De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires
camp ont pour mission de s’occuper autant qu’il le désire de sa vie privée et de faciliter le déroulement de son travail par des dispositions judicieuses. Gardiens ultimes de sa sécurité, ils l’accompagnent dans tous ses déplacements, qu’ils soient officiels ou bien privés, l’organisation de ces derniers étant de leur ressort. Leurs responsabilités sont multiples : elles vont de la préparation des audiences à l’introduction des visiteurs, des instructions à donner au valet de chambre pour les tenues qu’il lui faut préparer aux rendez-vous avec le médecin ou le dentiste, de la rédaction de la déclaration des revenus à la correspondance avec le fermier de Coulogne et au versement des cotisations à la Caisse des travailleurs indépendants, etc.
À l’origine de ces versements à la Caisse des travailleurs indépendants se trouve un article de Gérard Bauer intitulé « Feuilles d’automne » et publié dans sa chronique quotidienne du Figaro . L’auteur s’y plaignait qu’avec la chute des feuilles, l’automne apportait d’autres feuilles de couleur qui sont autant de commandements à payer au Trésor ou autres caisses. Et le journaliste de se demander si tel auteur illustre au sommet de l’État était lui aussi astreint aux mêmes versements.
Le Général ne pouvait manquer de relever cet article. Il me fait faire une enquête auprès de la Sécurité sociale afin de savoir s’il doit également cotiser pour son activité d’auteur. La réponse est affirmative, mais j’ai quelque peine à lui faire admettre que, bien que n’appartenant pas à la Sécurité sociale, il lui faut cependant contribuer, ce qu’il fait régulièrement après avoir payé les arrérages.
— Mais je n’appartiens pas à la Sécurité sociale ! fut sa réflexion.
Un tel versement m’apparaissait aussi anormal étant donné qu’il versait l’intégralité de ses droits d’auteur à la Fondation Anne-de-Gaulle.
Pour tout dire, les aides de camp sont les plus proches collaborateurs du Général et, de ce fait, l’harmonie au sein de leur bureau est essentielle.
Dans les premiers jours de mon installation à l’Élysée, notre mode de fonctionnement me pose quelques problèmes. J’ai le sentiment désagréable que le colonel Bonneval a tendance à me considérer comme son adjoint et qu’il me télécommande. Il est « colonel plein », comme nous disons. Je ne suis que modeste capitaine de corvette – c’est-à-dire commandant – et sans doute considère-t-il que je dois lui obéir. Un point de vue que je ne partage pas du tout : je me considère responsable de mes fonctions auprès du président de la République, de même que l’officier de quart en mer, quelle que soit sa place dans la hiérarchie, est responsable auprès du commandant de la sécurité du navire.
Ce qui n’empêche pas, ai-je dit à Bonneval, qu’on tienne compte de ses conseils et remarques, puisqu’il est le plus gradé d’entre nous trois. Lui-même était donc colonel de l’armée de terre, Teisseire, lieutenant-colonel de l’armée de l’air, et moi capitaine de corvette de la Marine.
Il s’agissait de régler le service entre nous et de définir nos responsabilités. En jeune diplômé de l’École de guerre navale, je m’attelle à la rédaction d’une instruction à cet effet.
Partant du principe que le président de la République doit avoir le même aide de camp durant une semaine entière, que celui-ci doit pouvoir l’accompagner à Colombey, habituellement un week-end sur deux, j’en ai conclu qu’il doit prendre ses fonctions le mercredi soir, jusqu’au jeudi après-midi de la semaine suivante. La première nuit, celle du mercredi, il assumerait la permanence d’officier d’état-major. Sur cette base, j’organise, entre les trois aides de camp, un roulement qui fonctionnera harmonieusement. La semaine précédant votre service, disons à « temps plein », vous avez la possibilité de connaître le calendrier des réunions et des événements auxquels vous aurez à faire face, et de vous y préparer. La semaine suivant votre « temps plein », vous jouissez, au contraire, d’une certaine liberté.
Mon projet, soumis au directeur de cabinet, reçut son agrément. Je suppose qu’il le fit connaître au Général, tant il m’a toujours paru être au courant de ce roulement qui le satisfaisait. D’ailleurs, quand je revins à l’Élysée en 1965, j’eus le
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