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Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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interpréter
comme la preuve que votre famille est à la solde du Portugal…
    — … que j’ai dû quitter dans des conditions
humiliantes.
    — Mon cher fils, cela ne se discute pas. La calomnie se
nourrit d’elle-même. Considérons que cet aspect-là de l’affaire ne mérite pas
l’attention. Ce qui est plus préoccupant, c’est que Dom Joao et les siens
paraissent vouloir vous prendre de vitesse et exécuter vos plans sans vous
demander votre avis.
    — Ils n’en ont pas le droit.
    — Les souverains ont tous les droits. Et c’est
d’ailleurs pour cette raison que vous êtes obligé d’attendre le verdict de la
commission, et le leur. S’il ne tenait qu’à Luis de La Cerda, il aurait déjà
fait armer deux ou trois navires. Le comte de Medina Celi est assez riche pour
s’autoriser pareille dépense sans écorner sérieusement sa fortune. S’il ne l’a
pas fait, c’est que l’entreprise est d’une telle importance qu’elle nécessite
l’approbation préalable de la Couronne. Les enjeux sont considérables et
multiples.
    — Si considérables que, depuis neuf mois, la commission
n’a pas cherché à m’entendre. Certes, j’ai reçu quinze mille maravédis par
votre intermédiaire, mais je ne suis informé de rien. Je ne sais même pas si
mes arguments ont porté ou non. Contrairement à mon attente, Diego Deza m’a
méchamment mouché en m’opposant Lactance et Orose.
    — Détrompez-vous, il est l’un de vos plus sincères
partisans. Il n’a mentionné Orose et Lactance que pour vous donner
l’opportunité de souligner qu’ils s’étaient trompés et que, par conséquent,
d’autres avaient pu le faire aussi. Don Hernando de Talavera est plus fin et
ouvert qu’il ne le paraît. Il a été ébranlé par vos dires et il a ordonné à ses
clercs de poursuivre leurs investigations. On ne vous a pas dit non, c’est ce
qui compte. Si votre projet était impossible ou irréalisable, il ne susciterait
pas autant d’attention. Ces délais vous insupportent mais ils sont de bon
augure. Tout comme l’est ce qui se passe au Portugal. On vous copie, on vous
imite, on vous pille, quoi de plus satisfaisant ? C’est vous donner
raison !
    Cristobal esquissa un début de sourire. Antonio de Marchena
était toujours de bon, de très bon conseil. Il ne lui mentait pas même s’il
avait toujours une manière bien singulière de présenter les choses, n’en
retenant que leur aspect le plus positif. Il lui faisait penser à un paysan qui
se réjouirait des fortes pluies qui dévastent certes ses cultures mais
suppriment tout risque d’incendie dans sa maison. Il s’était résolu toutefois à
demander au moine s’il devait ou non se rendre à Lisbonne pour tenter de savoir
si, après l’échec de Fernao d’Ulimo, d’autres expéditions sur la mer Océane
étaient prévues.
    Antonio de Marchena n’avait pas paru surpris de sa question.
Il lui avait répondu que l’affaire méritait d’être soigneusement pesée et lui
avait dit qu’il l’évoquerait avec les autres membres de la commission. Deux
mois plus tard, il lui avait demandé de se rendre à la Rabida pour l’y
rencontrer. Il lui avait expliqué que des avis divergents s’étaient fait
entendre, les uns pour, les autres contre un éventuel voyage à Lisbonne. Les
Portugais étaient gens fort cruels et n’hésitaient pas à faire passer de vie à
trépas tous ceux qui contrariaient leurs entreprises maritimes. Ils pourraient
fort bien ne pas s’embarrasser de précautions et retenir prisonnier Cristobal
dès qu’il débarquerait à Lisbonne. Encore serait-il peut-être très heureux de
s’en tirer à aussi bon compte. Ne passait-il pas en effet désormais pour un
agent de la Castille, puisque la reine lui versait une pension et le
considérait comme attaché à son service ? C’était un fait à ne pas négliger.
La cour grouillait d’espions au service du Portugal, de la France ou de
l’Angleterre. En riant, Antonio de Marchena avait expliqué qu’on pouvait même
supposer que l’Aragon espionnait la Castille et réciproquement. Mieux valait
dès lors prendre ses précautions. Voilà pourquoi Cristobal ne partirait qu’à la
seule condition d’avoir reçu du roi Dom Joao II un sauf-conduit en bonne
et due forme, spécifiant qu’il pourrait repartir aussi librement qu’il était
venu. Il n’avait qu’à prétexter le désir de revoir son frère et laisser
entendre qu’il craignait de faire l’objet de

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