C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
doué pour les rapports humains. Pas plus qu’à l’école, il ne parvient à se lier avec ses camarades. On le surnomme le « lapin ». Son temps achevé, il découvre le marxisme et – réaction tout à fait extraordinaire en 1959 aux États-Unis – il part pour l’URSS. Ayant sollicité la nationalité soviétique et celle-ci lui ayant été refusée, il tente de se suicider. Apparemment émues, les autorités russes lui accordent l’autorisation, renouvelable chaque année, de rester en Union soviétique. Oswald s’installe à Minsk où il obtient un poste d’ouvrier non spécialisé dans une usine fabriquant du matériel de radio. Le paradis entrevu se révèle un purgatoire. Est-il capable de s’adapter quelque part ? Il tombe amoureux d’une jeune fille qui n’a que faire de ce garçon taciturne et sauvage. Dans un bal, il rencontre une autre jeune fille, Marina Nikolaevna Prosakova. Coup de foudre réciproque. Ils se marient le 30 avril 1961. Une petite fille naît en février 1962. Le but de Lee désormais : être aimé de sa femme – et, surtout, admiré d’elle. Selon la Commission Warren, son retour aux États-Unis n’a probablement pas d’autre explication. Il a voulu montrer l’Amérique à cette petite Soviétique jamais sortie de sa province. Marina s’émerveille, en effet, mais surtout face au spectacle de l’ American way of life , guère devant son mari américain. À Minsk, du fait de sa nationalité, Oswald tranchait sur les autres. Aux États-Unis, il se perd dans la masse. Aime-t-on, admire-t-on une ombre ?
Dans un pays où l’argent est roi, le ménage en manque. Ouvrier métallurgiste, stagiaire dans une firme de photographie – d’où il est renvoyé pour « faiblesse de rendement » – magasinier au Texas School Book Depository : voilà les seuls emplois qu’aura pu trouver cet Oswald qui rêve de changer le monde. Le soir, il noircit des dizaines de feuillets, associant les fautes d’orthographe aux rêves révolutionnaires. Quoique déçu par l’Union soviétique, il se veut toujours marxiste. Il distribue des tracts en faveur de Cuba rallié par Fidel Castro au communisme. Il voudrait tant qu’on le prenne au sérieux ! Personne n’y songe – et surtout pas sa femme. Hébergée chez une Mrs Paine qui veut apprendre le russe, Marina lui confie ses rancœurs, ses déceptions. Même sur le plan sexuel, Marina est une épouse désabusée – et ne craint pas de le dire. Oswald comprend qu’il est sur le point de perdre définitivement la femme qu’il aime. Il ne s’y résigne pas.
Au début de février 1963, Lee Harvey Oswald découvre dans une revue, American Rifleman , une publicité pour une carabine munie d’une lunette de visée télescopique. Le 12 mars 1963, il expédie un mandat-poste de 21,45 dollars à la firme Klein’s Sporting Goods à Chicago (Illinois). À ce mandat, il joint un bon de commande découpé dans American Rifleman et signé, en lettres manuscrites d’imprimerie : « A. H. Hidell, Boîte postale 2915, Dallas, Texas. » Le tout a été expédié dans une enveloppe portant, manuscrits, les mêmes nom et adresse d’expéditeur. L’écriture du bon de commande, ainsi que la souscription de l’enveloppe seront reconnues, par plusieurs experts, comme étant celle de Lee Harvey Oswald. Le 20 mars, la carabine est expédiée par la Klein’s à la boîte postale indiquée. D’après les archives de la Klein’s , il s’agit d’une carabine italienne 6,5 X-4X, avec lunette, numéro de contrôle C 836, numéro de série X 2 766.
La boîte postale 2915 n’est pourtant pas au nom de A. H. Hidell. Elle a été louée par « Lee H. Oswald » pour la période du 9 octobre 1962 au 14 mai 1963. Les experts en écriture du ministère des Finances et du FBI ont témoigné que « la signature et les autres mentions portées sur la demande de location de cette boîte postale étaient de la main de Lee Harvey Oswald, comme l’était une carte de changement d’adresse datée du 12 mai 1963, par laquelle Oswald demandait qu’on lui fasse suivre à La Nouvelle-Orléans, où il s’était installé le 24 avril, le courrier adressé à cette boîte ». L’enquête établira que la carabine expédiée de Chicago, le 20 mars 1963, a bien été reçue à Dallas, « pendant la période où Oswald utilisait la boîte qui lui était louée ».
Pourquoi « A. Hidell » ? Oswald s’est servi plusieurs fois de ce nom. Le
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