C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
ne provoquer aucune crise pendant la campagne électorale américaine. Le 11 septembre, nouvelle déclaration : « L’Union soviétique n’est nullement obligée, pour être en mesure de repousser une attaque et de riposter efficacement, de transférer ses armes dans un autre pays, par exemple à Cuba. » Réponse qui se veut rassurante à un avertissement publié au nom du président Kennedy et qui déclare solennellement que l’installation de fusées à Cuba, ou de « tout autre armement offensif », créerait line situation d’une gravité extrême. La déclaration est datée du 4 septembre. Trois jours plus tard, Kennedy obtient du Congrès le rappel de cent cinquante mille réservistes.
Le 28 septembre, des avions de la Marine, opérant à partir de porte-avions en manœuvre dans la mer des Caraïbes, survolent deux cargos soviétiques et les photographient. Les images rapportées montrent sur les ponts plusieurs grandes caisses : sur l’un des cargos, une dizaine sont particulièrement longues ; sur l’autre, des caisses d’une forme singulière évoquent, a-t-on dit, « de grands éclairs ». Les experts connaissent bien ce genre de caisses : les Soviétiques les utilisent pour transporter leurs Iliouchine-28 , bombardiers à réaction d’un rayon d’action de douze cents kilomètres et propres à transporter des charges nucléaires.
La menace se précise. Il faut en avoir le cœur net. Si les Soviétiques ont expédié à Cuba des Iliouchine-28 , ils peuvent tout aussi bien y installer des missiles. Armés de têtes nucléaires, ceux-ci, en quelques secondes, pourront être expédiés sur les principales villes des États-Unis – et les anéantir. Le 3 octobre, on décide que des U-2 iront photographier, à Cuba, le secteur de San Cristobal, où l’on a signalé des installations particulièrement suspectes.
Depuis que l’on est sûr de la présence de fusées sol-air à Cuba, il faut s’attendre à ce que celles-ci soient utilisées contre les U-2 en incursion irrégulière sur le territoire cubain. C’est par une fusée Sam que, le 1 er mai 1960, Francis Gary Powers, aux commandes de son U-2 , a été abattu au-dessus de la Russie. Aux habituels pilotes civils de l’ U-2 , on décide donc de substituer des militaires. Il faut quelques jours pour les initier. Après quoi, un ouragan se lève qui empêche tout survol. De sorte que c’est le 14 octobre seulement que l’opération peut commencer.
Il est grand temps. Le 10 octobre, le sénateur Kenneth Keating, en plein Sénat, a soulevé une tempête auprès de laquelle l’ouragan des Caraïbes n’était que jeu d’enfant. Il s’est écrié qu’il avait « pleine confirmation » du fait que six bases de lancement de fusées se trouvaient en construction à Cuba « avec des rampes capables de précipiter des missiles au cœur des États-Unis et jusque dans la zone du canal de Panama ».
Le dimanche matin 14 octobre 1962, aux commandes de deux U-2 , deux pilotes de l’US Air Force prennent l’air : les majors Rudolf Anderson Jr. et Richard S. Heyser. L’un et l’autre sont nés en 1927, année même de la naissance de Fidel Castro. Anderson a servi en Corée et Heyser au Japon.
On leur a annoncé qu’ils risquaient une sévère riposte de la DCA cubaine. Rien ne se produit. Ils peuvent photographier à loisir les zones qu’on leur a désignées, en particulier le secteur de San Cristobal. Après quoi, ils regagnent leur aéroport de départ. Ils glissent sur leurs patins, s’immobilisent.
Déjà, des spécialistes se précipitent vers les appareils et se saisissent des pellicules. Tout près de là, un avion supersonique attend. En toute hâte, les spécialistes y portent les bobines. L’avion décolle aussitôt.
C’est ainsi qu’en un temps record, les pellicules prises par Anderson et Heyser atteignent, à Washington, le Centre national d’interprétation photographique, organisme ultra-secret dépendant à la fois du département de la Défense, des services de renseignements des trois armes, du département d’État et de la CIA.
Les meilleurs experts, dûment convoqués, se mettent aussitôt à la besogne. Il n’est pas question de prendre une minute de repos avant que les photographies aient livré tous leurs secrets.
On travaille toute la nuit. Puis toute la matinée du lendemain. Sur les épreuves agrandies, c’est millimètre par millimètre que l’on passe Cuba au peigne fin. L’un
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