabinet et