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Dans le jardin de la bête

Dans le jardin de la bête

Titel: Dans le jardin de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erik LARSON
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véritablement dans l’Allemagne nouvelle. « Les Américains qui viennent en Allemagne  29  se trouveront entourés par des proches du gouvernement et ils seront tellement absorbés par d’agréables divertissements qu’ils n’auront guère l’occasion de prendre réellement le pouls de la situation. »
    Messersmith poussa Kaltenborn à entrer en contact avec certains correspondants américains à Berlin, qui se feraient fort de lui confirmer le contenu de ses dépêches.
    Kaltenborn écarta cette idée. Il connaissait beaucoup de ces correspondants. Leur opinion était biaisée, soutint-il, comme celle de Messersmith.
    Il poursuivit son voyage, et il fut rapidement contraint de réévaluer sa position face à une situation irréfutable.

8
    R ENCONTRE
AVEC P UTZI
    A vec l’aide de Sigrid Schultz et de Quentin Reynolds, Martha s’introduisit aisément dans la société berlinoise. Intelligente, flirteuse et jolie, elle devint la coqueluche des jeunes fonctionnaires du corps diplomatique et une invitée recherchée pour les soirées informelles, avec les fameux dîners haricots-saucisses où la bière coulait à flots, qui avaient lieu quand les obligations incontournables de la journée avaient pris fin. Elle devint également une habituée  1  des réunions d’une vingtaine de correspondants qui se tenaient dans un restaurant italien, Die Taverne, appartenant à un Allemand et sa femme belge. Le restaurant réservait toujours une grande table ronde dans un coin pour le groupe – une Stammtisch , une table pour les habitués – dont les membres, y compris Schultz, commençaient généralement à arriver vers dix heures du soir et pouvaient traîner jusqu’à quatre heures du matin. Le groupe avait acquis une sorte de célébrité. « Tout le monde au restaurant  2  a les yeux fixés sur eux et essaie de saisir ce qui s’échange, raconte Christopher Isherwood dans Adieu à Berlin . Si vous avez une information à leur communiquer – les détails d’une arrestation ou l’adresse d’une victime dont la famille est susceptible d’accorder un entretien –, un des journalistes quitte la table et fait les cent pas dehors avec vous, dans la rue. » La table avait souvent droit à une visite exprès des premier et deuxième secrétaires des ambassades étrangères et ses divers attachés de presse nazis, et, à l’occasion, celle du chef de la Gestapo, Rudolf Diels. William Shirer, un membre récent du groupe, voyait en Martha une bonne recrue : « Jolie, vive  3 , sachant argumenter avec force. »
    Dans ce nouveau monde  4 , la carte de visite était un sésame essentiel. L’aspect de la carte de visite d’une personne reflétait son caractère, sa façon de se percevoir, ou comment elle voulait être perçue. Les dirigeants du parti nazi avaient invariablement les plus grandes cartes avec les titres les plus imposants, généralement imprimées en caractères gothiques. Le prince Louis Ferdinand, fils du prince héritier allemand, un jeune homme d’un naturel doux qui avait travaillé dans une usine de montage Ford aux États-Unis, avait une carte minuscule, avec seulement son nom et son titre. En revanche, son père avait une grande carte avec d’un côté, une photographie de lui en grand apparat, l’autre côté vide. Les cartes avaient plusieurs usages. On pouvait y griffonner une note pour une invitation à dîner ou un cocktail ou pour un rendez-vous galant. En barrant simplement le nom de famille, un homme ou une femme laissait entendre de l’amitié, de l’intérêt, voire quelque chose de plus intime.
    Martha accumula des dizaines de cartes et les conserva. Des cartes du prince Louis, qui devint bientôt un soupirant et un ami ; de Sigrid Schultz, bien sûr ; et de Mildred Fish Harnack, qui était présente sur le quai de la gare quand Martha et ses parents avaient débarqué à Berlin. Un correspondant de United Press, Webb Miller, écrivit sur sa carte : « Si vous n’avez rien de plus important à faire  5 , pourquoi ne pas dîner avec moi ? » Il indiquait le nom de son hôtel et le numéro de sa chambre.
     
    Enfin, elle rencontra son premier haut responsable nazi. Comme promis, Reynolds l’emmena à la réception d’un ami anglais, « de vraies agapes, et très arrosées »  6 . Bien après leur arrivée, un géant entra en claquant la porte, une armoire à glace avec une tignasse noir de jais – « d’une façon sensationnelle »

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