C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
rigueur, aux côtés des seuls Français. Mais il est bien renseigné. Les Iliouchine de Nasser peuvent faire beaucoup de mal aux forces israéliennes. Seule l’Angleterre possède une aviation de bombardement capable de les clouer au sol. Donc, vaille que vaille, il faut forcer Français et Anglais dans leurs retranchements. Surtout les Anglais dont il sait que les certitudes vacillent dangereusement.
Alors Ben Gourion plaide. Dayan et Peres plaident : non seulement le roi Hussein de Jordanie vient de basculer dans le camp nassérien mais il s’est rangé sous le commandement unique déjà accepté par la Syrie. Pour Ben Gourion, cette unification du commandement équivaut à l’ouverture des hostilités. « Israël est en droit de ne pas attendre pour frapper (35) . »
Convaincus, les Anglais et les Français. Tant pis pour le consensus international. Tant pis pour l’opinion publique britannique. Décidément, on va donner une leçon à Nasser. Comme une démocratie doit toujours agir au nom du droit et des grands principes, on convient d’un scénario dont la réalité nous paraîtrait peu vraisemblable si des témoignages indiscutables ne nous en apportaient la confirmation.
En premier lieu, Israël lancera une puissante offensive dans le Sinaï. Aussitôt, manifestant leur étonnement douloureux, Anglais et Français s’adresseront aux deux belligérants. Ils les mettront en demeure de retirer leurs troupes à dix milles – seize kilomètres – du canal de Suez. Cet ultimatum, Israël l’acceptera sur-le-champ, mais – on en est sûr – l’Égypte refusera. C’est exactement ce que l’on attend d’elle. Rien n’empêchera plus alors la RAF d’entreprendre la destruction au sol de l’aviation égyptienne cependant que le corps expéditionnaire franco-britannique viendra occuper la zone du canal.
Avec componction, Selwyn Lloyd explique :
— Nous n’interviendrons qu’en gendarmes, pour séparer les combattants et protéger le canal. La convention anglo-égyptienne de 1954 nous en donne le droit.
Comment, avec Raymond Cartier, ne pas déceler une profonde immoralité dans ce qui nous apparaît tout simplement comme un coup monté ?
Ben Gourion, Dayan et Peres s’en sont allés. Tranquillisés.
Le 26, Israël commence à mobiliser. Discrètement. Quand il faudra procéder à la mobilisation officielle, on proclamera que celle-ci est nécessitée par la lutte contre les fedayin égyptiens, lesquels ne cessent d’intensifier leurs attaques sur la frontière sud. Le 28, le matériel lourd envoyé par la France continue d’arriver à bon port. Des techniciens français atterrissent à Tel-Aviv. Soixante appareils français – Mystère et F 86 – venant de Dijon et Saint-Dizier, ont atterri sur l’aéroport civil de Lod. Trois de nos unités navales les plus modernes, le Surcouf , le Bouvet , le Kersaint voguent à toute allure vers Israël. Elles y parviendront le 29 au matin, cependant que le Georges Leygues mouillera au large de Gaza.
Le 29 octobre au soir ; le monde stupéfait apprend que des parachutistes israéliens se sont posés dans la presqu’île du Sinaï, à 60 kilomètres de Suez, sur la passe rocheuse de Mitla où une brigade motorisée les a rejoints. C’en est fait. La guerre a commencé.
Donnons la parole à David Ben Gourion : « Les premières opérations, qui se déroulèrent selon le plan prévu, furent couronnées de succès ; nous avions devant nous trois divisions égyptiennes, une dans le couloir de Gaza, une dans la région du golfe d’Akaba, une troisième composée d’éléments disséminés dans toute la péninsule du Sinaï. L’effectif total des forces égyptiennes, services auxiliaires compris, dépassait 30 000 hommes, plus 10 000 combattants envoyés ensuite en renfort. Tout s’est très bien passé mais nous avons vécu trente heures de grande tension. J’avais craint que des combats aériens n’entraînent une extension du conflit pouvant provoquer une nouvelle guerre mondiale…»
En fait, le succès des Israéliens se révèle éclatant. Six mille Egyptiens sont faits prisonniers, on estime à 20 milliards de francs le matériel capturé ou détruit. Les alliés anglo-français ne sont pas étrangers, loin de là, à ce qui prend des allures de victoire totale. Les défenses des Égyptiens ont été anéanties par 350 coups de canon tirés du Georges Leygues . Pour protéger Haïfa, le Kersaint a ouvert le feu sur
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