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Dans le jardin de la bête

Dans le jardin de la bête

Titel: Dans le jardin de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erik LARSON
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sudiste  20 , qui gérait l’ambassade avec un lance-pierre et s’efforçait sans doute d’épargner de l’argent sur son salaire, écrivit Hanfstaengl dans ses mémoires. À une époque où il aurait fallu un solide millionnaire pour rivaliser avec la flamboyance des nazis, il tournait en rond, marchant à petits pas, effacé, comme s’il était encore sur le campus de son université. » Hanfstaengl l’appelait dédaigneusement « papa » Dodd  21 .
    « Ce que Dodd avait de mieux  22 , écrit-il encore, c’était la blonde Martha, sa ravissante fille, que j’ai eu le privilège de très bien connaître. » Hanfstaengl la trouvait charmante, pleine de vitalité et manifestement une femme qui aimait les plaisirs de la chair.
    Ce qui lui donna une idée.

9
    L A MORT
EST LA MORT
    D odd cherchait à maintenir sa position objective malgré ses rencontres avec des résidents qui avaient été confrontés à une Allemagne très différente du domaine plaisant, ombragé, qu’il traversait chaque matin à pied. L’un de ces résidents était Edgar A. Mowrer, à l’époque le plus célèbre correspondant à Berlin et au centre d’une violente controverse. Outre qu’il était attaché au Chicago Daily News , Mowrer avait écrit un livre à succès, Germany Puts the Clock Back ( L’Allemagne retourne en arrière ), qui avait déclenché la colère des dirigeants nazis, au point que les amis de Mowrer pensaient que sa vie était en danger. Le gouvernement d’Hitler voulait qu’il quitte le pays. Mowrer entendait rester et vint trouver Dodd pour lui demander d’intercéder.
    Depuis longtemps, Mowrer servait de cible à l’ire nazie. Dans ses reportages en provenance d’Allemagne, il avait réussi à tailler sous la patine de la normalité pour saisir des événements qui forçaient à s’interroger et il utilisait des techniques de récit novatrices. Une de ses plus éminentes sources d’information  1  était son médecin, un Juif, fils du grand rabbin de Berlin. Toutes les deux semaines environ, Mowrer prenait rendez-vous pour le consulter, ostensiblement pour un mal de gorge persistant. Chaque fois, le docteur lui remettait un compte rendu dactylographié des plus récents débordements nazis, une méthode qui fonctionna jusqu’à ce que le médecin soupçonne que Mowrer était suivi. Ils décidèrent donc d’un nouveau lieu de rendez-vous : chaque mercredi à onze heures quarante-cinq, ils se retrouvaient dans les toilettes publiques sous la Potsdamer Platz. Ils occupaient des urinoirs voisins. Le docteur laissait tomber son dernier rapport, que Mowrer ramassait.
    Putzi Hanfstaengl tenta de saper la crédibilité  2  de Mowrer en faisant courir le bruit que si ses reportages étaient aussi virulents, c’était parce qu’il était un Juif « planqué ». De fait, Martha avait eu la même idée. « J’avais tendance à penser qu’il était juif »  3 , reconnaissait-elle ; elle « considérait que son hostilité n’était suscitée que par sa conscience raciale ».
    Mowrer était effaré de voir que le monde extérieur ne saisissait pas ce qui se tramait réellement en Allemagne. Il découvrit que son propre frère en était arrivé à douter de la véracité de ses reportages.
    Mowrer invita Dodd à dîner dans son appartement qui dominait le Tiergarten et tenta de lui ouvrir les yeux sur certaines réalités cachées. « En pure perte  4 , nota Mowrer. Il savait mieux que moi ce qu’il en était. » Même les agressions périodiques contre les Américains semblaient ne pas ébranler l’ambassadeur, remarqua Mowrer : « Dodd déclara qu’il ne souhaitait nullement s’ingérer dans les affaires intérieures de l’Allemagne. »
    De son côté, Dodd estimait que Mowrer était « presque aussi véhément  5 , à sa façon, que les nazis ».
    Les menaces contre Mowrer augmentèrent. Au sein de la hiérarchie nazie, on parlait de s’en prendre à lui physiquement. Le chef de la Gestapo, Rudolf Diels, se sentit obligé  6  de prévenir l’ambassade des États-Unis que le seul nom de Mowrer mettait Hitler hors de lui. Diels craignait qu’un fanatique n’en vînt à tuer le journaliste ou sinon « À l’éliminer ». Diels affirmait avoir donné l’ordre à certains hommes « de responsabilité » de la Gestapo d’exercer une surveillance discrète sur Mowrer et sa famille.
    Quand Frank Knox, le propriétaire du Chicago Daily News et patron de

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