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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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gouvernement. Il rassure ses ennemis par ses silences, ou de fausses promesses, et le moment venu, alors qu'ils croient avoir partie gagnée, il frappe.
    - Bene ! Benissimo, belle lectrice! comme dirait Mazarini.
    - Ah, Monsieur! Merci de vos éloges! Ils me font le plus grand bien, et pour tout dire, je suis toujours très raffolée des compliments qu'on me baille. Tant est que je ne laisse pas de m'en ouvrir quand et quand à mon confesseur.
    - Et qu'en dit-il ?
    - Il me bl‚me pour ma vanité.
    - Et à mon sentiment, Madame, il a tort. Comment peut-on aimer les autres -
    ce qui est à la fois la joie et le devoir de la vie - si on ne s'aime pas de prime soi-même ? Les bilieux, les mécontents, les misanthropes, les atrabilaires sont de pauvres amants de l'humanité...
    - Monsieur, je jette cette rafraîchissante remarque dans l'escarcelle de ma remembrance et j'en ferai à l'occasion un onguent pour frotter mon aimable petit corps dès que je serai tentée de l'aimer trop.
    - Madame, la duchesse d'Orbieu éprouverait quelque mésaise si notre entretien prenait un tour trop personnel.
    - Monsieur, croyez-moi de gr‚ce, c'est par étourderie que j'ai parlé de mon
    < aimable petit corps ". Je n'y voyais pas malice.
    1. Une toupie.
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    - Toutefois, ce n'est pas le genre de propos qui invite un galant homme à
    baisser les yeux. Revenons donc, belle lectrice, à nos moutons.
    - Revenons-y. Dirais-je, Monsieur, que votre préambule sur les attentes, les silences et les retardements calculés de Louis jette sur ce qui va suivre une note dramatique. Vais-je l'y trouver ?
    - Elle s'y trouve, en effet. Il ne s'agit de rien moins que d'une révolution de palais qu'un plaisant de cour a appelée " la journée des Dupes ", appellation si appropriée que l'Histoire l'adopta.
    - Et qui furent les dupes ?
    - La reine-mère, Marillac et quelques autres.
    - Et qui fut le dupeur ?
    - Et qui d'autre sinon le roi ?
    - Le roi ?
    - Eh bien oui, Madame, le roi! Les faits sont là! Louis est bien plutôt un Machiavel qu'un instrument passif aux mains de Richelieu.
    - Mais Monsieur, la duperie est un procédé assez peu rago˚tant.
    - Voire ! Il l'est, quand les dupés sont de bonnes et honnêtes gens. Mais quand il s'agit d'une haineuse cabale, traître et rebelle à son roi, déserteuse à sa patrie, et qui n'a d'autre dessein que d'abattre un grand serviteur de l'…tat, afin de pouvoir ensuite faire de la France la vassale de l'Espagne et d'organiser à l'échelle de l'Europe une sanglante Saint-Barthélemy des protestants, alors, Madame, pour faire pièce à ce sanguinaire projet, toutes ruses sont bonnes...
    La journée des Dupes se déroula le dix ou le onze novembre 1630. Là encore, l'Histoire est incapable de préciser la date. Et je ne le suis pas davantage, n'ayant point
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    été présent en Paris ces jours-là, me trouvant à Orbieu o˘ Monsieur de Saint-Clair m'avait appelé en raison d'un incendie qui avait pris dans les écuries du ch‚teau, et dont il voulait me faire constater de visu les méfaits. En fait, ce n'est que le quatorze novembre, à mon retour en Paris, que j'appris toute l'affaire, et de qui, sinon du chanoine Fogacer, lequel savait toujours tout sur tout, et il fallait bien qu'il f˚t émerveillablement renseigné : sans quoi, aurait-il été dans l'emploi du nonce Bagni et, par conséquent, du pape ?
    En outre, comme bien le lecteur se ramentoit, le chanoine Fogacer était le confesseur des rediseurs et des rediseuses du cardinal, confession qui comportait une partie religieuse qui ne m'était pas répétée, et une partie profane qui l'était, et dont je faisais aussitôt mon miel pour en nourrir le cardinal.
    Le premier acte de la comédie des dupes s'était déroulé, comme on a vu, à
    Lyon, et l'ayant décrit déjà dans le chapitre précédent, je ne ferai céans que le résumer: Louis, convalescent, gît, faible encore sur le lit qui a bien failli être son lit de mort, quand les deux reines, coup sur coup, viennent le harceler: va-t-il enfin renvoyer le cardinal, cause de tous les maux et des siens en particulier? Il acquiesce, ou plutôt il en fait le semblant. Mais, ajoute-t-il, pour renvoyer Richelieu, dit-il à l'une, il faudra toutefois attendre que soit signé le traité avec l'Espagne. Pour se défaire de Richelieu, dit-il à l'autre, il faudra toutefois attendre qu'on soit de retour en Paris. Nos deux reines prennent pour espèces sonnantes et trébuchantes ces réponses dilatoires

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