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Contes populaires de toutes les Bretagne

Contes populaires de toutes les Bretagne

Titel: Contes populaires de toutes les Bretagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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clore le bec aux curieux !
    La nuit suivante se passa à peu près comme la première.
Grâce au feu qu’il avait tenu allumé, Daïg s’aperçut que le petit homme rouge,
pour entrer, n’avait pas besoin d’ouverture : entre le seuil et
l’encadrement des portes, il y avait assez d’espace libre pour lui livrer
passage tant il savait se faire menu. Daïg remarqua aussi, bientôt après, non
sans quelque contentement, que le corps de son étrange camarade semblait avoir
repris un peu de chaleur.
    Au troisième chant du coq, le petit homme se jeta au bas du
lit, comme la veille.
    — Écoute-moi, dit-il, c’est aujourd’hui dimanche, et tu
me reverras ce soir, à dix heures, pour la dernière fois. Si tu veux finir ce
que tu as si bien commencé, il est de toute nécessité que tu ne t’attardes
point dans le voisinage. Quoi qu’il advienne, trouve-toi ici avant le dernier
coup de dix heures. Me le promets-tu ?
    — Je te le promets.
    — Tu ne parleras pas de moi ?
    — Je serai muet.
    Daïg Parker s’en alla au bourg pour entendre la messe. Il
rencontra de nombreuses connaissances, et chacun voulait le voir. Il était
l’audacieux qui réussissait à passer la nuit au Koz-Ker. Mais personne n’osait
lui poser des questions au sujet des revenants. On attendait qu’il parlât, mais
il ne dit rien, se contentant de détourner habilement les conversations. Tout
alla bien jusqu’à la nuit. Plus d’une chopine fut bue, plus d’une partie de
cartes fut engagée, et chose étonnante, Daïg gagnait à tous les coups.
    — Ma revanche ! ma revanche ! criaient les
joueurs ahuris de leur déveine.
    Il ne la refusait à aucun, et la chance, une chance vraiment
insolente, ne le quittait pas d’une semelle.
    Cependant, le temps passait, et déjà, dans le bourg, il n’y
avait plus guère de gens debout. Quand Daïg entendit sonner neuf heures, il jeta
les cartes sur la table et se leva pour se retirer.
    — Quitte ou double ! quitte ou double ! tu ne
peux pas nous lâcher ainsi ! crièrent trois ou quatre mécontents, quelque
peu fatigués par la boisson, en essayant de lui barrer le passage.
    — Dans le mouchoir qui gonfle ta poche, ajouta l’un
d’eux, tu as, à cette heure, plus de dix écus en argent blanc. Depuis quand
est-il de mode de déguerpir sans accorder la belle aux camarades, après leur
avoir tout raflé ?
    — Je ne jouerai pas plus longtemps, laissez-moi partir,
dit fermement Daïg. D’ailleurs, je vous ai accordé revanche sur revanche. Nous
reprendrons tout cela sous huitaine si vous le voulez. Bonsoir !
    Une bousculade générale s’ensuivit, mais d’un coup de tête,
Daïg fit une trouée dans le tas et parvint à s’esquiver.
    Il marchait vite, n’ayant plus que le temps nécessaire pour
arriver au Koz-Ker à l’heure convenue. Mais au moment où il venait de s’engager
dans un chemin creux, voilà que deux bâtons, vigoureusement maniés,
s’abattirent sur sa nuque. Il tomba d’un côté et son chapeau de l’autre.
    — Feu de Dieu ! hurla-t-il en se relevant tout
ensanglanté. J’aurai la peau des gredins qui m’ont trempé cette soupe et je
ferai des sifflets avec leurs os !
    Hélas ! les agresseurs inconnus avaient joué des
jambes. Ils se trouvaient déjà loin, et son argent avec eux.
    Daïg se demandait quel parti prendre. Allait-il leur donner
la chasse, comme il venait de le dire ? Ce fut son premier mouvement,
mais, fort à propos, il songea à son compagnon de lit, à la promesse qu’il lui
avait faite, et, remettant à plus tard le soin de sa vengeance, il reprit, en
homme de parole, le chemin de sa maison.
    Le Koz-Ker était encore assez éloigné et le pauvre Daïg
avait perdu beaucoup de temps. Parviendrait-il à le rattraper ? Il
s’avança résolument dans la voie sombre et étroite qui s’ouvrait devant lui. Ce
fut pendant quelques minutes une course folle, effrénée, désespérée. Mais après
un dernier effort, sa main rencontra le loquet de la porte. La vieille horloge
du bourg sonnait dix heures.
    Daïg essaya de reprendre son souffle. Peu après, le petit
homme rouge pénétra dans la maison.
    — Comment ? fit-il. Tu n’es pas encore
couché ?
    — Non. Je rentre, comme tu le vois, mais ce sera tôt
fait.
    Cette nuit-là, le petit homme rouge avait beaucoup moins
froid. À minuit, il était presque entièrement réchauffé. Au troisième chant du
coq, il réveilla son compagnon et lui dit :
    — L’épreuve que la

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