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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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voient aussi. Hartenstein hurle un ordre :
    — En avant toutes !
    Les machines s’emballent, le sous-marin bondit. Littéralement, les quatre canots en remorque se soulèvent sur l’eau. Perdant l’équilibre, des naufragés tombent à l’eau. Trois secondes plus tard, deux bombes explosent dans la mer. Elles ont raté leur cible. La manœuvre hardie de Hartenstein a sauvé le bâtiment.
    À coups de hache, on se hâte de trancher l’amarre des canots. Une nouvelle bombe touche l’un d’eux, éclate en faisant de terribles ravages parmi les passagers. Deux bombes vont tomber encore. L’une fait se retourner un canot, jetant à l’eau tous ceux qu’il portait. L’autre rase le sous-marin et provoque une voie d’eau à l’avant.
    L’avion s’éloigne.
     
    Les techniciens rendent compte à Hartenstein : ils ont constaté d’importants dégâts, on doit réparer d’urgence. Par conséquent, il faut évacuer les naufragés. Hartenstein se voit réduit à accepter ce qu’il a, avec tant de constance, voulu éviter les jours précédents. Le moment qui suit ne sera agréable pour personne. On voit les Anglais et leurs épouses sauter l’un après l’autre à la mer. Les Italiens, qui croient devoir être prioritairement épargnés, sont invités, malgré leurs protestations, à sauter eux aussi. On les pousse s’il le faut.
    Après les réparations les plus urgentes, le sous-marin plonge pour un essai. À 16 heures, Hartenstein note : « Les dommages ont été réparés selon les moyens du bord. »
    À 21 h42, l’ U 156 refait surface. C’est fini. Hartenstein ne veut plus savoir s’il existe ou non des naufragés. Seul compte désormais à ses yeux son sous-marin. Lentement, il s’éloigne vers l’ouest. À 23 h 04, son poste de radio étant réparé, il peut rendre compte à Dönitz : « Hartenstein – Stop – Liberator américain nous a bombardés cinq fois avec quatre canots chargés malgré un pavillon avec Croix-Rouge de 4 mètres carrés – Stop – Altitude était de 60 mètres – Stop – Les deux périscopes endommagés – Stop – Arrête sauvetage – Stop – Tout le monde enlevé du pont – Stop – Vais à l’ouest pour réparer – Stop – Hartenstein. »
    Les Britanniques survivants du naufrage stigmatisent tout autant le bombardement que son échec. L’un d’eux : « Trois attaques sans riposte et dans des conditions idéales et pour unique résultat un canot de sauvetage contenant des rescapés blessés ou malades ! Le pilote du bombardier a-t-il réellement essayé, avait-il vraiment du cœur à l’ouvrage ou était-îl seulement inexpérimenté ou nerveux ? »
     
    Longtemps, les Américains se sont refusés à donner des informations sur cette affaire. Aux demandes de renseignements, ils répondaient que les archives restaient muettes et que, probablement, ce drame ne les concernait pas. Après tout, ils avaient cédé à leurs alliés de nombreux bombardiers de ce type. La patience et l’acharnement de M. Léonce Peillard ont fini par être récompensés : le 11 décembre 1959, l’ USAF Historical Division reconnaîtra que « le 16 septembre 1942, un B.24, décollant d’Ascension, a attaqué un U-boat à environ 130 milles nord nord-est de l’île ».
    Un aveu, certes, mais rien de plus. Nulle explication sur l’appareil ni sur les motifs qui ont conduit l’équipage à bombarder. Il faudra attendre la publication, dans le numéro de mars-avril 1980 de l’ United Air Force , de l’article du Dr. Maurel Maurer et Lawrence J. Paszek intitulé « Origin of the Laconia order » pour qu’une part importante de la vérité soit dévoilée. L’enquête d’un Américain, Patrick Boyriven qui, passionné par l’affaire, a recherché et interviewé l’équipage du B.24 – chef-pilote, navigateur, bombardier –, nous permet aujourd’hui d’embrasser le drame dans toute l’étendue de sa réalité.
    En mars 1942, les Américains commencent à aménager une base militaire dans l’île à peu près désertique d’Ascension  (85) . Le génie taille un aérodrome dans la lave et la terre rouge. On le flanque de pistes, de hangars, de magasins et de réservoirs d’essence.
    En quelques mois, Ascension va devenir la principale base de transit des avions nouvellement sortis des usines américaines qui, après une première escale au Brésil, vont s’envoler vers les théâtres d’opérations d’Afrique du Nord ou du

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