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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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qu’à son arrivée là-bas, ils se fassent passer pendant un jour ou deux pour ses gardes du corps militaires. Et il s’engageait en échange à leur payer le voyage de retour jusqu’à Anthédon. Ils acceptèrent sur-le-champ, terrifiés à l’idée d’être jetés par-dessus bord s’ils lui déplaisaient.
    J’aurais dû signaler que Cypros et les enfants avaient réussi à quitter Antioche grâce à un Samaritain d’un certain âge nommé Silas, le plus fidèle ami d’Hérode. C’était un gaillard solidement bâti, au visage mélancolique, avec une énorme barbe noire carrée, qui avait autrefois servi dans la cavalerie indigène comme chef de peloton. Il avait reçu deux décorations militaires pour services rendus contre les Parthes. Hérode à plusieurs occasions lui avait proposé de le faire nommer citoyen de Rome, mais Silas avait toujours refusé cet honneur, parce que, expliquait-il, s’il devenait Romain, il serait obligé de se raser le menton à la mode romaine, sacrifice qu’il ne pourrait jamais consentir. Silas donnait toujours à Hérode de bons conseils, qu’il ne suivait jamais, et chaque fois qu’Hérode se trouvait en fâcheuse posture, il lui déclarait   :
    —  Que t’avais-je dit   ? Tu aurais dû m’écouter.
    Il s’enorgueillissait de la rudesse de son langage et manquait fâcheusement de tact. Mais Hérode supportait Silas qui, il en avait la certitude, le soutiendrait contre vents et marées. Silas avait été son unique compagnon lors de sa première fuite vers Édom, et une fois de plus, sans Silas, la famille n’aurait jamais réussi à s’échapper de Tyr le jour où Hérode avait insulté Antipas. Et à Antioche, c’était Silas qui avait fourni un déguisement à Hérode pour lui permettre de fausser compagnie à ses créanciers   ; il avait en outre protégé Cypros et les enfants et trouvé un bateau pour eux. Quand la situation devenait critique, Silas manifestait un optimisme sans nuages, car il savait qu’Hérode aurait besoin de ses services et lui donnerait l’occasion de déclarer   : «   Je suis entièrement à ton service, Hérode Agrippa, mon cher ami, si je peux me permettre de t’appeler ainsi. Mais si tu avais suivi mes conseils, ceci ne serait jamais arrivé.   » En période de prospérité, sa morosité s’aggravait et il semblait évoquer avec une sorte de regret les mauvais jours de pauvreté et de disgrâce. On eût même dit qu’il en souhaitait le retour avec ses avertissements répétés à Hérode dont la carrière, disait-il, s’il ne changeait pas de ligne de conduite (quelle qu’elle fût) sombrerait dans le désastre. Néanmoins, la conjoncture était maintenant assez défavorable pour que Silas retrouvât toute son allégresse. Il échangeait des plaisanteries avec l’équipage et racontait aux enfants avec un grand luxe de détails ses aventures militaires. Cypros qui, en général, redoutait l’ennuyeuse compagnie de Silas, se sentait honteuse maintenant d’avoir si souvent rudoyé cet ami au cœur d’or.
    —  J’ai été élevée, en bonne Juive, avec un préjugé contre les Samaritains, dit-elle à Silas, et il faut me pardonner, s’il m’a fallu tant d’années pour en venir à bout.
    —  Je dois également te demander de me pardonner, princesse, répliqua Silas, –  me pardonner, je veux dire, la rudesse de mon langage. Mais telle est ma nature. Je dois prendre la liberté de dire que si tes amis et parents juifs se montraient un peu moins vertueux et un peu plus charitables, je les aimerais davantage. Un de mes cousins se rendait un jour pour affaires, de Jérusalem à Jéricho. Il tomba sur un pauvre Juif, qui gisait le long de la route, nu et blessé, sous le soleil brûlant. Il avait été détroussé par des bandits. Mon cousin nettoya ses blessures et les pansa du mieux qu’il put, puis il le hissa sur son cheval et le conduisit à l’auberge la plus proche, où il paya pour lui d’avance une chambre et sa nourriture pendant quelques jours –  l’aubergiste avait insisté pour être payé d’avance  – puis en rentrant de Jéricho, il s’arrêta pour le voir et l’aida à rentrer chez lui. Tout cela n’était rien, d’ailleurs   ; nous sommes ainsi faits, nous autres Samaritains. Pour mon cousin, c’était le pain quotidien. Mais le plus drôle, c’est que trois ou quatre Juifs fortunés –  parmi lesquels un prêtre  – que mon cousin avait croisés, chevauchant dans

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