Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
Vom Netzwerk:
secret sera bientôt celui de Polichinelle.
    Le New York Times annonce que « des éléments de deux divisions françaises sont arrivés à Chypre : ils font partie de la 10 e division de parachutistes et de la 7 e division mécanique rapide, stationnées en Algérie. Au cours de la semaine écoulée, le ministère de la Défense nationale a réquisitionné pour usage spécial 26 bâtiments marchands… Le quotidien américain est bien informé : les premières forces – 3 000 hommes – sont parvenues à Chypre le 26 août. Les Anglais acheminent des troupes vers la même destination. On annonce qu’une partie de la garnison de Gibraltar s’est embarquée pour une destination inconnue, « voisine de Suez », écrit-on.
    Les stratèges discutent toujours. On ne sait encore pas si l’on débarquera à Alexandrie ou à Port-Saïd. Finalement Port-Saïd l’emporte. L’opération Mousquetaire devient Mousquetaire révisé .
    Ainsi passe l’été. Massu écrit : « Nous piétinons, l’arme au pied. Août se passe, le soleil flamboie, septembre est bien entamé, l’horizon poudroie, la 10 e DP ne voit rien venir…»
    C’est que les gouvernements négocient toujours. Les opinions publiques ont évolué. À Washington, Foster Dulles reste ferme sur les principes, mais songe à la cohésion atlantique. Les États-Unis continuent à réprouver toute action violente, mais n’en livrent pas moins aux Britanniques et aux Français des pièces de rechange indispensables pour la bataille à venir. Nasser, lui, a volontairement baissé le ton. Il proclame qu’il assurera une liberté totale de navigation sur le canal mais, quand on lui parle d’un contrôle international, il refuse tout net.
    À Londres, Eden sent ses concitoyens s’éloigner de lui. L’homme de la rue est hostile à toute expédition guerrière. Les travaillistes, d’abord favorables, ont fait depuis volte-face. Il n’est qu’à Paris que l’on tienne bon. Certains va-t-en-guerre vont jusqu’à proclamer que, si les Anglais se dérobent, les Français iront tout seuls au Caire faire la leçon au colonel Nasser !
    Tout observateur lucide ne peut que constater que l’on se trouve dans une impasse. Eden suggère de recourir aux Nations unies. Il parvient à convaincre la France – réticente – de s’associer à cette démarche de la dernière chance. L’affaire de Suez va-t-elle vers une conclusion pacifique ?
    Non. Il y a Israël.
     
    Le 22 octobre, un avion se pose sur l’aérodrome militaire de Villacoublay  (33) . C’est le DC4 offert par le président Truman au général de Gaulle. Avec le colonel Mangin, éminence grise du ministère français de la Défense nationale, il vient de voler de Paris à Tel-Aviv et retour pour en ramener trois Israéliens dont le nom seul permet de mesurer l’importance : David Ben Gourion, soixante-dix ans, un des fondateurs de l’État d’Israël, présentement chef du gouvernement, le général Moshé Dayan, chef de l’armée israélienne et son alter ego Shimon Peres.
    Ben Gourion et Dayan apparaissent les premiers à la porte de l’avion. Guy Mollet, qui attend au bas de l’échelle près de sa voiture dont on a ôté tout insigne officiel, s’exclame :
    — Mais comment vont-ils passer inaperçus, Dayan avec son bandeau sur l’œil et Ben Gourion avec sa crinière blanche  (34)  ?
    Une voiture emmène aussitôt les Israéliens dans une villa de Sèvres ; des amis de Maurice Bourgès-Maunoury, ministre de la Défense, l’ont prêtée. De cette demeure, les trois hôtes ne sortiront pas pendant trois jours.
    Christian Pineau leur a emboîté le pas. Il conduit lui-même sa voiture et s’est appliqué à ne pas être suivi. Le suit de près Selwyn Lloyd dont l’avion s’est également posé à Villacoublay. Nul ne sait que le ministre britannique est à Paris, pas même l’ambassadeur de Grande-Bretagne.
    Pourquoi cette entrevue ? C’est Ben Gourion qui a demandé aux Français de l’organiser. Depuis des semaines, le gouvernement israélien, fort de l’accord que lui ont confirmé Britanniques et Français, se prépare à entamer les hostilités contre l’Égypte. Le 16 octobre, de nouvelles assurances lui ont été données mais le vieil homme, qui n’est pas tombé de la dernière pluie, constate que l’édifice commun se lézarde à toute allure. Alors ?
    Ben Gourion n’aime pas les Anglais. Il préférerait se passer d’eux, combattre sans alliés ou, à la

Weitere Kostenlose Bücher