Contes populaires de toutes les Bretagne
voleurs voulurent les attaquer, mais le chien Brise-Fer les mit en déroute.
Le deuxième chien, qui s’appelait Chasseur, rapportait des lièvres que Yann
faisait rôtir sur un feu de bois. Quant au troisième chien, qui avait nom
Rapide-comme-le-Vent, il arrivait à attraper des perdrix et des oiseaux de
toutes sortes.
Or en ce temps-là, il y avait, non loin de là, une forêt où
on prétendait qu’il y avait autant de gibier que d’arbres. Mais personne
n’osait pénétrer dans cette forêt, car on prétendait qu’on ne pouvait en sortir
vivant.
Quand Yann eut appris ces choses, il se dit :
— Si je tentais l’aventure, je ne risquerais rien
puisque mes trois chiens sont là pour me défendre. Et puis, je serais fixé sur
le mystère de cette forêt.
Avec sa sœur et ses trois chiens, il se dirigea vers la
forêt. Comme il arrivait à la lisière, il fut tout surpris de voir qu’il y
avait devant lui une barrière d’arbres si pressés, aux frondaisons si touffues
que la lumière du soleil n’y passait point. La forêt était sombre et noire.
Mais que pouvait-il faire d’autre que d’y pénétrer ? Or, dès qu’il se mit
à écarter les branches pour passer, il entendit comme une voix qui murmurait
dans les arbres :
— Ne va pas plus loin, car ta vie est en danger !
— Bah ! dit Yann. On verra bien qui parle ainsi.
Il s’engagea dans la forêt et découvrit dans une clairière
une maison abandonnée. Il y installa sa sœur et partit en chasse avec ses trois
chiens. Ce qu’on lui avait dit au sujet de la forêt était vrai : à chaque
pas qu’il faisait, il rencontrait une bête. Les chiens lui apportèrent du
gibier en abondance. Mais il ne rencontra personne.
Sa sœur, qui était restée à la maison commençait à
s’ennuyer. Il avait été convenu entre Yann et elle qu’elle sonnerait la cloche
à midi pour l’appeler à dîner. Mais comme elle était paresseuse, elle s’étendit
sur un lit et s’endormit.
Un bruit étrange la réveilla. Elle se leva, et pleine
d’effroi, elle vit une trappe s’ouvrir dans le plancher de la maison. Et de la
trappe surgirent vingt-quatre géants qui paraissaient forts comme des bœufs.
— Qui es-tu et pourquoi es-tu chez nous ? Tu es
bien audacieuse, dirent les géants d’une voix terrible.
Elle se mit à trembler de tous ses membres.
— Grâce, messieurs, ce n’est pas ma faute, c’est mon frère
qui m’a fait venir ici et qui m’a dit d’y rester pendant qu’il partait à la
chasse.
— Nous allons le châtier, ton frère, dirent les géants.
On ne vient pas impunément s’installer dans notre forêt. Quant à toi, nous
t’épargnerons parce que tu es trop jolie pour mourir, mais à une condition,
c’est que tu nous aides à nous débarrasser de ton frère.
Elle était tellement effrayée qu’elle promit tout ce qu’ils
voulurent. Alors, ils versèrent dans la soupe une drogue empoisonnée et
regagnèrent vivement leur cachette. La trappe était à peine refermée que Yann
survint.
— Pourquoi n’as-tu pas sonné la cloche ?
demanda-t-il.
— Je n’y ai plus pensé, répondit la sœur, car il y a
beaucoup de travail ici. Mais tu verras, la soupe est délicieuse.
Elle n’eut même pas le temps de la lui servir. Le chien
Brise-Fer, dès qu’il était entré dans la maison, avait flairé quelque chose
d’insolite. Il se précipita sur la marmite et la renversa.
— Cela ne fait rien, dit Yann, je rapporte de quoi nous
nourrir.
Et il fit cuire son gibier sur le feu.
Le lendemain, il repartit à la chasse. Les vingt-quatre
géants ouvrirent la trappe et demandèrent :
— Ton frère est-il mort ?
— Il est mieux portant que jamais, dit la fille. Son
chien Brise-Fer a jeté la soupe et le poison.
— Ce n’est que partie remise, dirent-ils. Dans cette
maison, il y a un fauteuil qui a la propriété de glacer tous ceux qui s’y
assoient. Nous allons te le chercher. Tu l’offriras à ton frère en attendant de
lui donner à manger. Il en perdra l’appétit pour toujours.
La sœur promit de faire comme ils voulaient. Mais dès que
Yann fut entré dans la maison avec ses trois chiens, le premier objet qui
attira l’attention de Brise-Fer, fut le fauteuil. La brave bête se précipita
dessus et le mit en pièces.
Le lendemain, les géants revinrent et demandèrent si Yann
était mort. La fille leur raconta ce qui s’était passé.
— Certes, dirent les géants, ce sont ses chiens qui
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