Clio Kelly et l'éveil de la gardienne
profondément pour se débarrasser du malaise qui l’envahissait. On lui bloquait l’accès, mais pour quelle raison ? Elle n’osait interroger Hermès.
— Je ne me souviens pas, dit-elle dans un soupir empli de mélancolie.
Le jeune dieu compatit à la peine de Clio et posant sa main sur son épaule, il l’embrassa sur la joue ; Clio releva la tête et plongea ses yeux dans ceux d’Hermès.
— Ne t’en fais pas, petite sœur ! Avec le temps, tout reviendra, tu apprendras ce que l'on attend de toi.;
Clio adressa un petit sourire vaillant à Hermès. Elle avait autrefois étudié la mythologie, elle savait que le père des Muses et du dieu des voleurs n’était autre que Zeus. Elle repoussa une mèche de cheveux qui lui tombait devant les yeux puis prit son sac.
— Tu es prêt ?
— Mais je le suis toujours !
Éclatant de rire, le renard passa son bras sous celui de Clio car il savait que, lorsqu’ils se retrouveraient dans la rue, les défenses immunitaires de la jeune femme seraient rudement mises à l'épreuve.
L’animal ne put retenir un frisson quand ils arrivèrent sur le trottoir. Malgré la veste qu’il portait, la température négative le mordit tels les crocs d’un loup et il jeta aussitôt un coup d’œil inquiet à sa compagne. Il la serra tout contre lui et ils se mirent à avancer dans la tempête.
La circulation était des plus difficiles. On n’avait pas vu un tel froid depuis près de soixante-dix ans : le vent chargé d’un mélange de pluie et de neige frappait de plein fouet les rares passants qui se risquaient dans les rues.
Clio, quant à elle, était au bord de l’agonie. Chaque partie de son être semblait se transformer en glace prête à se briser au moindre choc, mais la chaleur et la présence d’Hermès à ses côtés lui donnaient la force de progresser.
Quand ils furent devant les grandes portes, Clio ne put retenir un soupir de soulagement. Un sourire narquois sur les lèvres, Hermès murmura :
— Pauvre petite chose sans défense !
— Tu sais, Hermès, je pourrais me faire une écharpe en peau de renard pour cet hiver...
— Tu n’oserais tout de même pas ! s’exclama-t-il, horrifié, tout en s’éloignant d’elle.
Plusieurs « chut » réprobateurs furent lancés par diverses personnes ; pouffant de rire, Clio s’engouffra à travers les allées pour se rendre au bureau de Thomas Vockeur.
Après qu’elle ait frappé, une voix rauque l'invita à entrer. La porte s'ouvrit sur un vieil homme qui semblait être centenaire. Voûté par l’âge, il avait des cheveux blancs coupés courts comme les militaires, les yeux d’un noir brillant enfoncés dans leurs orbites et les rides de son visage lui donnaient l’air d’un phoque sortant de l’eau.
— Ah ! La petite Clio ! s’écria-t-il, ravi. Et qui est ce blondinet ?
— C’est moi que vous ap…
Mais Hermès n’eut pas le temps de finir sa phrase que Clio lui écrasait le pied ; elle connaissait Thomas Vockeur depuis trop longtemps pour permettre à Hermès de lui jeter un sort dont il avait le secret : la jeune femme lui vouait un profond respect.
— Voici Louis, un nouveau au journal. Nicolas lui a demandé de m’aider dans mes recherches pour un nouvel article.
— Ah ! Ce vieux Nicolas ! Tu lui transmettras le bonjour, à cette vieille fouine.
— C’est promis, répondit Clio en riant
— Bien, suivez-moi tous les deux et ne lambinez pas en route !
Marchant derrière Vockeur, Clio constata que les joues d’Hermès étaient en feu. Jetant des regards noirs dans son dos, il marmonnait entre ses lèvres ; elle prit sa main dans la sienne et le fit se baisser pour lui chuchoter à l’oreille :
— N’y pense même pas !
— Penser à quoi ? interrogea Hermès.
— Lorsque les dieux sont offensés, ils n’hésitent pas à lancer des mauvais sorts aux mortels. Alors s’il arrive quoi que ce soit à Thomas, je te jure que tu passeras l’hiver dehors !
— Mais pour qui me prends-tu ?
— Pour ce que tu es ! répondit fermement Clio.
Hermès lui lança un regard furieux mais elle n’en fut pas affectée. Descendant un escalier, Vockeur les conduisit dans une salle de travail où plusieurs cartons étaient posés à même le sol. Clio en compta une dizaine et se tourna vers Thomas, l’interrogeant du regard.
— Voici toutes les affaires criminelles qui ont eu lieu dans le Gévaudan. Enfin, les plus importantes, celles qui ont fait la une
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