Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
Vom Netzwerk:
détestaient cordialement
pour des raisons que l’un et l’autre ne pouvaient rendre publiques. Leurs
parents étaient tous conversos et cet intrigant en avait tiré motif pour
s’attirer ses bonnes grâces. Ce coquin était même venu le voir un jour pour lui
proposer, en baissant le ton, de venir célébrer avec lui et quelques autres
courtisans la sortie d’Égypte « à la manière de nos pères ». Il
l’avait immédiatement chassé et ne lui avait plus jamais adressé la parole. Ce
sacripant pouvait s’estimer heureux qu’il ne l’ait pas dénoncé à Tomas de
Torquemada.
    Pourquoi avait-il fallu que, nonobstant cette fâcheuse
affaire, Pablo de Santa Maria, bouffi de prétention, l’ait grossièrement
interpellé en lui demandant s’il était au courant de l’audience que Don
Ferdinand avait accordée à Abraham Senor et de la proposition qu’il lui avait
faite de s’occuper désormais des finances de l’Aragon ? Il avait même
ajouté :
    — Voilà qui ne devrait pas arranger votre position. Don
Senor, à ce que je sais, ne vous aime guère et sera ravi de suivre l’avis que
je lui ai donné de vérifier soigneusement vos comptes. Bien entendu, il s’agit
d’une simple formalité, n’y voyez aucune malveillance de ma part. Mais, vous
savez comment sont ces gens, ils aiment à se venger de ceux qu’ils tiennent
pour des renégats.
    Peut-être était-ce la Providence qui avait mis sur son
chemin ce gredin. Son insinuation fielleuse avait eu raison de la prudence dont
faisait montre jusque-là Luis de Santangel. Il avait sollicité une audience de
la reine. Le soir même, celle-ci avait demandé au frère Juan Perez de venir la
retrouver. Le prieur de la Rabida s’attendait au pire. Sans doute la souveraine
entendait-elle lui demander des explications sur la conduite de son protégé et
il subirait son courroux avec résignation. Il était temps pour lui d’expier la
conduite imprudente qu’il avait eue et la griserie qu’il avait éprouvée en
étant admis à la cour.
    Il eut la surprise de trouver Isabelle en compagnie de son
époux et de Luis de Santangel dont l’air réjoui le déconcerta. Le roi rompit le
silence en l’apostrophant :
    — Frère Perez, vous ne paraissez pas être à votre aise…
    — Mon cœur est tout au contraire empli de joie quand je
songe aux formidables événements dont nous avons été les témoins ces derniers
jours. Dieu est venu au secours de Son peuple et vous a accordé la plus belle
des victoires. L’Espagne est enfin libérée du joug maure. Reste qu’à force de
parcourir les rues de Grenade pour apporter les secours de la religion à ceux
qui en ont été trop longtemps privés, j’ai pris froid. Ma mauvaise robe de bure
ne me protège pas du vent.
    — Rassurez-vous, vous aurez tout le temps de vous
réchauffer aux flammes de l’enfer ou du bûcher où vous monterez pour crime de
haute trahison.
    — Majesté !
    — Moine, ne prenez pas la mouche, je plaisantais. Une
fois n’est pas coutume, je puis m’amuser un peu en votre compagnie plutôt que
d’entendre vos reproches. J’aurais eu mauvaise grâce à ne pas le faire. Je sais
assez les sages conseils que vous avez donnés à la reine quand celle-ci se
confessait auprès de vous et se plaignait de la manière cavalière dont je l’ai
parfois traitée. Si elle m’a toujours pardonné, c’est que vous l’incitiez à le
faire.
    — C’était mon devoir.
    — D’autres auraient abusé de cette position. Vous
m’avez de surcroît, tout récemment, sans le savoir, rendu un fieffé service.
Luis de Santangel, qui mérite plus que notre confiance, a obtenu de vous des
renseignements de la plus haute importance. Muni de ces précieuses
informations, il a forcé notre porte et nous a mis en garde, la reine et moi,
contre une erreur que nous étions sur le point de commettre. Je m’étais emporté
contre votre protégé génois au point de vouloir lui signifier son congé de la
cour pour l’offense qu’il m’avait faite. La reine avait été assez bonne pour me
passer ce caprice et lui signifier qu’il n’aurait pas sa fameuse flotte. Nous
savons désormais qu’il n’a en rien démérité et que, s’il a omis de me féliciter
pour la chute de Grenade, c’est que certains l’ont incité à agir de la sorte pour
lui nuire et surtout, ce qui est plus grave, pour nous nuire. Le moment venu,
les coupables devront répondre de leurs actes. Sachez en tous les cas que

Weitere Kostenlose Bücher