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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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est très mal accueilli. La presse des pieds-noirs le présente comme un « cryptoprogressiste ». On annonce qu’il est là pour mettre fin à l’Algérie française.
    En fait, la seule chose que Soustelle veuille imposer, c’est un plan de réforme fraternelle. Il est lucide. La guerre se développe sans cesse et nul ne sait comment on y mettra fin. Soustelle se souvient que, peu d’années auparavant, un leader comme Ferhat Abbas ne demandait rien d’autre que d’être français à part entière. Les Français d’Algérie ont, à cet égard, sans cesse fermé leurs yeux aux réalités. Ce que Soustelle leur propose, c’est un plan dont l’audace est digne des grands ancêtres ; il faut, en Algérie, pratiquer l’ intégration . Tous les habitants de cette terre française seront également français. Aucune différence, pas la moindre nuance d’apartheid. Les mêmes chances, le même respect pour tous. Si l’on proclame l’intégration, si on l’applique, la rébellion s’éteindra d’elle-même.
    Nul ne peut mettre en doute la sincérité de Jacques Soustelle. Il fait si bien qu’il finit par convaincre les Européens d’Algérie, même les plus attachés à leurs privilèges. Le mot intégration est devenu le vocable-panacée. C’est à ce moment précis que Jacques Soustelle doit s’en aller.
    Cent mille personnes l’accompagnent au bateau. Pour lui faire traverser la foule qui chante Ce n’est qu’un au revoir , il faudra deux chars.
    Le retour à Paris est aussi pour Jacques Soustelle une rentrée dans la politique active. Il crée l’USRAF (Union pour le salut et le renouveau de l’Algérie française). Avec une joie d’iconoclaste, il culbute les gouvernements de Bourgès-Maunoury et de Félix Gaillard, parce qu’ils refusent l’intégration. Le spécialiste des Aztèques organise partout des meetings. Il se sert des amitiés nées pendant la guerre. Dès janvier 1958, il installe des comités clandestins de Salut public dans plusieurs villes et prend des contacts avec l’armée.
    En juin 1957, le conseiller d’État Blocq-Mascart fonde le CANAC (Comité d’action des anciens combattants). Secrétaire général : Alexandre Sanguinetti. Le CANAC ne représente en fait qu’une dizaine d’hommes résolus mais Sanguinetti dispose de la signature de dix-huit grandes associations. C’est en leur nom qu’il va bombarder le Parlement, le gouvernement – de Gaulle lui-même – de motions enflammées et de véritables ultimatums concernant l’Algérie  (84) .
    Pour tous ces mouvements, un seul mot d’ordre, celui qu’a lancé Soustelle : l’intégration. Michel Debré, Jacques Foccart jouent à fond dans ce sens. Cependant l’un des membres de l’appareil de la rue de Solférino, Olivier Guichard, téléphone un jour à Soustelle :
    — Attention ! le Général tique un peu sur votre idée d’intégration. Il estime l’assimilation impossible.
    Réaction très vive de Soustelle :
    — Cela n’a aucun rapport. L’intégration devrait permettre plus tard de déboucher sur une solution fédéraliste.
    — Bon. Cette formule plaira davantage au Général.
    Le curieux de l’affaire, c’est que de Gaulle voit souvent Soustelle mais sans l’aimer. Peut-être est-ce sa popularité qu’il n’apprécie pas. Quelqu’un lui déclare un jour :
    — Soustelle vous ramènera.
    Alors, le Général, très sec :
    — On ne ramène pas de Gaulle.
    Il n’a confiance qu’en Debré. On doit se rallier au jugement des frères Bromberger qui jugent Michel Debré comme « l’âme ardente, et sans doute l’artisan principal de la révolution gaulliste, son Saint-Just ». Debré se présente comme la réplique idéale de Charles de Gaulle. Il dira : « J’ai été le rocher de l’opposition. » Rien de plus vrai : il a accepté toutes les adhésions pourvu qu’elles fussent gaullistes ; il aura sa place dans tous les complots. On verra beaucoup chez Debré le général Faure, qui ne rêve que putschs et coups d’État.
     
    Delbecque, officier de réserve, vient, dans les « commandos noirs », d’accomplir une période en Algérie au cours de laquelle il a retrouvé l’un des collaborateurs de Chaban, Guy Ribeaud, également responsable des « jeunes républicains sociaux », organisation squelettique s’il en fut. Sursitaire, Ribeaud effectue tardivement son service militaire en Algérie. Frappé de la lucidité qu’expriment les jugements à

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