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Complots et cabales

Complots et cabales

Titel: Complots et cabales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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banquette de sa carrosse, lui-même s'accommodant de l'autre, non sans omettre de dépêcher un écuyer, le mien, et nos quatre chevaux dans le camp des mousquetaires du cardinal afin que le cardinal, le lendemain, s˚t o˘ nous trouver.
    Et bien fit-il, car le lendemain, à la pique du jour, un enseigne desdits mousquetaires, suivi de nos écuyers et de nos chevaux, nous vint dire qu'il avait ordre de nous conduire jusqu'à la carrosse du cardinal. Il ajouta que, sachant à qui mes gens et mes chevaux appartenaient, ils avaient pris soin des uns, pour le pot et le rôt, et des autres, pour l'avoine et l'eau claire, et ceux-là au surplus le poil plus bichonné que garcelette qui se va marier. ¿ ouÔr son accent, le mousquetaire était Gascon et, à ce qu'il m'apparut, fort bien fendu de gueule.
    En chemin, notre cocher suivant notre Gascon à cheval, Schomberg ne laissa pas de me confier combien il avait été scandalisé, la veille, par la dénudation de la princesse de Conti. ¿ quoi je souris in petto, Schomberg poussant la vertu jusqu'à la naÔveté.
    - Pour moi, dis-je, plutôt que dénudation, je préférerais dire dévêtement, car les dessous de la princesse étaient si abondants qu'on ne voyait pas un seul pouce carré de sa peau.
    - Mais qui e˚t cru, dit Schomberg d'une voix quasi 157
    effrayée, qu'une grande princesse manquerait à ce point de pudeur!...
    - Mon ami, sur ce point vous errez. Ce sont les princesses et les reines qui en manquent le plus, pour la raison qu'elles sont trop hautes pour ne se point croire au-dessus des lois. Voyez la reine Margot! Voyez aussi notre reine-mère bien-aimée, qui l'été, par les grandes chaleurs, se couche sur les dalles toute dépoitraillée, et ainsi faite, donne ses instructions au capitaine des gardes, lequel est gêné pour deux.
    - Le ciel me préserve de juger la reine-mère, dit Schomberg pieusement.
    - Mais je ne la juge pas non plus, dis-je sur le même ton.
    Richelieu nous accueillit l'un et l'autre avec une gentillesse qui n'était pas tous les jours à sa disposition, et pour finir nous bailla l'hospitalité dans sa carrosse, ce qui fit que celle de Schomberg suivit la sienne, mais non point vide, Schomberg la mettant à la disposition de ceux de ses hommes qui étaient trop courbatus ou mal allants pour se tenir à
    cheval. Richelieu ne faillit pas de l'en féliciter, ajoutant que prendre soin de ses hommes était le premier devoir d'un chef. Tant est que Louis, dès qu'il avait été le maître en son royaume (allusion clarissime à l'exil de la reine-mère hors Paris), avait porté énergiquement remède aux abus infinis qu'il avait découverts en ses armées touchant plus particulièrement les soldes - dont les capitaines pillaient une partie -,touchant aussi le peu de soins qu'on prenait des malades et des blessés.
    Là-dessus, Schomberg demanda au cardinal s'il était satisfait de la tournure qu'avaient prise les choses en France et hors de France. Si Schomberg n'avait pas été si naÔf et si honnête homme, Richelieu qui pas plus que le roi n'aimait qu'on lui pos‚t question l'aurait sans doute rebuffé. Mais soit qu'il noul˚t attrister un aussi vieil et fidèle serviteur du roi, soit qu'il e˚t le coeur aux talons à force de penser aux perfides intrigues dont il était l'objet, il parla pour une fois àla franquette et sans y mettre sa coutumière circonspection.
    - Le siège de La Rochelle, dit-il, la victoire de Suse, la 158
    libération de Casal, la soumission du Languedoc ont été pour le roi de très grands succès, auxquels j'ai de mon mieux contribué. Mais la rançon de ce succès, c'est bien évidemment la haine, qui ne pouvant atteindre Sa Majesté, menace de tomber sur moi. Il n'y aura jamais en ce royaume pénurie d'‚mes viles et basses qui, à la vue de la vertu d'autrui, ne sentent leurs entrailles déchirées du désir d'anéantir, si elles pouvaient, celui qui possède les qualités qu'elles n'ont pas.
    - Cependant, …minence, dit Schomberg, vous avez tout lieu d'être satisfait du résultat de votre immense labeur.
    - je suis satisfait, dit Richelieu, mais pour parler à la franche marguerite, je mange mon pain dans la sueur et l'inquiétude.
    Un grand silence tomba alors dans la carrosse et sur nous, car ni Schomberg ni moi-même n'avions envie de prononcer le moindre mot après ce déchirant aveu. Toutefois, à y réfléchir plus outre, il me sembla que les inquiétudes du cardinal n'étaient point justifiées,

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