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Clio Kelly et l'éveil de la gardienne

Titel: Clio Kelly et l'éveil de la gardienne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Angélique Ferreira
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présenta au Roi un grand loup mâle d’un poids de cent trente livres et haut de quatre-vingt-six centimètres.
    Les meurtres cessèrent pour un temps. Le loup d’Antoine fut naturalisé à Versailles puis exposé à la Cour ; mais Antoine, prudent, attendit quelques temps puis, n’entendant plus parler de la Bête, repartit pour recevoir honneurs et récompenses. »
    — Tu m’étonnes, si Antoine s’était présenté devant le Roi en prétendant avoir tué la Bête et que les meurtres aient continué, cela aurait aussi tourné le monarque en ridicule ! Étant son porte arquebuse, il était donc son représentant en Gévaudan. De plus, les sommes en jeu étaient considérables [2] .
    Clio cliqua sur un petit tableau où apparaissaient les montants promis et versés pour la mort de la Bête.
    — Neuf mille quatre cents livres ! s'exclama la jeune femme. Une jolie somme pour l’époque : avec un tel pactole, tu pouvais t’acheter quatre-vingt-quatre chevaux du pays et prendre ta retraite : un paysan ne gagnait jamais autant au cours de sa vie.
    — Les meurtres se sont arrêtés pendant combien de temps ? demanda Hermès.
    — D’après ce que je lis, deux mois et demi, puis ils ont repris, encore plus meurtriers et sanglants qu’à l’origine :
    « Voici que le 2 décembre 1765, deux enfants sont attaqués par une bête sur le Versant Sud du Mont Mouchet. Les autorités ne veulent plus entendre parler de la Bête. La Cour avait décidé une bonne fois pour toute que l’affaire était réglée : les récompenses avaient été distribuées et les habitants du Gévaudan devaient souffrir d’hallucinations. Ils n’avaient qu’à se débrouiller par leurs propres moyens. »
    — Sans blague ! Louis XV ne devait pas être du genre à passer par la case départ pour payer encore neuf mille quatre cents livres à la banque, dit sombrement Hermès.
    « Ce fut un jeune seigneur qui reprit la relève d’Antoine, le marquis Jean-Joseph d’Apcher, fils de Joseph de Randon et d’Antoinette de La Rochefoucault, il avait vingt et un ans. Il organisa des battues et traqua la Bête pendant plus de dix-huit mois. L’animal fut enfin abattu, le vendredi 19 juin 1767, à dix heures du matin, par Jean Chastel. Celui-ci s’était posté au lieu-dit « La Sogne d’Auvers » qui se situait sur la pente Nord-est du Mont Mouchet, au cœur du fameux bois de la Ténazeyre. »
    — Il a réussi à tuer la Bête d’un seul coup de fusil ! Voilà qui pourrait le faire rivaliser avec cette chère Artémis ! rit Hermès. Toutefois, évitons de lui raconter car elle se met de mauvaise humeur lorsqu’on lui dit qu’un homme est meilleur chasseur qu’elle...
    — Ce n’est donc pas moi qui le lui annoncerai ! rétorqua Clio en souriant. Regarde-moi ça ! Cette bête pesait cinquante-trois kilos trente !
    — Haute de soixante-dix centimètres, chacun de ses crocs en mesurait trente-sept. Bon, tu vas dire que je suis un trouillard mais je préfère ne pas me retrouver devant cette créature.
    — Moi non plus, Hermès ! Mais quelque chose me dit que je lui ferai face quand même, murmura sombrement Clio.
    — Ne dis pas de bêtises ! Une bête comme ça ne passe pas inaperçue, surtout à notre époque !
    — En un an, il y a eu cent vingt-deux attaques, soixante-dix meurtres et quarante blessés, principalement des femmes et de jeunes enfants. Le 14 mai 1765, elle n’attaqua pas moins de cinq personnes, dont deux furent tuées.
    Clio s'étala contre le dossier de sa chaise, mâchant avec inquiétude un stylo qui lui était tombé entre les mains. Elle se sentait de plus en plus intriguée. Pourquoi Remus lui avait-il transmis ce dossier ? Une telle créature ne pouvait pas vivre à l'époque actuelle et rester invisible ! Et pourquoi tenterait-on de cacher ces meurtres ?
    Clio glissa son regard vers son compagnon, espérant trouver une réponse, mais le visage de celui-ci restait aussi inexpressif que le mur devant elle.
    Certaine qu'il devait avoir son avis sur la question, elle le détailla davantage. Elle le surprit à passer une main nerveuse sur son cou, et c'est à cet instant qu'elle remarqua la disparition du collier qu'il portait habituellement.
    Elle s’était souvent demandé à quoi pouvait bien lui servir ce bijou ; d’ordinaire, il refusait de l’enlever pour quelque raison que ce soit.
    Son esprit bouillonnant lui donna bientôt mal à la tête. Tout pourtant était relié : les

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