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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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gaussent de vous et vous traitent, derrière votre dos, de pleure-pain et de chiche-face ! Dieu bon ! n'êtes-vous pas duc et pair ? Vous devez à votre rang plus de pompe et de magnificence ! Vos bons Suisses, avec leur carrure terrible et leur forte et m‚le face, feront fort bien l'affaire, encore faudra-t-il les vêtir d'une casaque à vos couleurs, lesquelles étant vert et or seront du plus bel effet, tant est qu'en voyant un de nos Suisses passer par sa rue pour porter un message, un quidam dira en hochant la tête d'un air important: " Voilà un Suisse du duc d'Orbieu ! Et à quelle grande affaire trotte-t-il donc si vite ? " Mon ami, voulez-vous qu'on voie en vous un petit duc crotté de province sans un sol vaillant et lésinant sur tout, alors que nous sommes tous deux si bien garnis en pécunes ? Ah, mon ami!
    connaissez mieux
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    votre temps : à la Cour il ne suffit pas d'être ! Il faut paraître !
    quand je rapportai ces propos à mon père avant mon département pour l'Italie, à ma grande surprise, il donna raison à ma petite duchesse.
    - Votre jolie épouse, dit-il, porte sur ses belles épaules une tête bien faite. Nous autres, anciens huguenots dont " la caque sent toujours le hareng ", nous sommes beaucoup trop bibliquement économes et attachés à nos pécunes comme glue aux pattes d'un oiseau. Cela e˚t convenu dans l'ancienne république romaine qui était sobre et vertueuse. Mais dans une monarchie comme la nôtre, la pompe est un instrument de pouvoir. Le roi doit éblouir par sa magnificence, non seulement ses propres sujets, mais les autres rois d'Europe, leur donnant à penser que la pécune qu'il dépense à ses fastes est telle et si grande qu'elle pourrait, à l'occasion, lever de puissantes armées. Et quant au duc et pair, qui dans sa sphère est déjà un petit roi, il ne suffit pas qu'il soit une des colonnes qui soutiennent l'…tat; il faut aussi que par sa pompe il le fasse apparaître...
    De toutes les croix que mon pauvre roi eut à porter dans sa brève et peu heureuse vie, les plus lourdes, assurément, furent celles que sa mère, son frère et son épouse firent peser sur lui. Ainsi se révèlent les visages très dissemblables que le mot " famille " peut recouvrir: pour les uns, la solitude partagée, le ferme soutien dans les épreuves, les tendres retrouvailles ; pour les autres, les pointilles, les tracas, les amertumes à l'infini...
    Le lecteur se ramentoit que le jeune Gaston d'Orléans, veuf inconsolable, s'était toutefois épris, peu de temps après la mort de son épouse, de Marie de Gonzague, fille du duc de Nevers, à qui le duché de Mantoue venait d'échoir. La reine-mère, comme on l'a vu, était hostile à cette union pour 57
    une raison peu raisonnable : le père de la garcelette avait pris les armes contre sa régence vingt ans plus tôt. Mais le roi et Richelieu n'en voulaient pas davantage, et en voici le pourquoi. Ils craignaient que Gaston, éternel brouillon, et toujours en rébellion plus ou moins ouverte contre son aine, n'all‚t, pour un oui pour un non, se réfugier chez son beaupère en Italie, o˘ il brouillerait sans doute tout à plaisir. qui sait même ? en prenant langue avec les Espagnols du Milanais...
    Vif, spirituel, aimable, mais plongé dans les débauches et les pitreries, Gaston aspirait toujours à plus de viandes qu'il n'en pouvait m‚cher. Il avait voulu commander au siège de La Rochelle, et toutefois à pied-d'oeuvre, sortant sottement de son rôle de général, il avait en première ligne joué les héros. Après quoi, se lassant vite de ce jeu guerrier, il s'était dégo˚té aussi du plat pays rochelais, des marais, du climat tracasse˘x, et s'en était retourné, sans crier gare, en Paris pour se livrer, loin du Louvre sous l'oeil de sa mère, en un hôtel discret, à des occupations qui demandaient moins d'efforts.
    Gaston, pour qui une femme n'était qu'une femme, n'aimait pas Marie de Gonzague au point de vivre éternellement dans la défaveur de son aîné, et privé de ses pécunes qui lui étaient d'autant plus nécessaires qu'elles lui coulaient comme ruisseau entre les mains. Il conçut l'idée de barguigner avec le roi un assez peu rago˚tant accommodement: il renoncerait à Marie de Gonzague pour peu que le roi lui donn‚t le commandement de l'armée d'Italie et cinquante mille écus d'or pour son équipage. Gaston était tout joyeux d'avoir imaginé avec ses conseillers ce bargoin, dont il n'apercevait

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