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Conspirata

Conspirata

Titel: Conspirata Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Harris
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de son entourage (tout le monde comprenait qu’il s’agissait
là d’une référence à Terentia, qu’on disait jalouse de Clodia), et j’applaudis
à sa position d’homme d’État responsable face aux demandes raisonnables du
peuple.
    Deux jours plus tard, dès que les lois clodiennes furent
promulguées, les confréries populaires se rassemblèrent pour fêter leur
rétablissement, faisant résonner d’exaltation les collines et les vallées de
Rome. Loin d’être une manifestation spontanée, ces rassemblements furent
soigneusement orchestrés par le lieutenant de Clodius, un scribe appelé Clœlius.
Pauvres, affranchis et esclaves pourchassèrent des porcs à travers la ville et
les sacrifièrent, sans piètre pour superviser les rites, avant de les faire
rôtir au coin des rues. Loin d’arrêter les festivités à la tombée de la nuit,
ils allumèrent des torches et des feux, et continuèrent de chanter et de danser
(il faisait très doux pour la saison, et cela contribue toujours à grossir les
foules). Ils burent jusqu’à en vomir. Ils forniquèrent dans les rues. Ils
formèrent des bandes rivales et se battirent jusqu’à ce que le sang coule dans
les caniveaux. Dans les quartiers les plus huppés, surtout sur le Palatin, les
nantis se terrèrent dans leurs maisons et attendirent la fin de cette agitation
dionysienne. Cicéron observa tout cela depuis sa terrasse, et je me rendis compte
qu’il se demandait déjà s’il n’avait pas commis une erreur. Mais, quand
Quadratus vint le prier de rassembler d’autres magistrats en ville pour tenter
de disperser la foule, il répondit qu’il était trop tard – l’eau
avait largement atteint son point d’ébullition, et le couvercle ne pourrait
plus rester en place sur la marmite.
    Vers minuit, le vacarme commença à faiblir. Les rues se
calmèrent à l’exception de ronflements sonores qui s’élevaient çà et là du
forum tels des coassements de crapauds-buffles dans un marais. Je me couchai
avec soulagement. Mais, une ou deux heures plus tard, je fus réveillé par un
bruit. C’était très distant et, dans la journée, nul n’y aurait prêté attention :
seuls l’heure et le silence environnant le rendaient menaçant. C’était un bruit
de marteau s’abattant sur des briques.
    Je pris une lampe, montai au rez-de-chaussée, ouvris la
porte de derrière et gagnai la terrasse. La cité était encore très sombre et l’atmosphère
douce. Je ne voyais rien. Mais les coups, qui provenaient de l’est du forum,
étaient plus nets au-dehors et, en tendant l’oreille, je pus distinguer des
martellements bien distincts – des coups isolés, ou le plus souvent
en rafales, du métal contre la pierre, qui résonnaient par toute la cité
endormie. Le son était si continu que j’estimais qu’il devait y avoir une bonne
dizaine d’équipes travaillant de conserve. Il y avait des cris occasionnels, et
soudain un bruit de gravats renversés. C’est alors que je pris conscience que
je n’entendais pas un chantier de construction, mais une entreprise de
démolition.
    Fidèle à son habitude, Cicéron se leva peu après l’aube et
je le rejoignis comme de coutume dans la bibliothèque pour voir s’il avait
besoin de quelque chose.
    — Tu as entendu ces coups de marteau, cette nuit ?
me demanda-t-il.
    Je lui répondis que oui. Il pencha la tête de côté pour
écouter.
    — Tout est silencieux maintenant. Je me demande quels
dégâts il y a pu avoir. Descendons voir ce que ces vauriens ont fabriqué.
    Il était encore trop tôt pour que les clients de Cicéron
fussent arrivés, et la rue était déserte. Nous nous rendîmes au forum
accompagnés par un serviteur solidement bâti, et, au début, tout nous parut
normal hormis les tas de détritus, vestiges des réjouissances de la veille, et
les quelques corps étendus, ivres morts. Mais lorsque nous arrivâmes devant le
temple de Castor, Cicéron s’immobilisa et poussa un cri d’horreur. L’édifice
avait été affreusement défiguré. L’escalier qui permettait d’accéder à la
façade à colonnes avait été abattu, de sorte que celui qui voulait pénétrer
dans le temple se retrouvait à présent face à un mur dénudé deux fois haut
comme un homme. Les mœllons avaient été rassemblés pour former un parapet, et
le seul accès au temple se faisait par le biais de deux échelles, chacune gardée
par des hommes armés de marteaux de forgeron. Le mur de briques rouges

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