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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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de De Gaulle écrit : « La police de Vichy et la Gestapo n’ignorent rien de mon identité et de mes activités. Ma tâche devient donc de plus en plus délicate, alors que les difficultés ne cessent d’augmenter. Je suis décidé à tenir le plus longtemps possible mais, si je venais à disparaître, je n’aurais pas eu le temps matériel de mettre au courant mes successeurs. »
    Rien de plus fondé que ces craintes. La Gestapo croit savoir qu’il a été préfet. Elle est parvenue à établir un véritable organigramme de la Résistance en zone sud. Sur ce document figure, en tête, « Max » – dernier pseudonyme de Jean Moulin – suivi des mentions : délégation générale et MUR .
    Quand Moulin parle des difficultés qu’il rencontre, nous ne devons pas nous leurrer : quand on a unifié l’Armée secrète, Frenay s’est estimé tout désigné pour en être le chef. L’opposition catégorique de Jean-Pierre Lévy et Emmanuel d’Astier l’en a empêché. L’idée seule que le commandement ait été confié à Delestraint lui est insupportable. Les archives de Jean Moulin en conservent la trace éloquente  (91) .
    Frenay estime que Delestraint n’est pas assez « résistant ». Il lui reproche de n’avoir pas été mêlé dès l’origine à la vie des Mouvements. Quand il se souvient qu’il a lancé, le premier, le nom de Delestraint, il enrage. Il espérait, une fois nommé, faire de lui l’un de ses adjoints. Or, revenu de Londres sacré par de Gaulle, Deslestraint a fait savoir qu’il n’entendait partager son commandement avec personne.
    Toute occasion de compliquer la tâche du chef de l’Armée secrète sera désormais exploitée par Frenay. Dans ce but, il va placer auprès du général, comme chef d’état-major, un homme qui lui est totalement acquis : Henri Aubry.
    Entre Frenay et Delestraint, les hostilités restent ouvertes. Le général, qui en est parfaitement conscient, en vient à refuser de rencontrer Frenay. Décision grave, car Delestraint n’a plus dès lors les contacts nécessaires. Il ne lui reste qu’Aubry. Le général espère que la fidélité de son subordonné l’emportera sur celle qu’il doit à Combat.
    À-t-il raison ?
     
    Le 7 juin, dans l’après-midi, Hardy fait retenir une place de wagon-lit sur le trajet Lyon-Paris : le lit n° 8 dans la voiture 3 818. Le billet de réservation porte son identité véritable : René Hardy. Il s’agit d’un compartiment pouvant recevoir deux personnes. Un fonctionnaire de Vichy, M. Cressol, a réservé le lit n° 7.
    Quand il s’apprête, le soir venu, à monter dans le train, Hardy reconnaît soudain sur le quai, en compagnie d’un inconnu, l’ex-résistant Lunel naguère rencontré à Marseille et qu’il sait « retourné ».
    Multon l’a-t-il vu ? Hardy ne le croit pas mais, apercevant un de ses camarades résistants, Lazare Rachline, ami de l’un des dirigeants de Combat, il s’approche de lui et murmure :
    — Dites à Bénouville que, s’il m’arrive quelque chose, ce sera la faute de Lunel…
    Après quoi il gagne sa place.
    Or Multon a parfaitement reconnu Hardy. Le croira-t-on ? C’est dans le compartiment voisin – lits 9 et 10 – que Multon et Moog vont s’installer. S’ils empruntent ce train, c’est pour se trouver à même, à Paris, de préparer le guet-apens qui permettra de s’assurer, le 9 au matin, des mystérieux Vidal et Didot.
    Au moment du départ, chacun a gagné sa couchette. À 1 heure du matin, alors que le train entre en gare de Chalon-sur-Saône, on pousse brutalement la porte du compartiment où se trouve Hardy :
    — Police allemande !
    C’est Moog qui opère. Il arrête Hardy et, pour faire bonne mesure, s’assure aussi de l’infortuné M. Cressol. Les deux hommes sont remis aux policiers de l’armée d’occupation qui peuplent les gares de ce temps-là.
    L’arrêt s’est quelque peu prolongé. Regagnant leur compartiment, Multon et Moog se congratulent : voilà au moins deux « terroristes » mis hors circuit ! Souvenons-nous néanmoins que Multon, s’il sait que Hardy appartient à la Résistance, ignore quel poste il occupe et n’imagine même pas qu’il puisse s’agir de Didot.
    Multon et Moog roulent vers Paris. Ils ne songent plus qu’à la tâche qui les attend.
     
    Le général Delestraint pratique l’exactitude militaire. Le 9 juin, peu après 8 heures et demie, il se rend à la poste de la rue Singer où il

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