Complots et cabales
rallièrent à Montmorency par amitié, la population ne se souleva pas. Et Montmorency en fut réduit à un petit coup de force à l'intérieur de l'assemblée des …tats du Languedoc qu'il avait convoquée dans son ch‚teau de Pezenas.
¿ mon sentiment, ce qu'il accomplit là fut fort peu glorieux et encore moins habile. Une transaction entre le roi et les …tats était intervenue quant à la levée de la taille, dont les Languedociens étaient contents : d'ores en avant, les commissaires du roi dans le Languedoc seraient remplacés par des commissaires nommés par les …tats. Montmorency avait accepté et signé cet accord. Et là, tout soudain, en présence des …tats, il le dénonça. Grande fut l'indignation, et haut et fort le tollé chez les députés du roi, sans toutefois que rien d'insolent f˚t prononcé.
Montmorency prit néanmoins une décision qui est et restera unique dans les annales : il fit arrêter les députés qui le désapprouvaient, et comme l'archevêque de Narbonne qui présidait la séance protestait contre cette brutale procédure, il le fit à son tour emprisonner.
Dans la confusion qui suivit, les députés qui lui étaient acquis décidèrent d'armer la province sans nommer ni préciser contre qui on l'armait. Cette sotte petite ruse ne trompa personne, et dès que le roi apprit ce qui s'était passé, il déclara coupables de lèse-majesté au premier chef tous ceux
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qui soutiendraient < Monsieur 1 " dans son entreprise de guerre civile.
En même temps, toujours prompt en ses décisions, il fit prendre les armes aux gardes françaises, aux gardes suisses et aux régiments de Navarre et de Vervins, pour se porter contre les rebelles. Rien que ces noms-là eussent fait frémir Montmorency s'ils avaient pu résonner à son oreille. En revanche, ce qu'il connut, et qui le plongea dans le désespoir, ce fut l'armée de Gaston, quand Gaston, en juillet, le rejoignit à Lunel.
Havre de gr‚ce ! quel ramassis de pauvres hères c'était là! Défaits, boitillants, toussotants, exténués. On avait d˚ les faire trotter trop vite, leur accorder trop peu de temps aux étapes, et les nourrir fort mal.
¿ mau chat, mau rate ! Ce n'est certes pas Louis qui e˚t agi ainsi, lui qui veillait, je dirais quasiment comme un père, sur la santé de ses soldats.
Et non plus Richelieu, l'admirable intendant, gr‚ce à qui le pain, le vin, et le pot arrivaient toujours à l'heure, les éclopés étant soignés sans tant languir à l'étape, les malades reconnus tels par les barbiers-
chirurgiens, aussitôt évacués.
Je conterai plus loin, je ne dirais pas le combat, mais l'escarmouche de Castelnaudary o˘ fut battue et dispersée en un tournemain la petite armée de Gaston. quant à Montmorency, il fut en toutes les parties du corps, hors les vitales, blessé, transporté au Capitole de Toulouse, à la fois pour le soigner de ses blessures et lui faire son procès. Mais avant ce procès, Richelieu quit de moi de l'aller voir sur son lit de souffrances, visite qui ne préjugeait en aucune façon du choix qu'on allait faire de lui : la mort ou le pardon. Richelieu, qui était la raison même, essayait seulement d'entendre par mon truchement ce qui s'était passé dans l'esprit de ce 1. Titre donné traditionnellement au frère cadet du roi.
2. Proverbe périgourdin: ¿ mauvais chef, mauvais soldats!
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grand féodal pour qu'il choisît de se jeter follement dans une entreprise, dès lors qu'il savait qu'elle était perdue d'avance.
Je craignais, étant tenu par la cabale comme une des ‚mes damnées du cardinal, que Montmorency noul˚t me recevoir, mais il n'en fit rien. Dans l'isolement o˘ il était gardé, sans doute était-il avide de nouvelles. Il me fit à vrai dire ni bon ni mauvais accueil. Il est difficile d'être hautain quand on est couvert de pansements de la tête aux pieds, le plus ensanglanté étant celui qui entourait sa gorge, tant est qu'à l'abord je craignis qu'il ne p˚t parler, pour la raison que le docteur médecin m'avait appris que gisant sur le champ de bataille, le sang lui coulait de par la bouche. En fait, sa voix était faible et lente, mais distincte assez. Chose étonnante, ce n'est pas moi, mais lui qui posa la première question.
- Duc, dit-il, je suppose que vous venez me dire ce que l'on va, faire de moi ?
- Nullement, Monseigneur.
Les ducs et pairs étant égaux entre eux, ce "
Monseigneur "dont j'usais n'était pas imposé par l'étiquette
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